2013-01-30



Comment se motiver pour travailler, de l'école primaire à la thèse de doctorat ? Comment devient-on, contre toute attente, un élève modèle ? Comment accède-t-on à Polytechnique lorsque l’on vient d’une banlieue ? Pourquoi mène-t-on à terme une tâche longue et pénible comme la rédaction d’un mémoire ou d'une thèse ? D’où provient le plaisir d’un enseignant de lycée sensible qui ne lâcherait pas son travail pour tout l’or du monde ?
Tout serait-il question de motivation ? Oui, à condition de l’envisager comme un processus dynamique. Une sorte d’alchimie qui peut engendrer – ou non – le cercle vertueux de la réussite.



SOMMAIRE DU DOSSIER

• La motivation, ça s'en va et ça revient...
Martine Fournier

« Bon, me dit Marie, je vais aller commencer ma deuxième journée de travail. » Il est presque 19 heures, les locaux de Sciences Humaines sont désertés, en ces temps estivaux où chacun se hâte de profiter de sa soirée…

Jeune stagiaire d’un institut d’études politiques, Marie vient de me rendre son papier, après que je l’aie un peu torturée en lui demandant mes corrections (eh oui, c’est mon rôle hélas) !

« Ah bon, qu’est-ce que tu vas faire ?

– Je dois rendre mon mémoire de fin d’étude sur le coup d’État au Honduras pour fin août…

– Eh bien dis donc, qu’est-ce que tu es motivée ! »

La réponse de Marie jaillit spontanément : « Motivée moi ? Alors là pas du tout !

– Mais, pourquoi travailles-tu autan [ lire la suite... ]
Article de 2505 mots.

• Comment je suis devenu un élève (presque) modèle
Jean-François Dortier

Quelles sont les raisons qui poussent un ex-cancre à se muer en bon élève ? Elles ne se résument pas à une potion magique – la motivation –
mais à une alchimie de motifs, facteurs et circonstances que
les psychologues s’attachent désormais à démêler avec précision…

J’avais 16 ans et j’étais dégoûté de l’école. Dégoûté, fâché et en révolte. D’abord parce que je n’y comprenais rien. Les mathématiques ? « ax + b = 0 donc x = - b/a », pour moi, c’était de l’hébreu. Et l’inflexible prof de maths, Mme Chapuis – un robot d’acier portant un chignon – ne me paraissait pas un être humain comme les autres. Le français ? Je n’avais jamais pu assimiler la règle d’accord du complément d’objet direct ni celle des verbes intransitifs (elles me sont toujours étrangères), en plus, je frisais la dysorthographie (c’est toujours le cas). Autant dire que ma moyenne en dictée avait toujours avoisiné zéro.

L’anglais ? Les listes de vocabulaire et la règle du prétérit m’ennuyaient à mourir. J’étais prêt à faire un effort pour le jour où j’irais vivre [ lire la suite... ]
Article de 5118 mots.

• Les théories de la motivation

• Une pulsion
pour apprendre

Saint Augustin affirmait l’existence d’une libido sciendi (désir d’apprendre). Pour Freud, celle libido sciendi n’est que l’expression d’une libido sexuelle sublimée dans le désir d’études.
Ce qu’il nommait « l’épistémophilie ». Cette idée d’un désir d’apprendre naturel est reprise aujourd’hui par un courant de recherche sur la « curiosité », dont Jordan Litman, de l’université de South Florida) est l’un des chefs de file, et qui suppose que le désir d’apprendre est une pulsion fondamentale de l’être humain.

• Récompense, sanction et conditionnements

Pour l’approche behavioriste en psychologie, la motivation à apprendre est boostée par les réussites et récompenses et le dégoût provient des échecs et sanctions. Burrhus F. Skinner, le grand manitou du bebaviorisme dans les a [ lire la suite... ]
Article de 1250 mots.

• Parcours de réussite en milieu populaire
Benjamin Castets-Fontaine

Des jeunes de milieux populaires
accédant à Polytechnique, Sciences Po, Normale Sup... Quels sont
les ingrédients de ces scolarités en forme de « randonnées vertueuses » ?
Pourquoi, avec un minimum de capitaux culturels et économiques, certains élèves issus de « milieux populaires » connaissent un maximum de réussite et échappent ainsi aux mécanismes de reproduction scolaire et sociale ? De telles réussites « paradoxales » affolent les plus séduisantes théories explicatives de la réussite scolaire, qui avancent pour la plupart que le milieu social et familial est déterminant pour accéder aux meilleures études et, notamment en France, aux grandes écoles.

Dès lors comment expliquer sociologiquement de telles exceptions ? Cette recherche est fondée sur des entretiens réalisés auprès de 45 élèves issus de milieux populaires ayant accédé par les voies classiques aux plus grandes écoles françaises (Polytechnique, HEC, ENS, Ena…). Elle montre que ces parcours ne tiennent pas du miracle ni ne se résument à des résidus statistiques ! Ils ne se réduisent pas non pl [ lire la suite... ]
Article de 3459 mots.

• La solitude du thésard de fond  (accès libre)
Héloïse Lhérété

Comme le coureur de fond, le doctorant doit tenir la distance.
Mais à la différence du marathonien, personne n’a tracé pour lui
de ligne d’arrivée. Le plus dur dans la thèse, c’est de finir.
Au début, tout était rose. Sophie se répétait avec gourmandise : « Je suis en thèse d’anthropologie.  » Elle salivait rien qu’en pensant à son sujet de recherche. Étudiante brillante, bénéficiaire d’une bourse de recherche, elle se rêvait en futur Lévi-Strauss. Puis le temps a passé. Les références bibliographiques se sont amoncelées. « Je cherche, je cherche, et hop… je me remets à chercher », déplore-t-elle. Sa vie a pris une mauvaise pente : elle s’est fâchée avec son directeur de thèse, s’est mise à déprimer et à dépenser ses maigres ressources chez un psychiatre. « J’ai l’habitude des thésards  », lui a confié ce médecin. Entre-temps, les amis de Sophie se sont mariés, ils ont eu des enfants. Ils ont acheté une belle voiture, pris un crédit immobilier. Aujourd’hui, Sophie a le sentiment amer de faire du surplace. Envisage-t-elle d’abandonner cette thèse qui, de son propre aveu, lui « pourrit l’existence » ? Non, elle n’ose pas. « C’est impossible, mes parents ne comprendraient pas », glisse-t-elle d’une voix étranglée. Elle a 40 ans.

Comme Sophie, 65 000 personnes sont actuellement embarquées dans une thèse de doctorat en France, dont plus de la moitié, 38 000, en lettres, langues, économie, droit et sciences humaines. Le nombre de thèses délivrées chaque année (autour de 10 000) a doublé en vingt ans, sans que les perspectives d’emploi ne s’ouvrent vraiment (1). Les situations – tant matérielles que psychologiques – varient d’un doctorant à l’autre : certains ont un financement, d’autres non ; certains ont choisi leur sujet, d’autres se le sont vu imposer ; certains travaillent en solitaire, d’autres sont insérés dans une équipe… Mais tous s’accordent sur un point : la thèse s’apparente à une épreuve personnelle. Elle ne se résume pas à une aventure intellectuelle, elle engage tous les domaines de la vie. Elle consume le temps, transformant son auteur en un être hybride, mi-étudiant, mi-adulte, coincé entre deux âges. Elle dévore aussi l’espace, par l’empilement de livres, de fiches et de brouillons. Elle empiète sur la vie privée. Elle prend la tête. Elle occupe aussi le cœur, par l’implication affective qu’elle suscite : « Ma thèse, c’est ma vie, ma passion, ma maîtresse  », résume joliment Tanguy, doctorant en droit, qui planche depuis cinq ans sur « Les actions de préférence et les groupes de société ». C’est aussi l’objet de toutes ses angoisses, à mesure que s’approche le cap de la trentaine. « Heureusement que je n’habite plus chez mes parents, reconnaît Tanguy, non sans humour. Parce que sinon, avec mon prénom, ce serait le pompon. »

Un choix de vie

Pourquoi s’engage-t-on dans une telle aventure ? Quand on leur pose la question, la plupart des apprentis chercheurs bottent en touche. « Il y a des questions qu’on ne pose pas à un thésard  », réplique Arthur, doctorant en géographie croisé sur Twitter. Quelques-uns avancent timidement « le goût de la recherche », le fait de « construire quelque chose avec sa pensée ». Hélène, doctorante en psychologie à Metz, admet avoir peur du chômage : « La thèse me permet de repousser l’échéance de la confrontation au marché du travail. »

Seuls 10 % des doctorants en sciences humaines touchent une allocation de recherche. Les mieux lotis ont un contrat en entreprise ou dans un organisme privé de recherche, mais ils gagnent rarement plus de 1700 euros par mois. Autant dire que l’argent n’est pas leur motivation. De nombreux doctorants travaillent à côté. Tanguy, le thésard en droit, occupe ainsi un poste de juriste en entreprise. Il fait sa thèse « le matin avant de partir au boulot, entre midi et deux pendant la pause déjeuner, et parfois le week-end  » et dit trouver son équilibre dans ce va-et-vient. Certains vivotent grâce à l’appui financier de leurs parents ou de leur conjoint, situation moralement inconfortable. Quant aux perspectives professionnelles, elles se révèlent plutôt déprimantes. Les places de chercheur au CNRS ou de maître de conférences à l’université, graal de tout doctorant, sont cruellement rares… La situation vaut à peine mieux du côté du privé. Une étude récente a révélé qu’en France, le doctorat constitue un frein à l’embauche. Les recruteurs jugent souvent les docteurs trop vieux, trop rigides, trop théoriques…, et leur préfèrent les titulaires d’un master professionnel ou d’un diplôme de grande école (2).

Michel Beaud, auteur de L’art de la thèse (3), prévient : « C’est une erreur de se lancer dans une thèse (…) si on n’a pas des raisons sérieuses et profondes de la mener à bien. » De son côté, la sociologue Claudine Herzlich, auteure d’un livre du même type destiné aux apprentis chercheurs en sciences sociales (4), insiste sur l’importance d’un « projet réaliste, simultanément au plan intellectuel et professionnel ».
En d’autres termes, il est vain de se lancer sans un bon sujet, une grosse capacité de travail et un amour inconditionnel pour la recherche. L’essentiel est peut-être ce dernier point. « On met souvent en avant la galère la thèse. Mais elle représente aussi un luxe. Pendant quelques années, on a la chance de se consacrer, en toute liberté, à quelque chose qui nous passionne », rappelle Hélène, dont la thèse de psychologie porte sur « Les situations embarrassantes entre deux personnes ».

Des ennemis très prosaïques

Démarrer une thèse est souvent exaltant ; la principale difficulté consiste à tenir à la distance. La liberté qu’offre la recherche peut se retourner en cours de route en un sentiment redoutablement angoissant. Comment avancer dans sa thèse sans date butoir, sans surveillance et sans repères ?

La solitude du thésard est d’autant plus radicale que l’université française ne brille pas par ses capacités d’encadrement. Un sujet de thèse très pointu contribue aussi à isoler le doctorant. « C’est clair que je suis seul face à mes idées, seul face à mon ordinateur, et même seul dans mon monde, puisqu’aucun de mes amis ne comprend rien à ce que je fais » reconnaît Tanguy. Même les mieux insérés n’y échappent pas. Louise, doctorante en psychologie du travail, mène sa thèse dans un organisme de recherche privé. Elle est encadrée par une hiérarchie, évolue dans une équipe. Mais elle ne croise jamais personne pour discuter du fond de sa thèse. Elle en souffre un peu. « Le plus terrible, c’est quand je rentre chez moi, lâche-t-elle. Le soir, à table, je n’ai jamais rien à raconter. Aucune anecdote amusante sur ma journée de travail. Rien. »

Cette solitude fait partie de l’apprentissage du métier de chercheur. Évoluant dans une temporalité déstructurée, le thésard est censé puiser en lui les ressources qui lui permettront de progresser. Dans le creux de la thèse, il découvre que ses vrais ennemis sont rarement des « obstacles épistémologiques ». Ce ne sont pas des théories, des auteurs ou des courants de pensée… Les ennemis sont plus bêtement prosaïques : une flemme persistante, des pannes d’oreiller à répétition, un téléphone qui sonne trop souvent, une addiction à Internet, un compagnon qui compte sur vous pour les courses et le ménage puisqu’on est « à la maison toute la journée », une compagne délaissée qui s’éloigne, un banquier qui s’inquiète, une belle-sœur qui demande tous les dimanches « Alors, la thèse, c’est pour quand ? ».

La reconnaissance,
enjeu crucial

Au fil des mois, la thèse peut ainsi se muer en véritable bourbier. Il suffit de jeter un œil sur les groupes de doctorants qui fleurissent sur Facebook. Ils rassemblent plusieurs milliers de thésards et portent tous des noms évocateurs : « Le huitième péché capital : s’embarquer dans une thèse », « Ma thèse de doctorat, c’est mon Irak à moi », « Les thésards qui trouvent leur thèse inter-“minable” », « Et ta thèse, elle avance ? Mais ta gueule ! »
Derrière ces titres amusants peuvent se jouer des drames humains plus ou moins lourds. Une étude menée à l’université de Bretagne fait apparaître que la thèse est source de stress pour 73,6 % des doctorants. Ce stress se traduit par des symptômes connus : épuisement physique et psychique, angoisses, insomnies, idées noires, sentiment de culpabilité, émotivité exacerbée, accès de violence, douleurs somatiques diverses et variées. Les addictions sont monnaie courante : alcool, tabac, cannabis, psychotropes, boulimie, Internet… Certains doctorants connaissent des dépressions ou « pètent les plombs », en particulier ceux dont la thèse s’allonge au-delà de cinq ans (5).

Ces moments difficiles ne sont pas toujours fatals à la thèse. Pour la sociologue C. Herzlich, ils font même partie de sa « trajectoire », métaphore qu’elle emprunte à la sociologie de la santé : « Une trajectoire de thèse va connaître des plateaux monotones dont on redoute de ne pas voir la fin, des méandres dangereux, des rebondissements heureux et, parfois, des brisures définitives. » La motivation, jamais linéaire, connaît des hauts, lorsque le thésard trouve une bonne formulation ou découvre une lecture enthousiasmante. Des creux, lorsque les jours s’enchaînent sans que la thèse avance. Des abîmes, lorsque le sujet apparaît brutalement comme infaisable.

La reconnaissance de son travail par d’autres chercheurs se révèle alors cruciale. Il peut s’agir d’une reconnaissance financière – bourses, charge de cours, contrat d’édition, etc. – mais aussi de gratifications symboliques : sollicitation pour participer à un colloque prestigieux ou pour publier un bel article, honneurs, voire simples encouragements verbaux.
« Ma thèse a vraiment démarré après que j’ai présenté mon travail lors d’un séminaire de doctorants, raconte ainsi Justine, doctorante en philosophie. J’ai vu de l’intérêt dans le regard des autres, et j’ai reçu des félicitations. Ces signes ont été décisifs pour moi, à un moment où je doutais vraiment. Ils m’ont permis de passer le cap très difficile de la rédaction. » Que l’on soit financé ou non, se sentir reconnu dans son travail, dans sa démarche intellectuelle et dans ses compétences, notamment par son directeur de thèse mais aussi par ses pairs, constitue un puissant levier pour poursuivre l’effort jusqu’à la soutenance.

Abandonner ou conclure

Certaines thèses ne se finissent jamais, elles resteront toujours en souffrance. D’autres meurent à petit feu, parce que leur auteur les délaisse, sans toujours se l’avouer vraiment, pour une vie professionnelle plus épanouissante.

Mais pour la majorité des thésards, il arrive un jour où il devient vital d’en finir. Dans ces cas-là, il n’existe que deux solutions : abandonner ou conclure. En lettres et sciences humaines, la première solution est la plus courante : le taux d’abandon avoisine les 60 % selon une étude menée par le Céreq (6). Les raisons principalement avancées pour justifier l’abandon en thèse sont d’« avoir trouvé un emploi » (dans 40 % des cas), des « raisons financières » (dans 30 % des cas) et d’être « lassé de faire des études » (dans 23 % des cas).Mais dans tous les cas, cette décision a été soupesée pendant de longs mois, parfois entravée par des pressions familiales ou académiques ; elle a été douloureuse à prendre.

Pour les autres, il faut une échéance. Certains parviennent à se la fixer eux-mêmes. Ainsi Tanguy, qui a déjà repoussé deux années de suite la soutenance de sa thèse de droit, a-t-il décidé qu’il terminait « cette année ou jamais ». D’autres ont besoin d’une contrainte extérieure : la fin annoncée d’un financement en CDD, le refus d’une nouvelle inscription l’année suivante, l’espoir de décrocher un poste à l’université « si la thèse est soutenue avant le 14 décembre ». Il n’est pas rare qu’un événement privé, tel la naissance annoncée d’un enfant, fixe la date butoir tant espérée. Le marathon irrégulier se termine alors en sprint final. Il faut aller au bout, quoiqu’il en coûte. À toute vitesse. Renoncer, l’espace de quelques mois, à ses loisirs et à son sommeil, pour consacrer toute son énergie aux derniers kilomètres. Quitte à revoir ses ambitions à la baisse, à sacrifier un chapitre, à rogner sur les relectures. Quitte à renoncer à être Einstein ou Lévi-Strauss, pour réussir seulement à faire ce qui est demandé : une thèse de doctorat, honnête et honorable. De nombreux thésards franchissent ainsi la ligne d’arrivée qu’ils ont eux-mêmes tracée, au forceps. Épuisés, mais soulagés. Enfin docteurs, ils ont le titre nécessaire pour se lancer à la conquête d’un poste. Le parcours du combattant peut commencer.

Comment surmonter les blocages de l'écriture ?
Procrastination, problèmes de méthode, angoisse de la page blanche… : comment s’en sortir ?
1. Avancer par étapes

Une erreur courante consiste à penser : « Aujourd’hui, il faut que je m’attaque à la thèse. » Une telle pensée décourage tant la tâche semble colossale. Comme le coureur cycliste, le jeune chercheur a intérêt à avancer par étapes. Plutôt que de rêver à la ligne d’arrivée, il gagnera à fixer ses pensées sur le prochain virage : un questionnaire à mettre au point, une recherche bibliographique à mener, une sous-partie à rédiger… Qu’importe si le paragraphe gribouillé finit à la corbeille, le simple fait de s’attacher à un point concret a un effet psychologique : il permet de chasser l’angoisse et de lancer un cercle vertueux.

2. Prendre des rendez-vous avec sa thèse

L’une des principales difficultés de la thèse vient de l’absence de date butoir. Le thésard a la sensation, d’abord rassurante puis terriblement oppressante, qu’« il a le temps ». En réalité, celui qui souhaitera terminer sa thèse en trois ou quatre ans aura intérêt à fixer rapidement des échéances intermédiaires et à les respecter. La meilleure des ruses consiste à prendre quelqu’un à témoin. L’interlocuteur le plus immédiat est le directeur de thèse, à qui il est possible de donner des rendez-vous à des dates précises pour présenter les avancées de la thèse : plan, synopsis, puis chapitres rédigés. Mais ce peut être quelqu’un d’autre : un professeur bienveillant, un chercheur plus avancé… ou un autre doctorant.

3. Créer des rituels

Chaque jour renaît la même angoisse : « Vais-je réussir à écrire ? » Pour conjurer cette peur, il faut d’abord planter le décor : choisir le lieu de l’écriture (domicile, bibliothèque, maison de campagne ?), l’orientation du bureau, le fond sonore (musique ou silence). Le sociologue Howard Becker insiste sur l’importance des rituels à mettre en place, souvent au début de la journée. Il peut s’agir d’activités de nettoyage et de rangement (passer l’aspirateur, ranger son bureau, lancer une lessive), de sport (jogging, pompes, ou encore d’une course chez un petit commerçant, toujours à la même heure)… Ces actes, qui peuvent s’apparenter à des manies, permettent de sanctuariser le travail de thèse.

4. Lâcher (un peu) la théorie

De nombreux doctorants en sciences sociales sont obsédés par la théorie. Ils veulent que leur thèse soit « scientifique », ce qui a pour effet pervers de les tétaniser. « Un des meilleurs sociologues contemporains m’a dit un jour : “Je m’intéresse au monde et pas à la théorie ”», relate la sociologue Claudine Herzlich. Les moments les plus féconds de la thèse sont souvent ceux où l’on s’écarte des références théoriques pour « inventer » les notions qui permettent d’analyser son objet et de rendre compte de sa démarche. Parler simplement de son travail à un proche – profane si possible – peut aider à trouver les bonnes formulations.

5. Dédramatiser

Se dire que des centaines de thèses franchement médiocres sont soutenues chaque année, et que la sienne vaudra mieux, de toute façon. Et se rappeler qu’une bonne thèse est une thèse… finie.

Sources :
• Claudine Herzlich, Réussir sa thèse en sciences sociales, Nathan, 2002.

• Howard Becker, Écrire les sciences sociales. Commencer et terminer son article,
sa thèse ou son livre, trad. Patricia Fogarty et Alain Guillemin, Économica, 2004.

• Guilde Des Doctorants : http://guilde.jeunes-chercheurs.org
Héloïse Lhérété

Pourquoi je continue
« Pourquoi je continue,c’est ça que vous voulez savoir ?

Pourquoi je continue alors qu’on me traite comme une merde où que j’aille ?
Eh ben parce que je n’ai plus que ça et que j’y ai pris goût. Parce que si j’arrête maintenant, alors là ce sera l’échec total. C’est tout ou rien. Ou j’obtiens mon poste
à la fac ou au CNRS, ou bien je perds tout. Mais je n’ai pas l’ombre d’un doute,
je vais y arriver. J’en suis sûr.Je fais tout pour. Là, c’est la dernière ligne droite.
À trente ans, je sais que c’est tard, hein, mais je vais casser la baraque. »

Extrait de Félicitations du jury, de Clarisse Buono, éd. Privé, coll. « Les Clandestins », 2007.

• Professeur dans un quartier nord de Marseille
Martine Fournier

Dans une chronique pleine d’humour, un enseignant raconte
son quotidien dans un lycée de quartier sensible.
Une manière rafraîchissante de mettre à distance les difficultés du métier…
« Prof, c’est pas un vrai métier. C’est une discipline sportive. Une épreuve d’endurance. » C’est presque devenu un rituel depuis plusieurs années. Chaque rentrée scolaire livre son lot d’essais ou de témoignages sur la difficulté du métier d’enseignant.
Des jeunes profs surtout, parachutés en début de carrière dans des établissements réputés « difficiles », désarçonnés par la violence, les incivilités, les insultes et le manque de motivation des élèves.

En cette rentrée, c’est un vent de philosophie et d’humour, servi par un vrai talent d’écrivain, que nous apporte la chronique d’un enseignant en lycée technique d’un quartier nord de Marseille (1).

Professeur de français, d’histoire-géographie et d’éducation civique, Dominique Resch enseigne depuis vingt ans à des Tonio, Nadir, Moktar ou Jeremy, ces él& [ lire la suite... ]
Article de 1890 mots.

• Des profs en galère
Flora Yacine

Souffrance, stress, désengagement, crise des vocations...
À quoi est due cette crise de motivation
que l’on observe chez beaucoup d’enseignants ?
« Ce qui me motive, confie Laurence, professeure en collège, c’est le contact avec les jeunes, et le sentiment, quand un cours a bien marché, de voir des petites lumières qui s’allument dans leurs yeux, de leur avoir transmis des connaissances, des valeurs, et de les sentir progresser. Ce qui me démotive, c’est d’avoir à en abandonner certains au bord de la route, parce qu’il faut faire un programme… et leur imposer souvent d’aborder des questions qu’ils ne se posent pas. Ce décalage induit une démotivation chez les élèves, une sorte de résignation à faire un “métier d’élève” qui ne les intéresse pas. »

Les enseignants sont en souffrance : c’est ce que montrent nombre d’études, de sondages, de témoignages de jeunes profs, qui décident de jeter l’éponge et de se réorienter. Scandalisés par ce que certains voient comme une déliquescence de l’école et de la sociét& [ lire la suite... ]
Article de 1837 mots.

• Évaluation : faut-il supprimer les notes ?
Flora Yacine

Élèves stressés, démotivés, décrocheurs... Les notes, quand elles son t
mauvaises, sont un facteur de démotivation pour les élèves.
Mais ne sont-elles pas que l’arbre qui cache la forêt ?
En novembre 2010, un appel de l’Afev, l’Association de la fondation étudiante pour la ville, qui organise dans plusieurs villes de France des actions de lutte contre l’échec scolaire, proposait de supprimer les notes à l’école primaire. « La culture de la note est encore très présente dans l’école française, historiquement tournée vers la sélection. Si ce modèle répondait aux exigences d’un système élitiste avant la massification scolaire, il apparaît aujour­d’hui en total décalage avec l’objectif d’élévation globale du niveau d’étude. L’obsession du classement à laquelle il répond crée, dès l’école élémentaire, une très forte pression scolaire et stigmatise des élèves qu’il enferme progressivement dans une spirale d’échec. Démotivantes, les mauvaises notes sont vécues comme une sanction et n’apportent en rien les clés d’une possible pr [ lire la suite... ]
Article de 1833 mots.

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