2014-02-11

Une Guerre Sainte avait eu lieu en Sibérie. Je ne l’avais pas ressentie.
Mei et ses amis approchaient de Jamir. Je ne m’en doutais pas.
Ksénia était repartie auprès de l’Olympe. Je n’en avais même pas idée.
Les camps d’Arès et d’Hadès se renforçaient. Je ne m’en préoccupais pas.
Le Sanctuaire avait envoyé au Japon les Saints d’argent. Je ne l’aurai jamais soupçonné.

Non, moi j’errais. J’errais de pays en pays, mourant de faim et de soif, agonisant de mes plaies qui ne cicatrisaient pas, brûlées par les lanières en cuir de ma Pandora Box rentrées au plus profond de ma chair. Je m’imaginais rejoindre mon fils et ma femme.
La douleur devenait de plus en plus supportable.
Mon corps s’affaissait peu à peu et j’allais mordre la poussière à quelques mètres de la frontière qui sépare la Turquie à la Grèce…

Chapitre 52 - Renaissance

Quelque part à la frontière qui sépare la Turquie à la Grèce :

13 octobre 1986.
Apodis a le visage écrasé dans la poussière. Son bras gauche, toujours gelé par le Diamond Dust encaissé sur Yíaros, ne l’aide pas à s’extirper de cette honteuse condition.
Toujours en route pour l’île Kanon après sa rencontre avec le vieux maître Dohko, il y a près d’un mois, le Saint de bronze de l’Oiseau de Paradis rampe tel le vermisseau qu’il est devenu.
Sa gorge lui brûle, elle est sèche. Ses lèvres sont craquelées et son estomac crie famine. Ses plaies sont toujours à vif.

« Je sens de moins en moins la douleur. Je quitte peu à peu ce monde. Je vais retrouver ma femme et mon fils… », s’imagine-t-il.
Il retire les lanières de sa Pandora Box qui l’écrase contre le sol et se tourne sur le dos pour observer le soleil brûlant.
Ce soleil lui rappelle celui qu’il observait aux côtés de Juventas et de la fille de celle-ci sur Yíaros : « Juventas… Je lui ai promis que je reviendrai auprès d’elle. »
Ses flous souvenirs sont interrompus par le passage continu de vautours au-dessus de lui.

Cette situation et ses souvenirs lui redonnent la force de reprendre sa route. Il s’écrie dans la douleur : « Je n’ai pas le droit d’abandonner ! »

Soudain, une voix familière lui répond : « C’est bien ce que j’espère. »
Apodis, les yeux à peine ouverts, réclame : «  Qui est là ? »
Il distingue difficilement, de ses yeux mi-clos, les chaussettes blanches par-dessus les collants rouges d’une jeune femme venue à son secours.
Couverte de sa Cloth bleue et cachée sous son masque, la Saint d’argent de l’Aigle à l’opulente chevelure rousse soulève par-dessus son épaule le bras droit d’Apodis :
Apodis - " Ma… Marine c’est toi ? "
Marine - " Tais-toi. Garde des forces pour tenir le coup jusqu’à l’île Kanon, je t’y emmène. "

Sud/est de l’Asie centrale, l’Himalaya :

A la frontière de la Chine et de l’Inde se trouve une région montagneuse où culmine à près de six milles mètres d’altitude la terre du diable.
Là-bas, l’oxygène se raréfie et les tibétains eux-mêmes ne s’y aventurent jamais, le nom de ce territoire est « Jamir ».

Au bas des montagnes himalayennes, la foule venue à dos de mules, de bovins ou de vieux véhicules motorisés, se dispersent sur un marché immense.
Paysans, touristes, moines, occidentaux et orientaux se laissent séduire par les spécialités locales. L’agriculture de l’orge, du blé, du seigle et des pommes de terre est très prisée par les paysans. Tout comme le coton, le chanvre et le soja. Les éleveurs, prennent plaisir à y trouver de nombreux animaux pour leurs élevages personnels, comme les yacks, les moutons et les chameaux.
Quelques alcools locaux ainsi que l’artisanat, comblent les touristes du monde entier.

Une halte dans cette dernière zone habitée a permis à Mei et ses compagnons de reprendre des forces. Yulij est la première à féliciter Médée, la régionale de l’étape : « Cela faisait longtemps que nous n’avions pas eu droit à un vrai repas. »
Le meneur du groupe, Nicol, précise : « Sept jours exactement. Cela fait sept jours que nous traversons le monde pour venir jusque chez Médée. »
Mei - " Heureusement que nous avons quand même utilisé une infime partie de notre cosmo énergie pour nous déplacer. Sans quoi nous serions encore loin d’être arrivés. "
L’épouse de Mû justifie : « Faire appel à plus de cosmos aurait permis au Sanctuaire de localiser nos positions. Une fois arrivée à Jamir, nous aurons tout le luxe de dévoiler nos potentiels. Le magnétisme des montagnes empêche la télépathie pour ceux qui ne la maîtrisent pas parfaitement. »
Nicol - " De plus, il me semble que nous serons en sécurité, là-bas, auprès de ton mari n’est-ce pas ? "
Médée - " En effet, mon mari est très respecté malgré ses divergences d’opinion avec le domaine sacré. Mais ce n’est pas tout. Pour parvenir jusqu’à lui, il faut passer le cimetière des armures. Voilà pourquoi j’ai préféré que nous nous arrêtions prendre quelques forces. "
Le Saint du Sextant s’inquiète :
Yulij - "  Le cimetière des armures, qu’est-ce donc ? "
Médée - " Jamir est défendue par une tour. Elle sert de lieu de travail et de vie à mon mari. Derrière, plus loin, réside les muviens, les descendants du peuple du Mû et habitants de Jamir. Le cimetière des armures sert de rempart à Jamir. C’est un lieu où les gens se perdent et errent sans fin. Les intrus finissent par se retrouver en ce lieu où des squelettes de guerriers encore vêtus d'anciennes Cloths en débris les attendent. Il s’agit des fantômes de ceux qui ont voulu s’aventurer de trop près. "
Mei, plutôt fier, affiche un certain mépris : « Des faibles donc ! »
Médée - " Détrompes-toi. Dans le lot, beaucoup de Saints d’argent désireux de faire réparer leurs armures y ont perdu la vie. Et rejoins les rangs, par la force des choses. "
Yulij - " Oui, mais toi qui vient de Jamir, ils te laisseront passer n’est-ce pas ? "
Nicol répond pour Médée : « Traverser le cimetière des armures est une épreuve. Un test. Il faut être digne de pouvoir atteindre Jamir. Notre maître Arlès, originaire de cette contrée, me disait souvent qu’il devait chaque fois prouver sa valeur lorsqu’il revenait sur sa terre natale. »
Mei taquine Yulij qui semble inquiète. Il dépose sa main sur son épaule : « Ne t’en fais pas va, je te protégerai. »
Nicol étale tout son savoir : « Ce n’est pas si simple. Pour traverser le cimetière, il faut attaquer sans se retourner. Mon maître disait qu’il fallait avancer. Sans cesse avancer. Quoi qu’il arrive. »
Mei continue de badiner auprès de Yulij : « Mince, tu n’auras pas intérêt à te trouver derrière moi. Sans quoi je ne pourrai pas venir te chercher. »
Yulij, vexée, dégage la main que Mei a déposé sur son épaule : « Ça ira je te remercie. »

Dans la Méditerranée, non loin de la Grèce, sur l’île Kanon :

Visible depuis le Sanctuaire, cette petite île de la Méditerranée est réputée pour les vertus de son volcan en éveil constant. Ses vapeurs ont des propriétés curatives, capables de soulager et développer les pouvoirs des Saints meurtris.

« Un homme normal n’y survivrait pas », pense Marine en traversant le seul village de l’île Kanon.
Vêtue de sa Cloth, portant d’un bras Apodis et de l’autre la Pandora Box de l’Oiseau de Paradis, la Saint d’argent de l’Aigle n’attire même pas la curiosité des habitants.

Le peuple a été habitué au fil des siècles à voir débarquer ici des chevaliers.
Ce domaine annexé par le Sanctuaire reçoit régulièrement des navires du Port du Destin venu les ravitailler.
La monnaie est le sacre, celle du domaine sacré.
Les villageois vivent du commerce des pierres de lave, auxquelles on assimile des bienfaits réparateurs pour de simples humains. Ainsi, le commerce de ces pierres auprès des marchands du Sanctuaire permet aux habitants de l’île Kanon d’acheter boisson et nourriture puisqu’ils ne peuvent rien cultiver sur le peu de terre aride dont ils disposent.

Apodis revient peu à peu à lui : « Marine… Sommes-nous déjà arrivés ? »
Marine - " Oui, j’ai pu me déplacer rapidement grâce à ma cosmo énergie. Accroche-toi, nous sommes tout proche. "

Alors qu’ils entament l’ascension du cône montagneux, la silhouette d’un vieillard rabougri aux cheveux grisonnants se positionnent sur le perron d’une vétuste maison comme toutes celles de cet antique village.
L’observateur, d’un signe de la main, appelle deux soldats qui sortent du logis. Ils emboîtent le pas à l’infirme qui s’aide d’une canne pour marcher.
Un des deux hommes demande au vieux borgne : « Seigneur Gigas, pourquoi suivez-vous ces Saints ? »
Gigas - " Parce que l’un d’eux est activement recherché par le Pope et que l’autre ne peut être qu’une traîtresse puisqu’elle l’accompagne. Je tiens mon billet pour rentrer en grâce aux yeux de notre maître. La défaite de Ennetsu Saint et ma fuite seront bientôt du passé. "

Plus haut, Marine descend au cœur du volcan, au plus près de la lave. Sans crier garde, elle balance l’urne d’Apodis dedans.
Apodis - " Marine ! Tu es folle ! Comment pourrais-je la récupérer ? "
Marine - " La fumée du volcan ne fera pas de miracle. Vu ton état et celui de ton armure, seule la lave pourra vous guérir rapidement. "
Apodis - " Mais c’est de la folie, jamais je ne pourrai me jeter là-dedans sans mourir. "
Marine - " Alors c'est qu’Orphée ne t’a rien appris ! Si tu visualises la cosmo énergie qui est en toi, alors tu sauras l’appréhender, la contrôler. Si tu y parviens, alors tu modèleras ton cosmos selon ton bon désir. Il t’enveloppera, te protégera. Et alors tu ne feras qu’un avec le magma et n’importe quel élément qui t’entoure. "

Marine abandonne Apodis au bord du magma. Il tombe devant comme un poids mort.
Marine - " Je t’attendrai au village tout en bas. Sache que j’en sais beaucoup sur les catastrophes de la Journée Sainte qui ont coûtées la vie à ta mère et on fils. Si tu veux en savoir plus, rejoins moi là-bas. "
Elle remonte aussitôt les parois, laissant le Saint affaibli au bord des larmes. Apodis, sûr de mourir ici, n’entrevoit que le désespoir…

Himalaya, à l’approche de Jamir :

L’équipe de Mei a repris sa progression. Au milieu des montagnes, face à un épais rideau de brume, à la file indienne, Pandora Box sur le dos, la bande s’enfonce dans le brouillard.

En bout de file, Yulij, positionnée juste après Mei, constate : « Le brouillard est devenu si épais que je ne peux voir où je mets les pieds. »
Nicol, derrière Médée qui dirige la bande, reconnaît : « Oui. De plus l’oxygène se raréfie. »
Mei - " Moi, depuis quelques mètres, j’ai le sentiment que le sol craque sous mes pas. "
Yulij frissonne : « Oui, de plus, j’ai l’étrange sensation que nous sommes observés par la mort… »

Médée stoppe sa marche et s’accroupit. Elle balaie de sa main le brouillard qui l’empêche de distinguer sur quoi ils piétinent. Elle identifie ce qu’elle croit être un ossement : « C’est parce que nous sommes arrivés au beau milieu du cimetière. »

Des voix sorties de l’inconnu donnent raison à la muvienne : « Où allez-vous imprudents ? »
Un second esprit les met en garde : « Vous êtes à la frontière de Jamir, le territoire des héritiers du continent de Mû. »
Un troisième complète : « Partez si vous tenez à la vie. »

La régionale de l’étape prend la parole : « Je suis Médée de Jamir. Saint de bronze du Burin du Graveur et je viens rentrer chez moi pour… »
Un coup jaillit de la brume pour cogner en plein estomac la jeune femme.
Elle s’écroule sur le sol pendant que des centaines de squelettes se forment.
Yulij - " Incroyable ! De sous nos pieds s’élèvent dans les cieux tous les ossements et les débris d’armures pour former des chevaliers-squelette. "
Mei ironise : « On se croirait dans un mauvais roman féerique ! »
Nicol relève Médée et rappelle au sérieux son équipe : « Ce n’est pas le moment d’être cynique. Nous devons reformer notre ligne et foncer jusqu’à Jamir. »
Un premier fantôme réagit : « C’est très bien pensé. Mais pourrez-vous avancer tous ensemble sans vous accabler des faiblesses de l’un de vous ? »
Médée, en tête de file, charge les rangs ennemis : « Il n’y a qu’une seule façon de le savoir ! »
Elle assaille le premier adversaire genou en avant, de quoi décrocher sa tête du reste de sa carcasse. Elle esquive ensuite les coups des deux squelettes suivants, laissant le soin à Nicol de les mettre hors d’état de nuire.
Derrière eux, Mei veille à garder le chemin ouvert pendant que Yulij repousse ceux qui auraient profité du léger laps de temps entre leur passage pour se reconstituer.

Bientôt proches de la sortie, Médée et Nicol finissent de coucher les derniers piliers, pendant que Mei se retourne avec désinvolture en direction de Yulij toujours sur le qui-vive : « Je t’avais bien dit qu’il n’y avait rien à craindre. »
A cet instant, un chevalier-squelette profite de ce manque de sérieux pour le cogner à la tempe. Sonné, le japonais s’écroule sur le côté.
Yulij défait l’adversaire de son ami et le rattrape par le bras alors que sa chute n’en finissait pas.
Le Saint de la Chevelure de Bérénice revient à lui, suspendu au-dessus du vide. La brume se dissipe, ne laissant apparaître qu’un étroit pont de pierre en dessous duquel gisent les chevaliers-squelette et les corps des malheureux qui, comme lui, ont manqué de discernement.

De l’autre côté du pont, les mains sur les hanches, l’attendent Médée et Nicol. Ce dernier esquisse un rictus désolé en réponse à l’impertinence de l’apprenti de Deathmask.
Blessé au plus profond de lui, Mei découvre enfin ce qui le tient encore dans ce monde.
Yulij le retient par le bras : « Tu ne voudrais pas t’aider un peu pour te remonter. C’est qu’avec ta Pandora Box sur le dos tu n’es pas très léger tu sais. »
Avec son autre bras Mei prend appui sur le pont pour s’extirper de cette situation où il se sent pitoyable. Sa camarade plaisante à son tour : « Heureusement que j’étais derrière pour veiller sur toi. »
Mei marmonne dans sa barbe jusqu’à ce que Nicol rappelle les cadets du groupe : « Allons, du calme. Nous sommes bientôt arrivés. »

Dans la Méditerranée, non loin de la Grèce, sur l’île Kanon :

Abandonné à côté d’une cascade de lave, Apodis hésite.
Il ne se sent pas le courage de plonger récupérer son armure. Il n’a même pas la force de se relever. Rien que la température extérieure l’étouffe. Cela ne l’aide pas à surmonter ses doutes. Il n’ose pas imaginer la chaleur de la lave. Son corps suinte et sa peau le brûle déjà.

Plus bas, sur le versant du volcan, Marine réfléchit : « Apodis, tu as bénéficié de l’entraînement du meilleur des Saints d’argent. Bien que tu sois Saint de bronze, tu es prêt à endurer dès à présent cette épreuve. Orphée t’a préparé au septième sens, il n’appartient plus qu’à toi de t’y éveiller définitivement. Si j’avais eu le temps d’apprendre à Seiya à atteindre ce même niveau, j’aurai agi de la même façon en l’abandonnant ici. Le sort de la terre en dépend. »

Un raclement de gorge perturbe la japonaise dans ses pensées.
Elle identifie très rapidement la personne qui en est l’origine : « Gigas ! »
Le général déchu est accompagné par un soldat, tandis que le second arrive dans le dos de Marine : « Je vais pouvoir vous ramener au Grand Pope. Je récupérerai ainsi ma place auprès de lui. Quelle aubaine n’est-ce pas ? »
Marine - " Comment tu le dis, c’est une véritable aubaine. Je comptais faire le point auprès d’Apodis sur les récents événements du Sanctuaire. Tu pourras m’y aider lorsqu’il sera rétabli. "

Ne l’entendant pas de cette oreille, Gigas envoie ses deux hommes sur la jeune femme.
Celui dans le dos de Marine se jette poing en avant. Sans même le regarder, elle l’esquive facilement en tournant sur elle-même. Elle renvoie le second à côté de l’autre en le frappant d’un coup de pied au menton.
Ses assaillants lui faisant face tous les deux désormais, Marine les achève grâce aux Météores : « Ryu Sei Ken ! »
Les malheureux meurent sur le coup devant Gigas.

Le vieillard se met rapidement à genoux : « Je t’en prie Marine, ne me fait pas de mal. Je suis certain qu’avec ta force nous pouvons faire de grandes choses toi et moi. Pourquoi n’irions nous pas chercher Apodis pour le livrer au Pope ? Il nous pardonnera certainement tous les deux et ainsi nous remontrons dans son estime et… »
Marine soulève Gigas en l’attrapant par le col : « Nous demanderons à Apodis ce qu’il en pense quand il reviendra du volcan. En attendant nous allons discuter. J’ai plusieurs questions à te poser… »

A Jamir :

A l’intérieur de l’immense tour sans porte, assis en arc de cercle sur un tapis autour d’une cheminée où le feu chauffe une théière suspendue, Nicol, Yulij et Mei observent l’architecture de ce lieu antique.

Mei se lève prendre l’eau brûlante. Il la verse dans trois tasses posées sur un plateau en bois peint aux motifs d’animaux de la région et au fond desquelles se trouvent des feuilles séchées.
L’élève de Deathmask s’impatiente : « Ils commencent à être longs. »
Nicol lui rappelle les bonnes manières : « Un Saint d’or nous fait l’insigne honneur de nous recevoir dans sa demeure et de nous offrir le thé. Profitons-en pour nous remettre de nos émotions, pendant que Médée finit de lui exposer la situation. »
Face aux nerfs d’acier du Saint d’argent, Mei opte difficilement pour la diplomatie. Il retourne poser son postérieur sur l’épaisse étoffe où sont brodés des éléphants.

A l’étage inférieur, vêtu d’une longue toge blanche ajustée autour de son cou qui descend jusqu’à son bas ventre et dans le creux de son dos, Mû passe subtilement sa main sur le visage, défait de son masque, de sa femme. Il dégage quelques mèches vertes de son front où sont présents deux points de même couleur que les siens, symbole de ses origines muviennes. Il l’embrasse pour la énième fois avec délicatesse. Ses doigts descendent le long de sa colonne nasale et glisse jusqu’à sa petite bouche aux lèvres charnues : « Je suis si heureux que tu me sois revenue saine et sauve, après tous les risques que tu as pris. »
Médée - " Tu comprends maintenant pourquoi je veux que tu nous prodigues tes connaissances ? "
Mû - " Je ne veux pas être le professeur qui vous guidera vers la mort. Combattre le Sanctuaire est dangereux. "
Médée - " Et Kiki alors ? Tiens, en parlant de lui, où est-il ce garnement ? "
Mû - " Je l’ai justement laissé à Seiya et ses compagnons. Avec la rébellion menée contre le Sanctuaire au Japon, j’ai trouvé que ce serait un bon exercice pour Kiki de vivre la tension de tels événements. C’est l’occasion de lui faire gagner en maturité sans l’exposer directement aux combats. "
Médée - " Et pour nous ? "
Mû - " Je vais aller parler à tes amis. "

En haut, trop empressé, Mei n’a pas résisté à l’envie de visiter davantage l’étage.
Contre les recommandations de Nicol, il vient s’étaler dans une couche en osier faite à la main : « S’il faut encore attendre des heures, je préfère me mettre sur quelque chose de plus confortable que sur ce tapis. »

La voix calme et retenue du Saint d’or rappelle toutefois à l’ordre le Saint de bronze : « Voici donc le remerciement qu’un brave est en droit d’avoir, lorsqu’il t’offre l’hospitalité ? Je reconnais bien là les manières de Deathmask. »
Mei s’insurge : « Qui que vous soyez je vous interdis de porter un tel jugement sur mon maître. Il a toujours été bon et généreux envers moi. L’éducation qu’il m’a donnée, était basée sur le respect. Malgré la découverte de ses actes abominables, je refuse qu’on puisse librement salir son nom. »
Mû maintient un ton courtois malgré des propos durs : « Dans ce cas tiens-toi convenablement, si tu ne souhaites pas être jugé comme un vaurien. »
Mei serre les poings : « Répète un peu ! »
Mû - " Quoi donc ? Le fait que je te demande de te tenir mieux que ne le ferait un singe ou bien le fait que tu ne sois qu’un prétentieux qui ne supporte pas d’entendre la vérité ? "
S’en est trop pour le japonais qui se précipite sur le propriétaire.
Il balance son pied en avant sous le regard désarçonné de Nicol qui déplore déjà la conduite de son camarade.

Mû, les yeux fermés, tend simplement le bras pour immobiliser dans les airs le jeune homme : « Ridicule. »
Il s’amuse à faire tournoyer dans la pièce son bouc émissaire et s’adresse aux autres pendant que Mei l’invective : « Finalement, quand je vois votre niveau, je comprends que Médée me demande de vous ouvrir la voix vers un entraînement plus complet. »
Il relâche enfin Mei qui se réceptionne sur le postérieur, l’air totalement idiot.
Mû lui sourit pourtant : « Quand tu sauras te défaire de ma télékinésie, alors tu imposeras le respect. En attendant, tant que tu seras ici, tu me présenteras un minimum d’égard. »
Trop fier, Mei ramasse sa Pandora Box et l’enfile sur son dos : « C’est complètement ridicule. J’ai déjà réussi à entrapercevoir le septième sens. Je n’ai pas besoin de ce guignol qui se prend pour je ne sais qui. »
Il crache sur le sol de la demeure et saute depuis la fenêtre pour quitter Jamir, sous l’œil désemparé de ses compagnons…

Dans la Méditerranée, non loin de la Grèce, sur l’île Kanon :

Seul, étendu au bord du précipice, Apodis commence à se sentir mal.
La chaleur l’insupporte.
Cependant, alors qu’il commence à perdre connaissance, sa détermination est renforcée par les propos de Marine. Celle-ci sait ce qu’Apodis veut savoir. Les réelles circonstances de la mort de sa famille.
« Je n’ai pas de temps à perdre. Aussi meurtri que mon corps, ma Cloth s’enfonce dans les abysses brûlants de seconde en seconde. Plus que jamais je dois mettre en application les enseignements de mon maître Orphée. Je vais me jeter tout entier dans ce volcan, en luttant grâce à ma cosmo énergie. Ainsi, je me régénérerai plus vite et je développerai davantage mes facultés. », décide-t-il.

Avec son seul bras droit encore valide, il se hisse jusqu’au bord de la falaise de lave.
Ayant à peine la force d’ouvrir un seul œil, il observe le tourbillon de magma qui bouillonne à des mètres plus bas.
Sans même le courage d’hésiter davantage, il se laisse tomber dans la lave comme il abandonnerait un vulgaire caillou du haut d’un précipice.
Un point mort.
Tombant sans grande conviction dans un torrent de feu rougeoyant.

La chute provoque à peine une éclaboussure.
L’épais fluide ardent se contente d’amortir l’affaissement progressif de ce corps qui rougit.
Puis noircit.
Avant de disparaître dans les limbes brûlantes…

Englouti par le magma, sa peau se désagrège peu à peu.
Ses cheveux commencent à se dissoudre.
Pourtant il est apaisé.
Il ne ressent plus rien. Il n’ose d’ailleurs pas à ouvrir ses paupières de crainte que ses yeux fondent sous la chaleur. Apeuré qu’il est de se souvenir de ce qu’est la douleur.
Le liquide ardent s’engouffre par ses orifices.
Jusqu’au plus profond de ses entrailles.

« Alors voilà, je n’y suis pas arrivé, je perds connaissance et quitte ce monde sans parvenir à tenir mes promesses. Mes sens m’abandonnent, je meurs. », avoue-t-il avant de finir inconscient…

Flashback
1979 - Cela faisait deux mois qu’Apodis suivait le pénible entraînement d’Orphée.
Après avoir lutté contre les troupes d’Arès, Apodis avait été reconnu comme un Saint par l’armure de bronze de l’Oiseau de Paradis.
Depuis, jamais il n’eut droit d’avoir recours à sa Cloth. Son professeur ne préférait le voir la porter que lorsqu’il serait un chevalier accompli.
Il restait pour cela encore beaucoup de chemin à parcourir.

Les premières semaines consistèrent à développer sa musculature et son renforcement organique sans faire appel au cosmos.
« L’intérêt est déjà de faire travailler ton corps car derrière l’armure et les bienfaits de la cosmo énergie, tu restes un homme avec ses faiblesses. », lui avait assuré Orphée.
Ses exercices sans relâches lui permirent de jouir bien vite d’une carrure physique plus importante.

Orphée accepta donc de passer à la maîtrise du cosmos.
Les quelques combats menés contre les apprentis d’autres Saints le rassurèrent sur ses capacités martiales et bien vite il profita de cette notoriété grandissante.

Un matin, alors que les rayons du soleil perçaient la tanière qu’il s’était confectionné à côté de la demeure du Saint de la Lyre, Apodis bondit.
Orphée lui avait enseigné que la journée d’un Saint aguerri commençait dès le levé du jour.
Une fois ses vêtements miteux enfilés, ses bras pansés de bandelettes de papier et quelques protections en cuir ceinturées, il alla trouver le chevalier d’argent déjà debout devant chez lui à observer la rosée matinale : « Alors maître ?! Quel exercice me réservez-vous aujourd’hui ? »
Orphée - " Oh, rien de bien compliqué. Aujourd’hui tu auras droit à une journée de repos en notre compagne. Nous partons, avec Eurydice et Netsuai, le long du fleuve qui traverse le Sanctuaire. "
A l’annonce de cette invitation, Apodis grimaça : « Maître, je vous suis reconnaissant d’avoir pensé à moi. Seulement j’aurai aimé poursuivre ma maîtrise de la cosmo énergie. J’ai l’impression d’avoir encore beaucoup à faire. »
Agréablement surpris par l’investissement de son disciple, Orphée n’insista pas.
Au grand damne de Netsuai. La sœur cadette d’Eurydice appréciait tout particulièrement le caractère, emprunt d’assurance, naissant chez le jeune homme. Elle s’en était fait son ami.

Quelques heures plus tard, tandis qu’il dormait en compagnie d’une fille de fermier dans le foin de la grange, Apodis fut surpris par l’irruption du Saint d’argent.
Par réflexe, Apodis couvrit le corps dénudé de son amie d’une bâche et cacha sa propre intimité par ses vêtements.
Le chevalier de la Lyre, tout en restant calme et appliqué dans son allocution, manifesta sa colère : « Mon pauvre garçon. Tu manques encore de discernement. Comment pouvais-tu croire que tu allais me mentir ainsi ? Si tu exerçais réellement ta cosmo énergie, grâce à mes facultés accrues de concentration, je l’aurai ressentie, aussi insignifiante soit-elle ! »
Devenu bien fier en si peu de temps, le nouveau Saint de bronze se rhabilla avec une expression bien dédaigneuse sur le visage : « Insignifiante ?! Ma cosmo énergie ?! Vous oubliez que je suis un des héros de la tentative d’invasion des arèsiens ?! J’ai même tenu tête aux Berserkers ! »
Orphée - " Ces Berserkers étaient d’un niveau pitoyable. Cependant je veux bien croire que mes dons aient été floués. Peut-être n’ai-je réellement pas constaté ta rapide évolution au point de me tenir tête ? "
Apodis - " Vous me défiez maître ?! "
Orphée - " Considère-le comme tu le veux. Je t’attends dehors. "

Orphée, admiré par tout le domaine sacré, sorti de la grange.
Autour, quelques villageois de Paesco furent ameutés par l’arrivée fortuite du chevalier. A commencer par le père de la jeune femme qui a partagé quelques instants de folies en compagnie d’Apodis. Le pauvre homme, décomposé en voyant sa fille sortir à moitié dévêtue, et totalement déshonorée face au peuple, priait Athéna qu’Apodis soit puni.

Dehors, rhabillé grossièrement, Apodis mit quelques instants à habituer ses yeux au soleil de plomb.
Aussitôt, la lumière du soleil lui pesa comme d’ordinaire et la sueur se forma sur son front.
A mesure qu’il distinguait la foule de plus en plus grande, il se sentit honteux envers Netsuai qui le dévisageait avec une certaine déception. C’était pourtant bien avec elle qu’il partageait depuis deux mois quelques instants complices durant lesquels ils se chamaillaient, se confiaient et se réconfortaient l’un l’autre.
« Entre elle et moi, il y a bien plus que de l’amitié. », pensait souvent le grec.

Sans le prévenir, l’homme aux cheveux d’un bleu très clair frappa son élève d’un violent coup de poing dans l’estomac.
Les petits yeux rouges sang contrastant avec la chevelure marine d’Apodis exprimèrent surprise et douleur.
Après avoir reculé de plusieurs petits pas, il s’en remit et rendit la pareille. Du moins il essaya. Les yeux fermés, Orphée esquiva en se permettant de jouer une petite note de musique sur sa lyre pour le ridiculiser : « J’imagine que ton intensif entraînement de cet après-midi t’a épuisé. Le combat n’est donc pas équitable. Pour cela je te propose de ne me battre qu’avec mes jambes. Mes bras serviront uniquement à agrémenter la foule de mon art musical. Il faut bien leur offrir un peu de spectacle vu à quel point tu es pitoyable. »
Le cynisme des propos d’Orphée amusa quelques spectateurs, ce qui provoqua la colère d’Apodis.
Tête baissée, il fondit sur le musicien qui s’amusait de son instrument en parant pieds et poings d’Apodis avec ses jambes et les yeux clos.

Au bout de quelques secondes qui se firent sentir sur l’organisme d’Apodis par un essoufflement important, la colère de l’Oiseau de Paradis ne régressa pas. Cela permit de faire de sa rage un atout qui accrut considérablement son cosmos. Ainsi, il put invoquer l’arcane avec lequel il massacra un Berserker quelques mois plus tôt : « Frantic Fury ! »
Tel un oiseau qui déployait ses ailes, Apodis fonça à une vitesse surpassant celle du son sur Orphée. Il dégagea l’alliance parfaite de son courroux et de son cosmos.
Refusant depuis le début du combat de sous-estimer les capacités de son apprenti, malgré les apparences, Orphée abandonna son engagement. Il utilisa ses bras et invoqua davantage de cosmos pour encaisser cette attaque surprenante.

Un flash se produisit, aveuglant la foule le temps du choc. Après quoi, la stupéfaction générale laissa place à la découverte du succès du maître.
La lyre d’Orphée retombait depuis le ciel où il l’avait projeté pour recevoir dans ces deux mains l’impact d’Apodis. Il s’en ressaisit avec la main gauche, tandis que son bras droit restait tendu contre le visage d’Apodis à hauteur de sa tempe.
Durant quelques secondes, Apodis, les yeux perdus dans le vague, resta en position de frappe sans bouger le moindre membre.
C’est seulement lorsque du point d’impact gicla un important flot de sang, que le corps du jeune homme s’échoua au sol.
A cet instant, toutes les admiratrices d’Apodis tournèrent la tête pour esquiver cette vision d’horreur.

Seule Netsuai bouscula la foule pour gagner son ami qui l’avait déçu. Elle résista à la retenue par le bras d’Eurydice, mais ne put contester l’autorité de l’amant de sa sœur :
Orphée - " N’avance pas plus Netsuai. Je me charge de ramener Apodis à lui… "
Le virtuose incline la tête en direction de sa bien-aimée : « … Cela me demandera du temps. J’ai l’intention de lui en apprendre davantage et vu son caractère de cochon, il me reste du travail. Nous ne rentrerons pas avant. »
La douce Eurydice se contenta d’acquiescer, laissant Orphée prendre sur son épaule le corps inanimé d’Apodis, tout en masquant les fourmis qui parcourait ses bras suite à la surprenante décharge de cosmos de son élève.
Enfin, d’un bond prodigieux, il se propulsa à plusieurs kilomètres d’ici…

Apodis rouvrit les yeux seulement à la nuit tombée, lorsque Orphée balança son corps dans une eau fraîche.
Le fier disciple, pris d’un violent mal de crâne après le choc reçu, ressortit aussitôt de l’onde en hurlant de rage : « Où je suis bordel ?! »
Assis sur la base usée d’une colonne dorique, Orphée rigolait : « Nous sommes là où j’ai été fait Saint. Là où ton entraînement va réellement commencer. »
Apodis - " Merde… J’ai l’impression que mon corps pèse une tonne. "
Orphée - " Je t’ai connu plus poli jeune homme. Il me semble que tes excès de zèle ont réduit à néant la bonne éducation que Mujakis, ta mère, t’a pourtant donnée. "
Apodis - " Ce n’est pas qu’une impression, mon corps est irrémédiablement attiré par le sol. J’ai l’impression que mes muscles vont céder et mes os se rompre. "
Les nerfs d’Apodis jaillirent tous au travers de sa peau, alors qu’Orphée ne semblait pas souffrir de cette nouvelle loi de la pesanteur.
En observant l’eau dans laquelle ses jambes trempaient encore, Apodis remarqua que le fluide s’écoulait depuis plusieurs rivières. Celles-ci venaient se réunir dans d’immenses bassins pour alimenter quelques fontaines et divers thermes. Tout autour, d’immenses jardins fleuris embellissaient les ruines de nombreux temples.
Apodis - " C’est quoi ce lieu ? Nous sommes toujours au Sanctuaire ? "
Orphée - " Nous sommes à Dignity Hill. "
Apodis - " Dignity Hill ! Il s’agit de la zone interdite du Sanctuaire, située dans les collines du nord. Même les Saints d’or ont ordre de ne pas s’y rendre. "
Orphée s’en amusa : « On va dire que je dispose d’une dérogation spéciale du Grand Pope. »
Apodis - " Qu’est-ce que ce lieu ? Pourquoi mon corps souffre-t-il autant ? "
Orphée - " Ce sont les vestiges du Sanctuaire d’Abel. "
Apodis - " Abel ? "
Orphée - " Le dieu solaire oublié. Ancien dieu du soleil, son nom fut rayé de l’histoire à cause de sa trop grande ambition. "
Apodis - " Mais alors… Pourquoi son sanctuaire se trouve au sein du notre… "
Orphée - " Parce qu’il est le frère de sa Majesté Athéna. Lorsque les dieux choisirent de le supprimer du court normal de l’histoire, il présentait un amour sans égal pour sa sœur. Pour cette raison il établit son camp au sein même du domaine sacré. Afin d’honorer cet amour, Athéna accepta de conserver le Temple de Corona où nous nous trouvons actuellement. "

Apodis suivit des yeux la direction présentée par le bras d’Orphée.
Au centre des ruines, au sommet d’une élévation, se dressait toujours le temple du soleil. Depuis ce lieu impérial, émanait un cosmos divin, oppressant et terrifiant.

Orphée - " Malgré le retrait d’Abel depuis des millénaires, sa présence se fait toujours ressentir aux abords de son temple grâce à la bannière de force de son cosmos, un kekkai. Un homme dénué de cosmos serait déjà mort à l’heure qu’il est. Et pour ceux qui le maîtrisent, ce n’est qu’une question de temps avant qu’ils ne meurent épuisés. "
Orphée se gratta grossièrement la tête, brisant le charme qui émanait naturellement de lui. A présent qu’ils sont seuls ici, élève et maître, il n’était plus question de bonnes manières :
Orphée - " C’est pour cela que nous allons rester ici jusqu’à la fin de ton entraînement. "
Apodis - " Mais c’est impossible, comment voulez-vous que je m’entraîne dans ces conditions ? "
Orphée - " C’est en apprenant à t’habituer à ces conditions que tu reviendras plus fort. C’est ici que je suis devenu un chevalier capable de rivaliser avec les Saints d’or. Pour quitter ce lieu il ne te reste que deux solutions. Surpasser le niveau d’un Saint d’argent ou mourir. "
Hurlant à la mort, refusant de douter comme il a pu le faire durant son adolescence, Apodis appelait en lui toutes ses forces pour réussir à sortir complètement de l’eau.

Lorsqu’il leva le menton en direction d’Orphée pour lui manifester son choix, son maître avait disparu.
Il fut tétanisé en entendant la voix de son maître derrière son dos.
« Même avec un dixième de sa force, le Seigneur Orphée est capable de se montrer aussi vif ! », admira le jeune Apodis.
Orphée - " Parfait. Tu es maintenant prêt pour la seconde phase de ton apprentissage ici. "
Il l’attrapa par le col de son maillot et le traîna jusqu’à un bassin dont les profondeurs parurent insondables.
Apodis - " Maître que faîtes vous ?! Si vous me lâchez dans autant d’eau, avec la pression exercée par le kekkai, je vais tomber comme un morceau de plomb et mourir noyé ?! "
Orphée - " J’attendrais jusque là alors. Je n’accepterai que tu sortes de là qu’à l’unique condition que tu réussisses à me parler sous l’eau. "
Apodis - " Que je vous parle sous l’eau ?! Mais je ne suis pas télépathe moi. "
Orphée - " Laisse la télépathie à ceux qui en ont le don. Toi tu ne possèdes que celui du cosmos et tu n’es pas capable d’en faire un bon usage. Lorsque tu parviendras à survivre en canalisant le peu d’oxygène que tu as dans tes poumons grâce à ta cosmo énergie alors tu pourras passer à l’étape suivante. C’est-à-dire rentrer en communication avec la mienne. Seulement à cet instant, tu seras capable de prétendre maîtriser ton cosmos. "
Apodis - " Non… Maître attendez… Attendez… "
Plus lourd qu’un rocher, le corps de l’Oiseau de Paradis s’enfonça dans l’eau après avoir provoqué une immense éclaboussure.
Pris de panique, il ne tarda pas à manquer d’air à mesure qu’il s’enfonçait…

Orphée resta de marbre devant un tel spectacle.
Pour lui donner l’exemple de ce qu’il devait apprendre à faire pour conclure cette expérience, la Lyre profita d’une infime étincelle de cosmos chez son disciple et s’en saisit pour lui parler grâce au sien : « Le cosmos ne sert pas qu’à frapper brutalement son adversaire. Il est capable de substituer les éléments naturels qui nous maintiennent en vie. La faim, les températures anormalement basses ou hautes, l’air. Plus le cosmos est grand, plus la survie est forte et plus on en sort aguerri. Il est impératif que tu saches t’en servir comme bouclier le jour où tu rencontreras des environnements hostiles ou pire, si tu affrontes un adversaire qui les manipule. La cosmo énergie est un art, un état d’esprit, une culture intérieure, pas une force. »
Flashback

Au fond du lac incandescent, le corps d’Apodis heurte un objet.
Une urne métallique.
Elle résonne.
A mesure que le sang d’Apodis fuit ses plaies, celui-ci se mélange à la lave.
Cette fusion inonde l’urne métallique.
Elle résonne plus fort.
De plus en plus fort.

Apodis revient à lui : « Ma Pandora Box… Je la sens, mon armure, elle m’appelle. Cette sensation d’énergie qui me permet de communiquer avec elle et de rester en vie, ce n’est pas mes cinq sens, ni même mon sixième sens. C’est bien au-delà de ça. Je ne fais plus qu’un avec mon armure et l’île Kanon. C’est grâce à ce qui m’a permis de survivre à l’enseignement de mon maître. C’est… L’ultime cosmos, le septième sens ! »
Immédiatement, Apodis ouvre ses yeux et écarte ses bras.
Son corps rayonne et son armure jaillit devant lui.
La Cloth est comme neuve, le mélange du sang nécessaire à sa reconstruction et les bienfaits du volcan l’ont réparé.
Les plaies d’Apodis cicatrisent peu à peu. Son bras gauche bleui par le froid commence à réagir…

A Jamir :

Alors qu’il est proche de sortir du domaine des muviens, Mei, le visage renfrogné, froissé par l’humiliation que lui a fait subir Mû, ressent la présence de Yulij lui courir après.
Celle-ci n’a pas pris sa Pandora Box contrairement à lui, il comprend donc : « Tu vas rester ici alors. »
Yulij - " Et toi aussi tu dois rester. "
Mei - " Certainement pas. "
Yulij bouillonne : « Mais enfin qu’est-ce qui ne tourne pas rond chez toi ? Tu as été l’élève d’un Saint d’or. Et alors ? Quel droit ça te donne de plus ? Quelle capacité exceptionnelle as-tu de plus que les autres ? Aucune ! Hormis Nicol, nous sommes tous à un niveau quasi équivalent. »

Encore plus piqué au vif par de tels propos, Mei tourne le dos. Son ego est sérieusement troublé.
Yulij insiste pour le retenir. D’une voix plus douce, elle déclare : « Tu n’as rien à prouver. »
Cependant, la décision de Mei est prise : « Je m’en vais. »
Yulij passe devant lui et se met en position de combat : « Tu partiras d’ici seulement après m’avoir vaincue. »
Mei - " Arrête Yulij. Tu es ridicule et je ne veux pas… "
Il n’a même pas finit sa phrase que la jeune femme au maillot et au short kaki l’envoie au tapis d’un crochet du gauche.

Pour Mei, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Il défait les lanières de sa Pandora Box et se met en position de combat. Ses yeux sont embrumés par la colère.
Il répond d’une droite qu’elle pare sans difficulté. Elle en profite pour lever le genou vers son estomac, mais il le bloque avec son coude gauche. Il enchaîne avec un coup de tête en plein visage de Yulij et lui fissure son masque de femme chevalier.
La Saint du Sextant s’en remet vite et effectue un coup de pied retourné. Il l’esquive en s’accroupissant. Il joue ainsi de la flexion de ses jambes pour prendre appui et plaquer violemment Yulij contre les rochers qui les entourent.
Secouée, la demoiselle parvient difficilement à se tenir droite. Mei espère ainsi la mettre hors de combat en lui collant un uppercut.
C’est sans compter sur l’opiniâtreté de son adversaire qui lui attrape le bras et fait passer Mei par-dessus elle pour le faire s’écraser au sol.
Yulij - " Tu vois. Finalement tu n’es pas plus fort qu’un autre. L’entraînement de Mû te sera bénéfique. "
Mei refuse de s’avouer vaincu, il se jette genou en pleine figure de Yulij. Après avoir voltigé dans les airs, elle s’échoue lamentablement au sol.
Mei - " Je t’interdis de croire que tu peux rivaliser avec moi ! "

Sous ses pieds, il sent quelques fracas. Sa rage s’atténue lorsqu’il comprend qu’il s’agit du masque brisé de Yulij : « Te… Ton masque ! Je… Je ne voulais pas, je suis désolé. »
Yulij se relève déconcertée. Elle passe ses mains sur son visage qui reste magnifique, malgré l’aigreur qui la défigure.
Ses fins sourcils sont froncés et ses grands yeux bleus toisent son rival, subjugué, voire gêné, par sa beauté :
Yulij - " Comment as-tu pu ? "
Mei - " Je… Je m’excuse. "
Sa cosmo énergie commence à s’étendre tout autour d’eux, laissant Mei penaud.

Heureusement, la concentration de la jeune femme est interrompue lorsqu’un foulard tombe sur ses cheveux blancs grisonnants.
Médée, en tête, lui assure : « Ajuste donc cela pour dissimuler ton visage. Mon mari te refera un masque ne t’en fais pas. »
Derrière sa conjointe, Mû, plein de bon sens, déclare : « Alors Mei. Cette confrontation a été un bon exercice. Je suis sûr que tu réalises avoir encore beaucoup à apprendre. Si tu es prêt à te conformer à mes exigences et à suivre rigoureusement mes conseils, alors j’accepte que tu restes parmi nous. »
Mei, indécis, baisse la tête vers le sol.
Nicol rajoute alors : « Si tu ne le fais pas pour toi, fais-le pour Yulij. Maintenant que tu as vu son visage, elle n’a pas d’autres choix que de t’aimer ou de te tuer. Epargne-lui une traque inutile à travers le monde. »
Mei rendosse l’urne de son armure et tourne le dos à ses amis.

Pourtant, il est incapable de reprendre sa marche.
Ses membres tremblent d’effroi après avoir constaté l’écart insignifiant entre Yulij et lui.
Lui, l’élève d’un des Saints les plus puissants au monde, réduit au même niveau qu’une vulgaire paysanne du Sanctuaire.
L’image cruelle de Deathmask, abattant son courroux sur Epione, brisant le souvenir paternel qu’il gardait de lui, lui revient aussitôt en mémoire.
Tout comme son impuissance face à la mort de Dabih.
Il réalise alors que sa propre faiblesse remet chaque fois en question ses certitudes.

Longtemps immobile, il finit par laisser s’échapper quelques larmes.
C’est seulement lorsqu’il devient capable de dissimuler son émotion, qu’il fait demi-tour : « Très bien, j’accepte de rester… »
Une fois arrivé à hauteur de Mû, Mei concède, tout en le fixant dans les yeux et en abandonnant son ton fier : « … Et je m’excuse pour mon comportement grossier. »

Dans la Méditerranée, non loin de la Grèce, sur l’île Kanon :

Le soleil se couche à l’horizon, ne laissant qu’une teinte orangée dans le ciel.
Au sommet du volcan, dans le nuage de fumée, apparaît peu à peu l’ombre d’un chevalier habillé de son armure de bronze. Celle-ci brille de mille feux.

Resplendissant, le Saint se détaille lui-même avec admiration : « Incroyable, c’est comme une seconde vie. Je n’ai jamais été aussi en forme. Je n’ai plus une seule cicatrice, toutes mes plaies ont été résorbées. Et mon armure, je la sens emprunte d’une nouvelle vie. »
Il ferme les yeux un instant avant de déclarer : « Juste en bas, je ressens le cosmos de Marine. Elle est accompagnée d’une autre personne. J’y vais. »

Après un bon prodigieux, à la vitesse de la lumière, à peine sa phrase achevée, qu’Apodis se réceptionne devant Marine.
Celle-ci, assise, les jambes croisées, est restée à fixer toute la journée le captif Gigas.
D’un hochement de la tête, comme pour la remercier, Apodis se contente de prononcer le nom de son amie : « Marine. »
Elle lui renvoie le même signe et pointe du doigt Gigas : « Apodis, il faut que nous parlions. Beaucoup de choses sont arrivées au Sanctuaire. »

Pendant plus d’une heure, Apodis reste les bras croisées à écouter les interventions de Marine conjuguées à celles de Gigas.
Apodis - " Alors Docrates, Misty, Babel et les autres sont morts sans savoir qu’ils officiaient pour le mal. Et c’est aujourd’hui Phaéton qui a pris la place de Gigas, après que celui-ci a fuit une fois sa dernière tentative au Japon avortée. "
Marine - " Tout le monde n’est pas mort sans connaître les raisons obscures de leurs missions. Il y avait parmi eux les Ghost Saints. "
Apodis - " Les Ghost Saints ? "
Marine bouscule Gigas pour le faire parler :
Gigas - " Euh… Hum… Les Ghost Saints étaient un groupe de mercenaires du Sanctuaire. Un peu comme Docrates et Crystal Saint. Seulement leurs actes étaient criminels et par sécurité, une fois leur mission principale achevée, on les a exilés du Sanctuaire. C’est sur l’île où ils se sont réfugiés que Seiya et les autres les ont vaincus. Voilà, c’est tout. "
Marine le chahute davantage : « Non ce n’est pas tout. »
Apodis - " Tu parlais d’une mission principale. Laquelle était-elle ? "
Gigas - " Comme tu le disais tout à l’heure, sur Yíaros plusieurs soldats portaient ma marque. Il s’agit d’hommes sans scrupules. En plus de soldats je disposais d’une équipe de mercenaires, dont les Ghost Saints. Sur demande du Grand Pope, nous les avons utilisés pour monter le complot lors de la Journée Sainte. C’est eux qui ont attaqués les athéniens. "
Apodis - " Tu veux donc dire que ce sont des athéniens qui ont tués d’autres athéniens. "
Gigas affirme honteusement d’un mouvement de tête. Marine, d’un ton autoritaire, somme à Gigas de dire toute la vérité : « Dis-lui qui était chargé de s’occuper de la maison d’Apodis ! »
Les yeux d’Apodis, remplis de douleur, se lèvent instantanément sur Gigas. Ils deviennent chargés d’une rage folle.

L’ancien général commence à reculer, espérant prendre la fuite : « Je… J’accepte de te le dire… Seulement… Seulement promets-moi de me laisser la vie sauve. »
Apodis se précipite devant lui : « Parle ! Je t’écoute ! »
Gigas - " Le… Le plan du Pope était de profiter de la soi-disant attaque d’Hébé, pour frapper directement les chevaliers qui se posaient trop de question sur la politique qu’il menait. Il a donc chargé les Ghost Saints d’attaquer ta maison. Voilà, c’est tout. Laisse-moi partir maintenant. "
Les yeux d’Apodis débordent de brutalité. Ses veines gonflent sur son front et sa mâchoire est prête à se broyer tant il serre les dents.
Marine, d’une voix douce, comme pour ne pas amplifier la furie montante en Apodis, ordonne à Gigas : « Ce ne sont pas les Ghost Saints qui ont attaqués sa maison, mais un d’eux. Dis-lui lequel. »
Alors qu’il est déjà à quelques mètres d’Apodis, il continue de marcher en arrière : « Il… Il s’agissait du Ghost Saints de la Méduse. »
Apodis, sans desserrer la mâchoire : « Son nom ? »
Gigas - " Il a accepté de rentrer dans la bande de Geist, la chef des Ghost Saints, par dépit. Le fait que tu deviennes chevalier et que lui ne le serait jamais l’avait anéanti. "
Apodis - " Son nom ? "
Gigas - " Lorsque nous avons mandaté les Ghost Saints pour le complot de la Journée Sainte, il s’est aussitôt proposé volontaire en entendant ton nom sur la liste des gens à punir. "
Apodis - " Son nom ?! "
Gigas - " Mais il a été puni tu sais. Il a trouvé la mort des poings de Seiya de Pégase. Aujourd’hui son cadavre gît dans les eaux boueuses de… "
Apodis hurle : « Son nom ! »
Gigas - " F… Front… Frontinus… Il s’agissait de Frontinus. Ton père. "

Comme ayant reçu un électrochoc, Apodis s’écroule à genoux.
Les yeux dans le vague.
Son mémoire revit la découverte de sa maison ravagée.
Du cadavre de sa mère.
Du corps gisant de son petit garçon.
« Mon père… Frontinus… Alors il aura détruit ma famille jusqu’au bout. Nous avoir rendu malheureux ma mère et moi ne lui aura pas suffit. Il a osé… Sa femme… Son… »
La douleur est si forte qu’il n’arrive pas à achever sa phrase dans son esprit.
Il baisse la tête au sol pour vomir de dégoût.
De rage.
De tristesse.
D’incompréhension.
Il hurle la fin de sa phrase en posant ses mains sur son visage pour étouffer ses sanglots : « Son petit fils ! »

Déjà loin, Gigas s’enfuit en traînant la jambe.
Marine vient déposer sa main sur l’épaule d’Apodis : « Je suis désolée. Mais il était impératif que tu saches. »
D’abord haletant, Apodis reprend son souffle.
Il efface du bras ses larmes et affiche une mine ferme, fidèle au cap qu’il s’est fixé.
Il pose sa main sur celle de Marine : « Merci Marine. »
Il se redresse et se contente d’un : « Je reviens. »
Avant de foncer en direction de Gigas.

Dans son dos, Gigas sent un vent violent le heurter derrière sa jambe valide. La chair de sa cuisse vole alors en lambeau sous le coup porté à distance et avec précision par Apodis.
Le vieux bougre s’échoue sur le sol.
En levant l’œil en l’air, le borgne déclare à Apodis : « J’avais demandé la vie sauve. »
Apodis - " Et tous les innocents morts par ta faute, que leur as-tu répondu lorsqu’ils demandaient la vie sauve ? Et ma mère ? Et mon fils ? "
Gigas - " Ce n’était pas ma faute, c’est le Grand Pope le responsable de tout ça. Tiens tu sais quoi, tu es très fort. Marine aussi l’est. Pourquoi n’irions-nous pas au Japon retrouver Seiya et les autres ? En nous alliant à eux, je suis sûr que nous pourrons renverser le Grand Pope et… "
Gigas

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