2016-07-15

L'Atlantique en son hémisphère nord s'est vêtu d'une parure très australe pour accueillir les marins de la Transat Québec Saint-Malo. Grand soleil, longue houle régulière, souffle puissant… même la légendaire brume des bancs de Terre-Neuve n'y a pas résisté, chassée par ce glacial vent de sud-ouest qui propulse l'essentiel de la flotte vers les rivages irlandais.

Alors que le trimaran géant Spindrift 2 rattrape déjà le dernier Class40 Obportus 3, tous les voiliers engagés évoluent au maximum de leurs potentiels. Dans chaque classe, les vitesses s'envolent, les moyennes enflent et les milles défilent à toute allure sur les compteurs noyés d'embruns. Car la performance se paie au prix élevé d'une omniprésente humidité, d'un inconfort absolu qu'accroit ce froid mordant évocateur des navigations dans le grand Sud. Solide leader, Lalou Roucayrol et son Multi50 Arkema atteindront en soirée la mi-parcours, au terme de 5 jours d'une navigation majoritairement fluviale et côtière. Alors qu'il négocie le contournement d'une dorsale anticyclonique, l'aquitain regarde déjà en compagnie de ses équipiers Karine Fauconnier, César Dohy et Etienne Carra vers l'Irlande et l'approche finale.

Irrésistible Tales 2

Ses partenaires de jeu depuis le départ de Québec, Thibaut Vauchel-Camus (Solidaires En Peloton - ARSEP), Phil Sharp (Imerys), Isabelle Joschke (Generali Horizon Mixité) et Armel Tripon (Black Pepper Les P'tits Doudous by Moulin Roty) le répètent à l'envie ; Tales 2 va vite, très vite ! À l'aise dans les petits airs du Saint-Laurent, les Espagnols de Gonzalo Botin naviguent sans retenue depuis que l'Atlantique leur offre un régime de vent soutenu, entre 18 et 25 nœuds, bien orienté sur l'arrière tribord du bateau, idéal pour tirer le meilleur parti de leur Class40, déjà vainqueur en 2014 de la Route du Rhum Route du Rhum #RouteDuRhum (avec Alex Pella à la barre ndlr). Lancés sur l'autoroute de l'Atlantique Nord, et après avoir franchi en 5e position la marque de Saint-Pierre-et-Miquelon, Gonzalo et ses caballeros affolent les chronos, tutoient le record Record #sailingrecord de distance parcourue en 24 heures suer ces bateaux de 12,18m, avec 336 milles avalés à 14 nœuds de moyenne. Thibaut Vauchel-Camus, sous son vent et plus proche de l'orthodromie, résiste vaillamment et l'émulation entre deux des favoris de l'épreuve commence à creuser les écarts. Generali Horizon Mixité, Imerys et Black Pepper Les P'tits Doudous by Moulin Roty lâchent insidieusement quelques milles sans démériter le moins du monde. Preuve si besoin était de leur engagement, leur irrésistible retour sur le 4e Multi50 de la flotte, Olmix de Pierre Antoine.

Spindrift 2 à pas de géant

Tandis que les Multi50 contournent à grands coups d'empannages une zone peu ventée au milieu de l'Atlantique, Spindrift 2 a coupé court au duel envisagé avec le MOD 70 Mudandam Oman sail. Sidney Gavignet et ses hommes du trimaran omanais se sont fait piéger au large de la Gaspésie par de tenaces orages. Yann Guichard et ses douze hommes, plus une femme d'équipage n'en demandaient pas tant pour enrouler en premier la marque de Percé, et foncer à toute allure vers les îles de la Madeleine. À plus de 34 nœuds, le géant poursuit son effort à moins de 160 milles de l'archipel de Saint-Pierre-et- Miquelon, tandis que Mudandam Oman Sail est toujours aux prises avec les caprices de la baie de Gaspé.

Cartographie

Tweets de @TransatQSM

Voir en ligne : Info presse www.transatquebecstmalo.com

{{{Ils ont dit }}} Dona Bertarelli - Spindrift 2
« Alors que la nuit va tomber dans quelques heures, nous sommes au près dans une quinzaine de nœuds, au niveau du Cap-de-la-Madeleine sur la péninsule de la Gaspésie. La température de l'eau est passée de 16 à 12 degrés en quelques heures. Le froid se fait ressentir. Pas encore mordant, mais cela rappelle tout de même de bons souvenirs. Bonnets et cirés sont de sortie et l'on se prépare à une nuit fraiche. Mais alors que je vous écris, un grain impressionnant de plusieurs miles de large, sombre et parsemé d'éclairs, s'approche à grande vitesse par notre arrière. Nous passons en un instant de 15 nœuds de vent au 150 à 41 nœuds de vent au 310 ! Branle-bas de combat à bord. Yann prend la barre, nous autres aux écoutes et aux winchs. Il faut lofer rapidement, prendre un ris, régler la trinquette et attendre que ça passe tout en restant très vigilant. La pluie s'invite – glaciale et sans répits. Double punition pour les barreurs. Comme souvent après les grains, plus de vent. On se traine à 1,5 nœud de vitesse. Cela ne durera pas. Du vent fort est attendu pour ces prochaines heures avec beaucoup d'instabilité. La nuit va être studieuse et compliquée. »
Karine Fauconnier - Arkema
« On a appris les événements de Nice. On est sous le choc de la folie des hommes…On a une pensée pour notre beau pays endeuillé…
On va vite actuellement. Ça glisse bien depuis Saint-Pierre. On a manœuvré pour rester dans la pression, et pour se positionner par rapport à la dorsale anticyclonique. On essaie de demeurer dans le couloir de vent entre l'anticyclone et le régime dépressionnaire. Nous n'avons pas vu d'iceberg, mais le froid est bien présent. On contient bien nos adversaires. Le soleil est là. Nous sommes surpris de ne pas avoir eu de brume sur les grands bancs, mais le vent de sud était si froid qu'il n'y a pas eu contraste thermique. La mer s'aplatit, et la houle résiduelle de nord s'organise avec le vent du sud-est. Nous portons toute la toile, et comme nous n'avons pas emmené de pilotes, nous alternons les quarts de deux heures à la barre. Je suis hors quart, et j'ai passé énormément de temps à la table à carte dans le Saint-Laurent. À présent, je barre aussi un peu. Le bateau va bien, il est moins confortable que les 60 pieds que j'ai connus. On a sorti les bonnets et les gants. On rigole bien à bord. »
Nicolas Boidevezi - Esprit Scout
« Nous sommes en approche rapide de Saint-Pierre. Nous tenons un très bon rythme depuis le passage à Percé. Le vent souffle du sud entre 18 et 25 nœuds. Cela permet d'aller vite, d'autant que la mer est très maniable. Ça glisse et ça mouille. On essaie de s'accrocher aux bateaux qui évoluent juste devant nous, Groupe Sétin, Matouba, Talanta… La navigation dans le Saint-Laurent était sympa. On ne s'y est pas trop fait décrocher. On a juste tiré un mauvais bord en arrivant sous Terre-Neuve. On observe l'évolution météo en Atlantique. Il y aura un long bord de portant à effectuer, avant la traversée d'une belle dorsale. On va découvrir le Nord, le froid, les icebergs… ce sera une nouveauté pour nous…. »
Antoine Calliste - Région Normandie
« On a connu depuis le départ des alternances de phases rapides et de périodes lentes. Nous sommes contents de notre classement, juste derrière le groupe de tête. On s'accroche pour rester au contact. Le passage à Saint-Pierre a été compliqué. On y a même laissé le petit spi dans un grain particulièrement violent. On essaie de s'organiser en quart. La vie à bord se complique avec le froid et surtout l'humidité. Les températures de l'air et de l'eau ont chuté. »
Philippe Burger - Obportus 3
« Après la pétole, la brise ; on a entre 20 et 25 nœuds de vent ! Le bateau marche bien, mais mouille beaucoup. On a connu de petits soucis de grande voile. Le moral est bon, bien que nous soyons bien fatigués. La course est encore longue et on va grappiller des milles. On vit un peu au jour le jour, sans se projeter dans l'avenir. La période de pétole a été très usante. On est à présent à fond dans notre course. On aurait pu être mieux placés sans notre souci. On vit bien à bord. On se ménage des moments conviviaux pour partager de bons repas… »
Gonzalo Botin, Tales 2
« On est en plein dans la bagarre, ça pousse vraiment fort ; belle régate avec les copains autour, on pousse tous à fond, on a des belles conditions, 20 à 30 nœuds, reaching à 16 nœuds. L'eau est très froide sur le pont. Tout va bien, on est tous bien à bord, on a hâte pour la suite. »
Catherine Pourre - Eärendil
« Tout va bien en ce 5e jour après départ. Pour tout vous dire, cela a été une belle bagarre jusque là, une bagarre à tous les étages. Nous avons eu une longue phase à nous bagarrer bord à bord avec Carac dans le 2e peloton, trop loin des leaders à notre goût. Le passage de Grand Grave a été fantastique au sens 1er du terme : nuit noire, le souffle puissant d'une ou de plusieurs baleines toutes proches dans un air plus que léger. Il n'y manquait que les elfes, encore que... Puis après le passage à Gaspé, ce long bord de reaching à tenter de regrapiller quelques milles sur les leaders. Ce passage de Saint-Pierre restera pour nous un moment remarquable : On arrive à toute allure dans le brouillard en se disant qu'on n'y verra rien du passage Henri et rien de l'ile de Saint -Pierre et puis tout se découvre d'un coup : superbes et rudes paysages à toucher de la main. Sous spi, cela carbure entre les iles, des claques à 28 nœuds suffisamment anticipés pour faire 20 nœuds de vitesse sur mer plate, jamais atteint jusque là dans ces conditions. À nous le grand large. Il y a à cette heure 30 milles entre nous et la tête de la course, mais nous nous rapprochons de Black Pepper. Il y a encore beaucoup d'eau à courir… »

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