2013-06-16

Voici une étude de Proclus, publiée sur wikibuster.org en 2010. Son travail est resté inachevé mais il faisait déjà à l’époque de nombreux commentaires très pertinents.



Wikipédia, un Jeu de Milgram ?

Le caractère de Jeu de Milgram en taille mondiale des divers wikipedia conduit au développement nombreuses entreprises d’observation et de critiques. Ces observations et études critiques sont des sources diverses :

D’ex-wikipédiens bannis pour des raisons diverses, rarement valides.

Des études journalistiques portant le plus souvent sur le culte de l’amateur et la tendance constante à bannir les experts.

Des études sociologiques.

Ces études ont une extension géographique internationale.

I – Qu’est-ce que l’expérience de Milgram ?

Il s’agit d’une situation expérimentale dans laquelle un candidat reçoit des instructions d’interrogation et de sanction. Il interroge un certain nombre de personnes placées en face de lui séparées de lui par une vitre. Si ces personnes répondent mal, il doit les réprimer par une quantité prudente d’électricité. On l’instruit sur les quantités d’électricité douloureuses et sur les niveaux dangereux à ne pas dépasser sans mettre en jeu la vie des personnes interrogées. Le candidat n’est pas instruit du fait qu’il est le cobaye et fait l’objet du test.

L’expérience teste, chez le candidat chargé des questions, la résistance à l’autorité d’un instructeur. Les résultats montrent que 60% des candidats n’hésitent pas à réprimer jusqu’aux doses dangereuses, voire jusqu’à la mort des personnes placées sous son contrôle, en dépit des cris et de la douleur simulée par les interrogés, tous acteurs.

Les admins de wikipedia sont dans la situation du candidat. Ils croient faire vivre l’encyclopédie alors que leur vrai rôle consiste à réprimer les contributeurs. Wikipédia est une expérience de Milgram en grandeur réelle. A côté de cette réalisation qui dure depuis 8 ans, des entreprises connaissent l’évolution d’un style managérial menant les subordonnés au suicide.

Ce ne sont pas les procédures d’arbitrage qu’il faut changer mais le statut des admins ! Il faut qu’ils soient élus pour un temps limité et qu’ils retournent à la base de temps à autres ; c’est la seule façon d’empêcher le fascisme de tel ou tel d’entre eux de sévir.

II – Les études, enquêtes, recherches

a) Observations menées par d’ex-wikipédiens.

La wikipedia anglophone étant la plus ancienne, les entreprises de critique ont naturellement démarré de ce côté. Les ex-wikipédiens agissent seuls ou regroupés.

Anglophone.

Le plus ancien est wikipedia-watch de Daniel Brandt qui entretient liste des harceleurs avec leurs vrais noms. Il donne le texte de la loi américaine qui interdit l’usage de l’outil de CU. Cela se nomme HiveMind Administrators. S’y sont ajoutés les démêlés de HiveMind v/Brandt dans laquelle Daniel Brandt montre les difficultés pour obtenir la suppression de sa biographie dans wikipédia avec les échanges de noms d’oiseaux assortis. On y trouve aussi la liste des noms d’oiseaux échangés en IRC où les administrateurs se lâchent.

A noter que la loi française sur la confiance numérique interdit aussi ce type de pratique reconnaissant le droit à l’anonymat, même allègrement transgressé par la loi HADOPI.

The wikipedia review dont la spécialité est l’atteinte à l’anonymat sur internet et les méthodes cavalières de contrôle d’identité électronique.

"On wikipedia", un regard indépendant sur Wikipédia.

Francophone.

Toutefois, la plus ancienne entreprise francophone est celle de Alithia et son observatoire : Wikipédia, un mythe où elle attaque ferme sur le mythe de la neutralité en montrant les sympathies pour le néo-nazisme et la complaisance à l’égard des islamistes. Elle montre aussi par les faits et les liens la tendance croissante à l’expulsion des experts, la permanence des erreurs factuelles dans les articles pour peu qu’ils soient correctement soutenus par une armée de lobbyistes" (jargon wikipédiens "Pov-pushers")

b) Entreprises journalistiques.

Là aussi les anglophones sont en pointe.

Principaux journalistes américains.

Ces journalistes sont engagés tant dans la critique de la corruption sur la wikipedia anglophone, que sur les méthodes de harcèlement, la chasse et l’expulsion des experts, les tics des administrateurs, etc.

Seth Finkelstein s’intéresse principalement au crowd sourcing, c’est à dire la possibilité pour les entreprises commerciales, donc génératrices de profit, de recourir à une main d’oeuvre gratuite qui travaille strictement pour la gloire, ce qui distingue ce crowdsourcing du mouvement opensource qui, lui travaille pour le plus souvent pour des organisations sans projet de profit (Linux). Le cas de OpenOffice venu par Sun à Oracle laisse présager une mutation vers le profitable.

Propositions faite par des revues scientifiques.

Un certain nombre de journaux et de revues scientifiques ont fait des propositions pour que wikipédia aille vers la qualité : La Recherche, Le Monde, Libération, voir en particulier l’excellente analyse de Daniel Schneidermann.

c) Travaux de chercheurs.

Quelques travaux sociologiques et beaucoup d’enquêtes faîtes par les revues et les journaux.

Des universitaires se penchent sur le malade.

Sciences Po, Université Pierre et Marie Curie, Université de Lausanne, le Café pédagogique, etc.

Une évaluation du contenu des articles par des chercheurs.

"Wikigrill", chaque mois, Wikibooks passe au grill l’un des articles de l’encyclopédie.

III – Problématiques soulevées

Elles sont de diverses natures :

Le fonctionnement de wikipédia, les relations entre les contributeurs et les administrateurs, l’évolution dans la hiérarchie, la nature des élections.

Le financement des wikipédia. Si des appels aux dons sont en permanence dans les pages (zone de navigation), ce sont plutôt les dons de sociétés high tech et les subventions gouvernementales qui font vivre wikimédia et, partant, wikipédia. Les relations au fisc sont aussi étudiées.

Le travail dissimulé.

La création d’un autre ordre de vérité scientifique qui n’est plus la vérité démontrée parce que démontrable ou expérimetnable des sciences dures non plus que l’état de l’art (et donc du débat) des sciences humaines mais une vérité "voté" par les wikipédiens.

a) La tyranie des administrateurs.

Article spécialisé a contrario problématiques posées par les administrateurs.

Le niveau des interventions de la plupart des "administrateurs" sur ce "bulletin des administrateurs", édifiant ! Le BA est le club fermé de ceux qui ont une passion en commun : mépriser les intellectuels via les petits pouvoirs qu’on leur a confiés arbitrairement et diffamer les internautes pour qui la confrontation des idées est un moteur pour progresser. Grâce aux outils qui servent à :

Protéger les pages.

Bloquer les pages.

Bloquer les utilisateurs enregistrés ou non.

Contrôler les IP.

Connaître les serveurs par lesquels les internautes émettent.

Ces pouvoirs discrétionnaires s’exercent de diverses manières :

Sur les contributeurs parfaitement anonymes "les IP".

Sur les contributeurs qu’ils ont dans le nez (Advanced Contrib.js).

Par la chasse aux faux-nez.

Le CU (check-user) et la chasse aux faux-nez.

Le faux-nez est supposé être la nouvelle identité d’un contributeur banni désireux de se refaire une virginité. Cette chasse au faux nez tourne à l’obsession chez les administrateurs désireux de faire respecter leurs décisions de bannissement et de montrer qu’ils exerent effectivment le pouvoir. Voici un exemple :

"Un nouvel avatar de {{u|Benoit Montfort}} est apparu : {{u|Gerbois Goby}}. "Indépendamment des résultats non-concluants du CU", et d’éventuels éléments complémentaires apportés par un CU expert, je n’ai pour ma part aucun doute. Voilà, vous faites comme vous l’entendez ; je suis un peu fatigué et découragé de tout ça. [[Utilisateur:Hadrien|Hadrien]] [[Discussion Utilisateur:Hadrien|(causer)]] 22 janvier 2008 à 12:07 (CET)"

Benoit Monfort est un contributeur compétent dans le domaine "religion" mais banni. Gerbois Goby est un contributeur compétent dans le domaine religion. Hadrien a demandé un CU et, comme le résultat n’est pas concluant, il le dénonce au bulletin des administrateurs afin qu’il soit identiquement banni. C’est vrai quoi ?

Si des contributeurs compétents se mettent à contribuer dans le domaine religion, il ne va plus être possible de rigoler avec les divers courants fanatiques qui s’insultent. On va donc douter de la nécessité des admins, arbitres, etc.

Sur le net francophone, il ne saurait y avoir, dans leurs fantasmes, qu’un seul contributeur compétent et donc, il faut le bannir.

L’avantage de l’accusation de faux-nez est qu’elle dispense de fournir un motif valable à la demande de bannissement.

Au début d’avril 2008, les admins voulaient :

Vérifier automatiquement tous les nouveaux comptes pour vérifier s’il correspondent avec des IP problématiques (celles d’un éventuel mais imaginaire Benoît Montfort, par exemple).

Bloquer tous les articles sur le christianisme auxquels ne contribueraient que les utilisateurs qu’ils choisissent.

ou faire des versions de travail à synchroniser ultérieurement. Voici qui empêcherait de mettre un bandeau de non neutralité ou de non pertinence sur les articles en cours.

On comprend là que à cette époque où 2 administrateurs étaient catholiques intégristes, leur problème consistait à contrôler le contenu éditorial des articles dans un sens confessionnel qui leur convenait.

b) Le tout sécuritaire.

Le check-user et ses usages

fichier nominatif non déclaré à la CNIL

c) La wikialité.

Actuellement, l’absence de comité de lecture constitué de personnes compétentes et bien entendu non anonymes nuit fortement à la crédibilité/fiabilité de l’encyclopédie libre, encyclopédie qui pourrait être, au demeurant, une aventure technologique et humaine vraiment très intéressante.

La vérité qui se vote indexée sur le moins-disant culturel et encadrée par les admins : "une poignée d’internautes anonymes élus par n’importe qui et dont les compétences ne sont pas validées".

L’expulsion des experts.

d) Le lobbying.

L’action des groupes de pression peut être diverse.

Image de marque.

les grandes entreprises qui surveillent leur image de marque tentent d’influer sur le contenu es articles les concernant des pipoles qui surveillent leur image, voir l’affaire Bogdanoff.

Questions politiques.

Les partis politiques et leurs activistes.

Les principaux conflits politiques internatinaus, le principal étant le conflit du Moyen-Orient, en permanence suivi par le différent belge entre Flamands et Wallons réactivé à chaque élections.

Dans le même ordre d’idée : les médecines alternatives, l’energie nucléaire, l’écologie et le réchauffement climatique.

Les religons.

Dans ce domaine, il s’agit essentiellement d’une inquisition privatisée. Un ou quelques utilisateurs de même sensibilité politique ou religieuse s’associent pour interdire la publication des opinions adverses et interdire l’accès à l’idéal de neutralité de point de vue. Les groupes conservateurs de chaque religion tentent d’empêcher l’emergence de contenus issus des sciences religieuses.

Face à eux les groupes d’athées militants, souvent scientistes, qui tentent d’imposer l’idée que les religions, c’est rien qu’une escroquerie.

Au centre, l’universitaire spécialisé ou le quidam ayant fait des études d’histoire et/ou de littérature qui tente de frayer un chemin à l’état de l’art. L’arbitrage se fait toujours à ses dépens.

e) Le financement.

Le don.

La superposition de sociétés et la transparence des comptes wikia, wikimedia, wikipedia.

Les subventions.

Le maquis de la fiscalité.

f) Le travail dissimulé.

Le crowdsourcing signifie mot à mot : ressource tirée de la foule. Cela consiste à assurer gratuitement un travail pour lequel la plupart des gens se font payer. A part le "passe temps oisif" du crowdsourcing, qui se substitue à la machine à café, les impacts sur l’économie sont essentiellement 3 et s’apparentent à du travail au noir sans salaire ou, s’il s’exerce durant le heures de travail d’un salarié à de la perruque et généralement à du dumping social.

1. Des travailleurs gratuits ont un impact sur le marché du travail et l’évolution des métiers : tout le monde devient une "main d’œuvre" potentielle sans formation spécifique pour le travail assuré. Ce point entraine un nivellement par le bas des compétences et une moindre reconnaissance salariale des compétences acquises dans des formations. C’est une généralisation du travail dissimulé. La qualité du travail fourni peut s’en ressentir : on ne chipote pas sur la qualité dans le cas d’un travail fourni gratuitement. Au final, les entreprises recourant à cette forme de travail sans solde, peuvent avoir à "repasser derrière", réduisant pour une part, l’intérêt économique de cette méthode somme toute esclavagiste.

2. Le transfert des droits de propriété intellectuelle (droits d’auteur, brevets) du travailleur bénévole à l’entreprise utilisant ses compétences ; d’ordinaire, quand un contrat de travail régit les rapports entre le salarié et l’entreprise, les droit financiers relatifs à la propriété intellectuelle sont répartis entre l’entreprise et le salarié.

3. L’impact fiscal : s’il s’agit d’un travailleur indépendant, son chiffre d’affaires est moindre et la TVA n’est pas perçue sur ce travail ; s’il s’agit d’un travailleur usuellement salarié, il ne cotise pas pour la retraite et ne paie pas d’impôt sur le revenu tandis que l’entreprise ne paie pas sa part de cotisations sociales avec l’impact conséquent sur sa pension de retraîte et sur l’équilibre des comptes sociaux de la branche santé.

IV – Effets

Wales est le PDG de la société Bomis et a lancé la société commerciale Wikia.Inc (qui a comme projet de lancer un moteur de recherche) avec l’objectif affiché de concurrencer Google, Yahoo et MSN. Le lancement de Knol par Google est, pour partie, une réponse de Google à cette stratégie clairement commerciale de Wales. Wales souhaite exploiter des milliers d’internautes bénévoles en faisant croire qu’ils sont dans "le libre" (exploitation du capital sympathie du libre), alors qu’en réalité, la stratégie de Wales est d’amasser un maximum de dollars. Les wiki hébergés sur wikia doivent mettre un lien vers wikia où sont placées des pages de pub dont les recettes seront destinées à la société privée de Wales.

La bombe anti-Google tarde à exploser. Se poser en chantre d’un internet ouvert et gratuit a fait de Wales un héros de la toile. Wikipedia était un projet à but non lucratif, chapeauté par une fondation. Avec Wikia, c’est une autre chanson: il s’agira d’une entreprise cherchant à faire des bénéfices… Des analystes doutent pourtant que les internautes se montrent aussi enthousiastes à participer bénévolement à une entreprise commerciale qu’à alimenter les pages de Wikipedia. Le principal intéressé contourne la question : "Evidemment, il faut être gentil pour que les gens ne partent pas". (…) Wales a déjà levé 4 millions de dollars de capital-risque, et Amazon est l’un de ses partenaires. Le chiffre de 10 millions de dollars qui auraient été versés par la librairie en ligne a cependant été démenti, de part et d’autre. Mais l’arrivée de ce géant chez Wikia jette une ombre sur les professions de foi "démocratiques et transparentes" de Wales. Maria Pia Mascaro sur Largeur.com 16 juillet 2007.

La réaction de Florence Devouard, présidente actuelle de la Wikimédia foundation, qui affiche clairement ses divergence avec Wales à ce sujet me semble beaucoup plus saine et beaucoup plus proche des aspirations du monde du libre. Elle s’inquiète de l’effondrement possible du modèle économique de l’encyclopédie libre wikipédia, wikipédia qui a besoin d’être bien placé dans le moteur de recherche de Google pour percevoir suffisamment de dons, elle s’inquiète des confusions possibles dans les esprits à propos du concept de liberté, elle s’inquiète du risque pour wikipédia de se laisser engloutir/absorber par les géants ou alors de se faire écraser par eux, elle sent que quelque chose est en train de changer, que wikimédia oscille, qu’elle est à un "crossroad", un croisement.

Mais Google a déjà cotisé à wikimedia et a situé les articles de wikipedia en tête de rubrique avant même son propre produit encyclopédique !

a) Entreprises concurrentes.

Les critiques portent sur l’ensemble du projet dont il est manifeste que la qualité est le cadet des soucis des responsables de terrain que sont les administrateurs. Intégrer la qualité dans la logique d’ensemble des articles :

Progression, cohérence.

Qualité du style.

Qualité des illustrations et de leur légendes.

Organisation et qualité graphique de l’ensemble texte + illustrations + légendes.

Améliorerait l’utilisabilité et la crédibilité de ce qui n’est, actuellement, qu’un grand réservoir à anti-sèches.

Citizendium.

Larry Sanger (l’un des cofondateurs de Wikipédia qui a quitté le projet) :

"Le Monde a besoin d’une meilleure encyclopédie libre (…) – Nous croyons à la nécessité d’une alternative, que celle-ci est justifiée pour permettre à des personnes ordinaires de travailler sous l’égide d’experts. Nous croyons à la responsabilisation personnelle, incluant l’usage de véritables noms pour identifier les contributions. En bref, nous visons à créer une communauté responsable et à former de bons citoyens globaux".

Citizendium est basée sur le crowdsourcing mais avec procédures de recrutement et d’encadrement pour le personnel et d’évaluation des articles avant publication.

knol.

Comme knowledge et mole lancée par Google. Udi Manber, qui dirige aujourd’hui le projet Knol de Google, a travaillé en tant que scientifique en chef de Yahoo puis comme "officier en chef des algorithmes" chez Amazon.com. La réaction de Wales suite à l’annonce du lancement de Knol est "plus il y a de contenu libre, mieux le monde se porte".

Basée sur le crowdsourcing, sans processus de recrutement sauf pour l’encadrement qui agit en comité de lecture et compile les articles.

b) Actions de consommateurs.

Action de professeurs : nowiki

V – Bibliographie

Un article du Guardian : Wikipedia, un laboratoire des pathologies sociales.

Wikipedia criticism L’auteur défend l’idée que la critique de wikipedia est inutile du fait de son poids et de l’inertie du citoyen.

Pierre Rosanvallon, La contre-démocratie, par Ed. du Seuil, 2006, 346 p., 21 euros. recension de l’ouvrage sur le site d’Alternatives Economiques.

Proclus, wikibuster.org, 18/08/2010

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