From one of the most impressive issues ever of L’Architecture d’Aujourd’hui (Nouvel Environnement de l’Homme, 145/1969), a revealing article about the relationships between architecture – urban planning and artificial intelligence, in a time in which the rapid technological evolution let people feel that radical changes and their social consequences were imminent (see the reference to Kubricks’s A Space Odissey).
Although this wasn’t the case, and computer aided design is yet to become an “artificial intelligence”, many passages are still valid today. The general tone of the original text in French is also quite amusing, varying from funny bits or Leopardi’s like dialogues between man and machine, pedagogic and informatives segments, and an interesting finale about the challenges and the necessary evolution not-just of technology but also of the same figure of the architect in the future society. Many names appear that will get a status of pioneers in HCI and in technology applied to architecture later in the following years: Nicholas Negroponte, Martin Minsky and also Christopher Alexander.
Too bad the English version is just a summary, but if you can read French, we also taped Courtieux’s original text (see below).
Read more:
Negroponte, Nicholas. Toward a Theory of Architecture Machines
Books about Cybernetics on Monoskop/Log
http://spaghettionastick.wordpress.com/readings/
Minsky, Martin. Why People Think Computers Can’t 1982
Alexander’s classic: “A pattern language“
THERE’S NOTHING YOU CAN DO ABOUT IT:
SHORT HISTORY OF THE ARCHITECT AND THE ROBOT,
by Gérard Courtieux.
Marvin Minsky of the M.I.T. has described several computer programmes which have what he calls “artifical intelligence”. The machine works from a programme which has been drawn up by reducing the process of decision-marking to a set of the mathematical formulae. This is also how the human brain works. We believe we have sudden ideas but they are really the result of a chain of impulses. Nicolas Negroponte, also of M.I.T., considers that there are three ways in which the computer can assist in architectural design – present-day methods could be automated, they could be modified to suit the machine, or we could build an architect-machine unit capable of evolution and self-teaching.
“Urban 5”, Negroponte’s on-line planning partner can memorize a plan and certain criteria for the user and the architect, helping him to evolve a project. The advantages of an intelligent lmachine become obvious and the link between man and this robot gives rise to dialogue between two intelligent beings. The system is thus capable of evolution. Negroponte proposes the following five princpal parts to a robot-architect – à time mechanism to solve problems with minimum delay, a routine mechanism to associate certain situations and responses, a mechanism to give habits to robots to save thinking time, a “mood” detector so that the robot can know what the user prefers, an “unlearning” mechanism to help forget out-of-date knowledge.
Once artificial intelligence has been created it must be able to communicate with man and environment – this is why thay are put face-to-face.
Minsky at the University of Utah has designed a robot eye which gives the operator the impression that he is moving inside a model. This apparatus can also “look” at an assemply and modify it if necessary for equilibrium and mechanics. It therefore does more than find a solution – when given a solution it is capable of judging it.
The architect’s medium of expression is drawing, which enables him to record his decision, and all the details of a drawing can be contained in a graphical symbol and particularly alpha-numerical signs. This raises the problem of language which must be common to the machine and the operator.
Many decision-makers and architects continue to mistrust the robot because they consider that technology is synonymous of loss of individuality and innocence. By taking refuge behind the rules of style, the artist escaped the necessity of decision-making, that is of analysing. Often the architect hides behind an artist façade protected by a phraseology and formulae for internal use designed to encourage the favours of divine intuition.
Yesterday’s designer could escape the responsibility of decision-making, to day’s cannot keep pace with all he should know. The fact is that architecture is being built outside the profession, it is time architects developed a new awareness and a fresh attitude to the latest steps taken in technology and social evolution. Good work, combining intelligence, expertise, taste and intuition is no longer sufficient. The architect must be prepared to dominate electronic calculation and then artificial intelligence to create new tools for himself and improve his understanding of the world to-day and tomorrow.
Original text in French:
VOUS N’Y POUVEZ RIEN
PETITE HISTOIRE DE L’ARCHITECTE ET DU ROBOT
GÉRARD COURTIEUX
- Gérard, il est huit heures trentre, il faut te lever (La voix sort étonnament claire d’un haut-parleur dissimulé dans le mur. Aucune réponse).
- Nous sommes aujourd’hui le 12 mai, le temps est clair et ensoleillé. Je te rappelle qu’il faut que tu sois dans une heure à ton premier rendez-vous. (Une tête ébouriffée apparaît sous les draps.)
- Georges, je t’ai demandé hier de me réveiller en musique, tu vas réussir gâcher ma bonne humeur en me réveillant si brutalement… quel est notre emploi du temps aujourd’hui?
- A neuf heures trente : rendez-vous avec le commercial de la Compagnie Européenne des Robots pour augmenter la configuration mémoire du simulateur de maquettes à l’Agence. Nous devons ensuite passer quelques instants sur le corps d’état mécanique de l’affaire B12 (j’ai constaté des erreurs en revoyant le dossier cette nuit). A quinze heures tu dois être sur le chantier de la ville heureuse de Courbevoi et à dix-neuf heures Anne t’attende rue Mouffetard. Pour ce qui est de la déclaration d’impôts je crois être arrivé à une solution satisfaisante, il faudrait en parler aujourd’hui.
- Bien. Avertis mes deux assistants à l’Institut de Recherche d’Architecture que nous avons le temps de parler de leur projet au cours du déjeneur. Réserve une table et avertis-moi vers onze heures.
Maintenant, disparais pour quelques minutes, je téléphone…Pour les personnes peu familières avec le robot-architecte dont les plans sont en train à préciser que cette conversation a été surprise à Paris, au matin du 12 mai 1984, entre deux personnages : Georges, un robot, une machine intelligente ayant appris l’architecture, un ordinateur un peu plus perfectionné que ceux d’aujourd’hui, et Gérard, un architecte, qui était encore quinze ans auparavant élève à l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts.
Pour mieux comprendre l’aventure extraordinaire de ce jeune architecte, reportons nous à l’époque actuelle pour essayer de comprendre ce qu’est l’intelligence artificielle du robot architecte, pour voir comment on le construit et savoir pourquoi.
INTELLIGENCE ARTIFICIELLE
Marvin Minsky, du Massachusetts Institut of Technology, décrit dans un article de “Scientific American” plusieurs programmes pour ordinateur qui possèdent ce qu’il appelle “une intelligence artificielle”.
Il décrit de programmes qui peuvent faire des analogies et tester des hypothèses de façon à dégager une strategie et choisir entre plusieurs alternatives. Pour cela il faut qu’un programmeur s’attache à réduire le processus de prise de décisions à un ensemble de formules mathématiques.
C’est une tache compliquée à laquelle les chercheurs ont donné une réponse satisfaisante en économie, avec de systèmes de simulation de marché, et une réponse moins satisfaisante en simulant à Washington la guerre du Vietnam. Néanmoins, le lecteur doit admettre, sur la base de la réussite de la machine à tenir tête aux meuilleurs joueurs d’échecs, que la réduction d’un processus de décisions ets une opération acquise.
La réduction des processus à un ensemble de formules mathématiques est une notion importante. Notre cerveau ne fonctionne pas si l’on y regarde de près.
Il n’analyse pas une situation sur la base d’une émotion, d’une intuition mystérieuse, d’un savoir-faire comme on pourrait le croire à première vue. Sans que l’on en ait une exacte conscience, des mécanismes réductibles à des formules mathématiques s’enclenchent dans le cerveau à la vitesse de l’électricité, le décideur croit à la magie de l’idée qui jaillit, mais elle n’est que l’aboutissement d’un ensemble d’impulsions électriques qui, de neurone en neuron, ont franchi des ponts, des lignes à retard, qui ont subi des mesures, des comparaisons, et qui viennent activer le circuit qui forme l’image-solution.
Un programmeur peut donc prendre un crayon et mettre sur le papier une série d’instructions qui créerait dans la machine une intelligence artificielle, aux capacités réduites mais dès aujourd’hui supérieures dans bien des aspects à celle du singe, qu’on en juge par les performances du programme Student :
Student résoud les problèmes algébriques, il lit les énoncés, les plus familiers, analyse les mots en fonction de sa bibliothèque de définitions et de rélations, prépare les équations et donne une solution.
Voici un exemple d’un problème résolu par Student :
“Marie est deux fois plus âgée qu’Anne l’était quand Marie était aussi âgée qu’Anne l’est maintenant. Si Marie a 24 ans, quel est l’âge d’Anne?”
Quand un programme peut répondre qu’Anne a 18 ans, que ne pourrait-il pas devenir bientôt l’architecte-robot-qui-sait-tout que nous avions mis en scène au debut de ce texte.
C’est un problème qui passionne Nicolas Negroponte, toujours du Massachusetts Institute of Technology (1). Il y a, d’après lui, trois façons pour la machine d’assister le processus de la conception architecturale :
1) les méthodes actuelles peuvent être automatisées de façon à accélér et réduire le coût des études et de la réalisation (2), c’est un changement d’échelle.
2) les méthodes utilisées dans les agences et les entreprises peuvent être modifiées de façon à coïncideer avec les exigences de la machine. Ici un changement de fonctions est opéré de façon à utiliser la machine à l’optimum de ses capacités.
3) faire de l’ensemble architecte-machine une unité capable d’évolution et d’auto-enseignement où chacun complète l’autre au mieux de ses capacités en développant des habitudes mutuelles et un corps de connaissances.
Pour éclairer ses concepts, qui se réduisent en fait à deux, car les deux premiers sont similaires à quelques détails techniques près, on peut imaginer ce qui se passe au plus profond d’un ordinateur. Prenons par exemple un programme d’allocation d’espaces ; un programme qui va me permettre d’établir, dans une petite usine, quelle est le disposition optimum des locaux réservés à l’admission, à la réception des marchandises, à la fabrication, à l’expédition et aux services sociaux. Mes critères seront par exemple de minimiser la longueur de circuit des matières premières lourdes, de minimiser les déplacement du personnem et de maximiser l’éclairement et la ventilation. Je charge mon programme dans la machine. D’un côté je rentre ces données, de l’autre sortent les résultats. Le flot d’informations essentielles sur mon projet est passé à la vitesse de l’éclair au travers de cette grande boîte clignotante. Avant : rien, après : rien.
Urban 5, le “partenaire urbaniste en-ligne” (3) de Negroponte est basé sur un tout autre concept.
Tout d’abord, si vous vous asseyez devant l’écran de télévision connecté au calculateur, Urban 5 commence par vous demander votre nom de façon à savoir ce qui, dans sa mémoire, pourrait déjà être le fruit de votre activité, pui il vous demande si vous êtes familier avec lui. Si vous répondez que non, il vous donnera tout au long de votre travail des informations utiles sur son fonctionnement de façon à vous guider.
Quand vous venez pour la première fois, Urban 5 est un grande squelette sans chair et sans âme. A l’aide du photostyle coux créez une forme géométrique sue l’écran et par le clavier de machine à écrire vous introduisez des critères : “…aucun enfant ne doit parcourir plus de 800 mètres pour se rendre à l’école primaire… Cet espace est un appartement et comme te il aura : l’intimité visuelle, l’isolation acoustique, la lumière solaire, un accès sur l’extérieur… au moins 25% des familles de deux enfant ou plus doivent avoir un appartement de plain-pied avec un jardin. Ceci est très, très important…”
Urban 5 mémorise tout cela et l’associe avec l’utilisateur du moment. La conversation suivant peut s’engager :
Vous : Redonne-moi le projet tel qu’il était il y a dix ou quinze minutes (vous ajoutez des espaces et placez des activités).
Urban 5 : Gérard, 78% des familles de deux enfants ou plus n’ont pas accès sur un jardin
(Vous ignorez.)
Urban 5 : Gérard, la sévérité de ce critère est : très, très important.
Vous : C’était mon idée ce matin, mais maintenant cela n’a plus d’importance.
Urban 5 : J’ai compris.
Le soi, en partant, vous pouvez emmagasiner votre projet dans une mémoire spéciale, il vous sera restitué le lendemain tel que vous l’aviez quitté avec toutes ses découvertes, ses conflits ouvert ou latents et avec ce que Urban 5 sait à ce point de l’urbanisme et de vos manies.
Au départ Urban 5 n’était rien, après il est tout. Imaginez au départ deux sphères ; l’une est le système, l’autre, réduite à un point c’est votre projet. A la fin la déuxième sphère a grossi, grossi tellement qu’elle a englobé la première. Voilà les premiers pas d’une machine intelligente.
LE ROBOT ARCHITECTE
Une machine que en fait existe et fonctionne.
Cela n’étonne plus les informaticiens : Ils font des programme qui donnent instruction aux machines de modifier leurs propres règles de fonctionnement, qui donnent même instruction de modifier la façon dont elle modifie leur fonctionnement.
Des programmes sont écrits pour demander à une machine de programmer une autre machine.
Les qualités d’une machine intelligente commencent à apparaître.
Negroponte donne un autre exemple de ce qu’est l’intelligence artificielle. Lorsqu’un programmeur met au point un programme, pas à pas, pour trouver la solution d’un problème, il porte tout le mérite de son travail.
Lorsqu’il met au point un programme pour trouver une méthode de résolution, le mérite est certainement partagé entre la machine et lui-même.
Mais lorsque la machine devient capable de trouver une méthode pour trouver une méthode de résolution il ne fait plus de doute qu’elle a substitué son intelligence à celle du programmeur.
Par analogie la machine à faire l’architecture est une machine qui peut apprendre sur l’architecture et peut-être même apprendre à apprendre sur l’architecture.
L’association de l’homme et de ce robot provoque un dialogue entre deux êtres intelligentes et le système devient donc capable d’évolution.
Comme chacun s’en est aperçu cette collaboration peut aussi bien produire le Seagram Building que le nouveau bâtiment des Galeries Lafayette, boulevard Haussmann.
Une définition précise de la machine à architecture ou robot-architecte s’impose donc, et Negroponte propose les cinq premiers composants suivants (4) :
1. Un mécanisme heuristique destiné à permettre de trouver une solution à un problème dans le minimum de temps. A la première rencontre d’un problème le mécanisme tenterait de le résoudre par des procédures relatives à des problèmes similaires.
2. Un mécanisme de routine destiné à associer certaines situations et certaines réponses.
3. Un mécanisme de conditionnement pour donner des habitudes au robot. Les réflexions conditionnées à des situations répétitives évitent en effet l’utilisation de la pensée.
4. Un détecteur d’humeur qui puisse savoir ce que le partenaire aime. L’utilisateur du robot doit en effet montrer ses états d’âme de façon à ce que le robot puisse évaluer, ou du moins observer, les résultats d’une action.
5. Un mécanisme d’oubli ou de désapprentissage, ce qui est toujours difficile pour un humain. Avec de nouvelles découvertes, des pans entiers de la connaissance deviennent en effet souvent caducs.
INTERFACE HOMME-ROBOT
Une intelligence artificielle étant créée, il reste à lui permettre de communiquer avec l’homme et l’environnement. C’est ce que le même auteur appelle l’interface. Parmi les modes d’interface, la vision offre une gamme étendue de possibilités, dont un petit nombre est aujourd’hui exploité. La console de visualisation graphique permet par exemple de représenter les objets par leurs contours avec des lignes our par leur émettance lumineuse avec les demitons. On peut y ajouter la couleur et aussi le relief. Un certain type d’écran projette même deux images perspectives de couleurs différents calculées à partir de la position de chaque oeil ; des lunettes colorées permettent de restituer trois dimensions.
Ivan Sutherland aurjourd’hui à l’Université de l’Utah a mis au point un appareil que l’on porte sur la tête et qui réprésente un écran miniature devant chaque oeuil. Des récepteurs à ultrasons permettent de refaire la position de la tête de l’observateur. L’ordinateur calcule alors à partir d’un espace prédéfini ce que l’observateur verrait s’il était dans cet espace, regardant dans la direction où il porte son regard actuellement.
L’image projetée change avec les mouvements de la tête et l’observateur a l’impression de se déplacer à l’interieur d’une maquette. L’oeil robot mis au point par Minsky est encore plus étonnant et se comporte en fait comme un oeil (5) doté d’intelligence. La machine regarde un groupe de blocs cubiques et essaye de comprendre ce qu’elle voit (quantité, position, positions relatives) pour en tirer des conclusions (probabilité, intention, relations de groupe). Lorsqu’elle a vu une dizaine d’assemblages elle peut mouvoir une main qui déplacera les cubes et les réorganisera en conservant l’équilibre et les propriétés de l’ensemble.
Ici apparaît la différence fondamentale entre la machine stupide et la machine intelligente. A la première donnez vos idées sur une construction, elle vous proposera des solutions. A la seconde donnez une solution, elle la jugera et vous fera bénéficier de ses conclusions.
Le moyen d’expression privilégié de l’architecte est le dessin qui permet d’exprimer une décision par la représentation d’une variation géométrique.
Toute la finesse d’un dessin peut être contenue dans un symbole graphique et en particulier dans ces symboles standardisés que sont les caractères alphanumériques.
Les caractères alphanumériques, c’est-à-dire le langage, non pas le langage machine, mais le langage en clair, tel qu’on le parle chaque jour. Car l’utilisateur d’un robot doit s’en servir comme il se sert d’un dictaphone, sans savoir comment cela marche.
La compréhensios et la reproduction de la voix n’est qu’un problème technologique que l’on résoud actuellement (6). Difficilement : vous n’imaginez pas quel drôle d’accent l’ordinateur peut avoir quand il dit “This is the voice of a machine” !
Le problème se trouve plutôt du côté de l’interprétation d’un message qui implique de la part de l’émétteur et du récepteur la connaissance d’un ensemble de règles, la grammaire, et qui implique aussi tout un passé et un apprentissage. Chacun doit posséder une image mentale, un modèle de la compréhension. Voici un exemple du genre de difficultés que l’on rencontre.
Répondez à cette question :
Une boîte contient 20 chaussettes noires et 35 chaussettes blanches. Combien de chaussettes faut-il en retirer au hasard pour être certain d’avoir une paire noire ?
Votre première réaction est d’entamer un calcul de probabilités, pourtant la réponse est immédiate : 37. Car j’ai dit “pour être certain…”. Dans la situation la plus défavorable j’aurais pu tirer 35 chaussettes blanches avant de tirer la première noire.
Autre question :
Une boîte contient 20 chaussettes noires et blanches. Quel est le plus petit nombre de chaussettes à tirer au hasard pour avoir une paire blanche ?
Cela pourrait être deux mais peut-être ces chaussettes sont-elles à rayures noires et blanches, auquel cas il n’y a pas de réponse !
La boutade est bien connue du robot traducteur de langues qui remplace “la chair est faible” par “le beefsteak est tendre” !
Ce sont quelques-uns des problèmes de l’interface. Mais comme tous les autres ils seront résolus. Alors…
LE MYTHE DE FRANKENSTEIN
Nous avons toujours été hantés par l’idés qu’un jour une créature fait de main d’homme se montrerait plus forte et plus intelligente que son créateur ; et nous avons toujours pensé qu’ayant des sentiments humains elle voudrait se venger d’être une chose, une minorité, un paria, en détruisant sont créateur arrogant et m’humanité.
Hall, le calculateur de “Odyssée 200” (sic, ndr), le film de Stanley Kubrick, est le type même de ce genre de monstre. Alors qu’il a tout pour être heureux, une conversation tenue derrière son dos le vexe au point de susciter chez lui un désir de vengeance. L’auteur a projeté dans cette machine les réactions humaines d’humeur qui semblent pourtaint échapper aux règles de l’analyse. Mais ces raffinements ne sont-ils pas la rançon de l’intelligence ? A quand le robot amoureux ?
Si cette possibilité n’inquiète que peu de personnes, beaucoup par contre et parmi elles des “décideurs”, rejettent l’ordinateur sur la base d’arguments émotionnels.
Des architectes, même sur le continent américain, pensent que technologie est synonyme de perte d’individualité et d’innocence.
Il y a encore une bonne part de superstition chez les créateurs dans les effets supposés mortels de l’analyse logique sur leurs intuitions. Christopher Alexander a contribué à mettre ces fantômes en déroute (7).
Il n’est pas difficile de voir pourquoi l’introduction des mathématiques dans la création architecturale rend beaucoup d’architectes nerveux : les mathématiques manipulent des grandeurs or les grandeurs ont peu d’utilité dans l’invention des formes. Ce qu’ils ne réalisent pas cependant, c’est que les mathématiques modernes sont concernées au moins autant par les relations d’ordre et de proximité que pas les relations de magnitudes.
Si ces dernières sont un pauvre instrument pour scruter la forme inventée, les premières sont indispensables si l’on veut explorer et enrichir les structures mentales qui permettent l’invention.
L’utilisation de structures logiques présente un avantage sérieux pour suivre le processus de la création architecturale. Une construction logique est plus facile à critiquer qu’une construction sortie des brumes de la pensée. L’innocence est détruite.
Alexander pense qu’une première perte de l’innocence, de nature mécanique est survenue lorsque l’industrie a remplacé l’artisan pour la fabrication des objets qui nous entourent (8). La perte de l’innocence intellectuelle est imminente avec l’introduction des processus logiques est systématiques nécéssités par la mise au point des robots dans chaque phase de l’activité humaine.
Il n’est pas étonnant que la réaction de ceux qui veulent protéger le caractères mystique de l’intuition soit de la transformer en fétiche.
Devanant tabou l’intuition donne source à de concepts figés, des modes, des styles (l’intuition est en fait la capacité d’organiser des éléments en une forme significative).
En se réfugiant derrière les règles d’un style, l’artiste échappe à la nécessité de prendre des décisions, c’est-à-dire d’analyser. Pour préserver son individualité et son innocence de l’effet des méthodes systématiques d’analyse, l’architecte se réfugie souvent, de plus en plus, derrière une façade d’”artiste”, protégée par une phraséologie et des formules à usage interne destinées à susciter les faveurs de la divine intuition. Fonctionnant sur ses propres ressources, effrayé par l’immensité de la science il se réfugie dans une infividualité artistique frénétique. Au fur et à mesure que son incapacité à résoudre les problèmes du siècle s’accentue, sa frénésie ne fait que devenir plus sauvage.
VOUS NE POUVEZ RIEN
Le créateur d’autrefois se trouvait en quelque sorte debout sur les épaules de ses prédécesseurs, nourrit des connaissances transmises par la tradition il pouvait dans une certaine mesure se soustraire à la responsabilité de prendre des décisions. Le créateur d’aujourd’hui est en face de problèmes qui atteignent un niveau de complexité hors de portée de son intuition et où les quantités d’information sont telles qu’il est impossible même à l’intelligence du plus doué de les traiter.
Le processus de la création se déroule comme ceci :
Au début le créateur ne sait pas très bien ce qu’il veut faire, il n’a qu’une vague idée de la façon dont il va aborder sa tâche. En ce sens, le processus de création et un processus d’apprentissage dans lequel le créateur doit apprendre quel est son problème et comment le traiter. Il fait des découvertes mais elles sont entrecoupées de longues périodes non créatives de piétinement, de dégagement d’idées enfouies, d’assemblage de pièces éparses. La machine permet déjà de reduire la tâche du créateur et son aspect typiquement humain : saisir des schémas, des rêves et les solidifier en quelque chose qui puisse être exploré qualitativement et évalué quantitativement. Mais elle peut plus comme nous l’avons vu précédemment.
Nul ne met en doute que nos capacités inventives soient limitées, il faut un moyen de réduire le fossé entre les faibles capacités du créateur et la grandeur de sa tâche.
Quelle attitude les architectes vont-ils adopter devant l’accroissement du nombre de constructions auxquelles ils n’ont pas pris part (95%) ? Dans les deux prochaines décaded le nombre de ces constructions élévées à la surface du globe va doubler !
En fait l’architecture se fait en dehors de la profession. Notre société occidentale est motivée par la notion de profit. General Motors et la Banque des Pays-Bas ne sont pas loin de faire l’architecture, sans architectes, puisque cela semble être leur intérêt.
Une nouvelle conscience et une nouvelle attitude doivent êter développées par l’architecte envers les derniers raffinements de la technologies et envers l’évolution sociale.
Explosion technologique et explosion démographique impliquent un changement dans l’échelle de sa tâch et aussi un changement dans sa fonction sociale. Le rôle et la fonction de l’architecte sont devenus infinement complexes et importants : la création d’une nouvelle et meilleure façon de vivre, d’apprendre, de communiquer.
La conception d’un “bon travail” réalisé uniquement par la combinason de l’intelligence, du savoir faire, du bon goût ou de l’intuition d’un homme n’est plus adéquate.
Il y a trop de variations “réussies” du même type d’objet. Ce qu’il nous faut en fait ce sont des écoles, des hôpitaux, des villes qui ne soient pas anarchiques et des usines qui ne soient pas malsaines.
Les cheminements traditionnels du processus de création et du processus de réalisation architecturale ne sont certainement plus adaptés, il suffit de regarder autour de soi. La conception de “l’architecte” comme un don personnel acquis par une succession d’erreurs sous la direction d’un maître n’est plus de mise dans le système de formation.
L’architecte doit s’engager dans la domination du calcul électronique et par suite de l’intelligence artificielle pour se forger de nouveaux outils et améliorer sa compréhension du monde d’aujourd’hui et de demain.
Dans “Architectural Record” Marshall Mc Luhan prophétise ce que sera l’architecte de demain “The artist leaves the ivory tower for the central tower, and abandons the shaping of art in order to program the environment itself as a work of art”
Gérard COURTIEUX.
notes :
(1) “The Architecture Machine”, Nicholas Negroponte, MIT Press, Cambridge, E.U., à paraître à la fin de l’année.
(2) Voir G.Courtieux, “Récents développements dans les applications des ordinateurs à la construction civile, à l’architecture et à l’urbanisme” dans “l’Ingénieur Constructeur”, juin 1968, pour une liste de ces diverses automatisations.
(3) On-line Urban Design Partner. En ligne : en communication constante avec l’ordinateur de façon à avoir ses réponses sur-le-champ.
(4) “Journal of the American Institue of Architects”, March 1969. Voir aussi (1).
(5) Marvin Minsky and Seymour Papert The Perception Mit Press 1969
(6) Bell Telephone Laboratories, Murray Hills, N.Y.
(7) “Notes on the Synthesis of form” Christopher Alexander, Harvard Press, Cambridge, E.U.*
(8) Par un détour étonnant on va s’apercevoir que l’ordinateur peut réduire les effets de l’uniformité de la production de masse introduits par la révolution industrielle.