2014-08-18

La Loi sur la recherche des causes et circonstances des décès permet au coroner de formuler des recommandations visant une meilleure protection de la vie humaine.

Le bureau du coroner ne dispose toutefois d’aucun pouvoir de contrainte pour obliger les organismes publics visés  des recommandations dans un rapport d’enquête ou d’investigation à mettre en œuvre celles-ci.

Les recommandations d’un coroner n’ayant pas force de loi, leur mise en application est donc entièrement laissée au bon vouloir des organismes publics qui en font l’objet.

Dans ce contexte, il y a lieu de se questionner sur le sort que connaissent ces recommandations une fois la poussière retombée.

Les organismes publics visés par ces recommandations sont-ils plus portés à les mettre en œuvre… ou à s’en laver les mains ?

Afin d’en avoir le cœur net, un militant de la CRAP a adressé une demande d’accès à l’information au Bureau du coroner dans le but trouver réponse à la question suivante : les recommandations du coroner, kosse ça donne ?

Dans ce premier texte d’une série de trois, nous examinerons quel a été le suivi, jusqu’à présent, des recommandations que le coroner André Perreault a formulé dans son rapport d’enquête sur les causes et circonstances du jeune Fredy Villanueva.

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Comme on le sait, Fredy Villanueva, 18 ans, est tombé sous les balles de l’agent Jean-Loup Lapointe du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), à Montréal-Nord, le 9 août 2008.

Ce tragique incident a eu de nombreuses répercussions, à commencer par l’importante émeute qui a éclaté dans l’arrondissement de Montréal-Nord au lendemain du décès de Fredy Villanueva, la remise en question du mécanisme d’enquête permettant à un corps policier d’enquêter sur un autre suite à une bavure policière et la prise de conscience de l’ampleur du  phénomène du profilage racial, pour ne nommer que celles-là.

Le 1er décembre 2008, le gouvernement du Québec a annoncé la tenue d’une enquête publique sur les causes et circonstances de Fredy Villanueva dans les minutes ayant suivi la décision du Directeur des poursuites criminelles et pénales de ne retenir aucune accusation criminelle contre l’agent Jean-Loup Lapointe.

L’enquête publique présidée par le coroner ad hoc et juge en chef adjoint de la Cour du Québec, André Perreault, fut particulièrement longue, nécessitant plus de cent journées d’audition.

Ce n’est que le 13 décembre 2013 que le coroner Perreault a complété son rapport d’enquête, soit plus de cinq ans après le décès de Fredy Villanueva.

Dans son rapport de 143 pages, le coroner Perreault a formulé un total de vingt-deux recommandations à l’endroit de sept organismes publics différents.

Le coroner Perreault a adressé sept de ces recommandations à l’École nationale de police du Québec, contre six à la direction de l’organisation et des pratiques policières du ministère de la Sécurité publique, quatre au SPVM, trois au ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, une au ministère de la Santé et des services sociaux et enfin une même et seule recommandation à la ville de Montréal et au conseil d’arrondissement de Montréal-Nord.

Notons que le Coroner en chef du Québec, Denis Marsolais, a écrit à tous les organismes concernés, le 17 décembre 2013, pour leur communiquer une copie du rapport du coroner Perreault peu avant sa divulgation au grand public.

Une demande d’accès à l’information auprès du Bureau du coroner a en effet permit d’obtenir une copie de la lettre que le Coroner en chef a envoyé au maire de Montréal, Denis Coderre, au maire d’arrondissement de Montréal-Nord, Gilles Deguire, au sous-ministre du ministère de la Sécurité publique, Martin Prud’homme, au sous-ministre au ministère de l’Éducation, Bernard Matte, directrice générale de l’École nationale de police du Québec, Marie Gagnon, et à la sous-ministre au ministère de la Santé, Lise Verreault.

« Nous apprécierons connaître les mesures qui seront prises, considérant les observations et constatations faites dans ce dossier », écrit le coroner Marsolais dans sa lettre.

« À cette fin, je vous signale que les informations que vous nous transmettrez par courrier, s’il y a lieu, pourront être accessibles conformément aux dispositions de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels », ajoute-t-il, comme s’il s’agissait-là d’une sorte d’avertissement.

Et comme de fait, durant avril et mai 2014, un militant de la CRAP a adressé des demandes d’accès à l’information auprès des organismes publics visés par les recommandations du coroner Perreault.

La documentation du suivi donné aux recommandations du coroner est d’autant plus pertinente et nécessaire que l’enquête publique sur le décès de Fredy Villanueva fut certainement l’une des plus coûteuses de toute l’histoire du Québec, comme l’ont dit et répété certains médias d’information.

Dans le présent texte, nous allons partager les réponses que chacun de ces organismes publics ont fait parvenir au demandeur, en rappelant d’abord chacune des recommandations contenues dans le rapport d’enquête, telles qu’elles ont été libellées par le coroner Perreault.

Nos commentaires suivront à la toute fin de l’article.

À LA VILLE DE MONTRÉAL ET AU CONSEIL D'ARRONDISSEMENT DE MONTRÉAL-NORD, JE RECOMMANDE :

- la mise sur pied d'un plan d'action particulier relatif à la lutte à la pauvreté et à l'exclusion sociale des personnes et des communautés qui composent la population de Montréal-Nord. Ce plan d'action devrait être rendu public. Je n'estime pas, comme la Ville de Montréal l'a argumenté devant moi, que cela échappe à mon mandat de coroner puisque la problématique semble telle qu'une intervention policière anodine peut se transformer en situation à haut risque de perte de vies humaines.

Lorsque la Ville de Montréal a reçu une demande d’accès à l’information visant à obtenir tout document ou information se rapportant à cette recommandation, le responsable de l’accès à l’information de cet organisme a d’abord jugé que cette demande d’accès « porte sur des documents qui sont maintenant détenus par le SPVM ». Il a donc acheminé la demande d’accès au SPVM.

Et lorsque le SPVM a traité la demande d’accès, il a conclu que celle-ci « relève du responsable de l’accès à l’information de la Ville de Montréal », et a donc invité le demandeur à s’adresser à ce dernier.

Il a fallu que le demandeur fasse une demande de révision à la Commission d’accès à l’information pour que la Ville de Montréal traite adéquatement sa demande d’accès.

Suite à cette nouvelle démarche, la Ville de Montréal a envoyé au demandeur une lettre datée du 7 mars 2014 que le directeur général de la Ville de Montréal, Alain Marcoux, a écrit au coroner Perreault, pour l’informer des « actions que la Ville de Montréal entend donner à [ses] recommandations ».

Or, le document en annexe à la lettre est un document du SPVM et ne traite que des quatre recommandations que le coroner Perreault a adressé au SPVM (nous examinerons ce document plus en détail ci-dessous).

Bref, pas un mot au sujet de la recommandation que le coroner a formulé spécifiquement à l’attention de la Ville de Montréal.

Les résultats n’ont guère été plus satisfaisants du côté de l’arrondissement de Montréal-Nord, également visé par cette même recommandation du coroner Perreault.

Dans un premier temps, le demandeur n’a reçu aucune réponse de l’arrondissement de Montréal-Nord.

Puisque l’absence de réponse est considérée comme décision dans la loi sur l’accès à l’information, le demandeur s’est donc prévalu de son droit de demander la révision de cette « décision » en s’adressant, encore une fois, à la Commission d’accès à l’information.

Et, encore une fois, la demande d’accès a été traitée en bonne et due forme seulement après que le demandeur eut envoyé une demande de révision.

Le responsable de l’accès à l’information à l’arrondissement de Montréal-Nord a ainsi écrit au demandeur que l’arrondissement détient une copie d’un document appelé « Plan de développement social 2014-2019, Montréal-Nord en santé ».

Dans une lettre adressée au demandeur, le responsable de l’accès a indiqué au demandeur qu’il devait de défrayer la somme de 38.43 $ pour obtenir une copie de ce document ou encore de le consulter aux bureaux de l’arrondissement durant les heures d’ouverture.

Ce n’est probablement pas ce que le coroner Perreault avait en tête lorsqu’il a indiqué, dans sa recommandation, que le « plan d'action devrait être rendu public »…

Lorsque le demandeur a communiqué avec l’arrondissement de Montréal-Nord pour savoir s’il existe une version numérique du document, dans l’espoir de se le faire acheminer par courriel pour éviter les frais et le déplacement, le responsable de l’accès lui a répondu que ce n’était pas le cas.

Or, après vérification, cette affirmation s’est avérée inexacte, le document en question ayant été retracé sur Internet à l’adresse http://www.arrondissement.com/tout-getAlbum-gallery-DIRF/u59?tFormat=folder

Une consultation du document a permis de constater que le document n’a pas été produit par l’arrondissement de Montréal-Nord, mais plutôt par l’organisme Montréal-Nord en santé, une table de concertation locale mise sur pied en 2009.

Si l’arrondissement de Montréal-Nord est bien nommé comme faisant partie des « partenaires institutionnels » de la table de concertation, force est de constater qu’il l’est au même titre que la Corporation de développement économique communautaire, la Commission scolaire de la Pointe-de-l’Île et la députée provinciale Rita De Santis, pour ne nommer que ceux-là.

Mais l’important n’est-il pas qu’un plan d’action contre la pauvreté et l’exclusion sociale ait été adopté, comme le souhaitait par ailleurs le coroner Perreault ?

Car la lutte à la pauvreté et à l’exclusion sociale est bien citée dans le document comme partie intégrante de « l’objectif ultime » visé par le plan de développement social.

Mais au même titre que les questions du logement, la persévérance scolaire, l’emploi, la sécurité alimentaire, la violence conjugale, les nouveaux immigrants et l’amélioration de la qualité des milieux de vie physiques et sociaux, autant de problématiques complexes qualifiées « d’enjeux prioritaires » dans le document.

Bref, pour un plan d’action spécifiquement consacré à la lutte à la pauvreté et à l’exclusion sociale, on repassera.

Il est vrai que les questions de l’emploi et de la sécurité alimentaire peuvent être directement reliées à la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale.

Cependant, le document permet de constater que l’arrondissement de Montréal-Nord n’a pris aucun engagement formel en ce qui concerne une éventuelle prise en charge des plans d’action conçus en guise de réponse à ces problématiques spécifiques.

Le document indique en effet que l’arrondissement est identifié comme « porteur » de seulement deux des plans d’action rattachés aux « objectifs généraux » entourant les sept « enjeux prioritaires » ci-haut mentionnés, soit celui visant l’amélioration de la qualité des aménagements urbains et du transport et celui visant à informer les citoyens et citoyennes et différents organismes de Montréal-Nord quant aux différents services offerts aux nouveaux immigrants (et encore là, dans ce dernier cas, la responsabilité est partagée entre l’arrondissement et Montréal-Nord en santé).

Fait à souligner, les responsables de Montréal-Nord en santé ne s’engagent pas à accomplir les différents objectifs généraux et spécifiques énumérés dans le document, loin de là.

« C'est chaque table, chaque organisme, chaque citoyen qui devra travailler pour faire rayonner le plan. Ce n'est pas à Montréal-Nord en santé de le réaliser. Toutefois, ce sera à nous de s'assurer que ça se met en œuvre », a indiqué Pierrette Lévesque, directrice de Montréal-Nord en santé, à un hebdomadaire local. (1)

Tout ça pour dire que tant la Ville de Montréal que l’arrondissement de Montréal-Nord n’ont pas suivi la recommandation que le coroner leur a adressé.

AU MINISTRE DE LA SANTÉ ET DES SERVICES SOCIAUX, JE RECOMMANDE :

- d'élaborer une procédure permettant aux premiers répondants d'obtenir une rétroaction de la part du personnel médical qualifié lorsque leur intervention s'est déroulée en situation où on a tenté de sauver la vie d'une personne.

Le ministère de la Santé et des services sociaux a fait parvenir au demandeur une lettre datée du 21 janvier 2014 adressée au Coroner en chef, Denis Marsolais, et signée par Lise Verreault, sous-ministre de la Santé et des Services sociaux, dont voici un extrait :

En réponse à la recommandation, nous voulons vous informer qu’au moment de l’événement, soit en août 2008, le processus d’assurance-qualité pour les pompiers premiers répondants était en cours d’implantation. Nous vous confirmons que depuis 2009, le Programme d’assurance-qualité pour ces intervenants est implanté en totalité et est conforme au plan qualité clinique du ministère de la Santé et des services sociaux.

Ce Programme prévoit les processus de rétroaction requis à la suite des interventions des premiers répondants et il a été mis en place grâce à une collaboration entre la Corporation d’urgences-santé et le Service incendie de la Ville de Montréal, division « Premiers répondants ». De plus, il est conforme aux attentes de la Direction médicale nationale des services préhospitaliers d’urgence du MSS.

À la lumière de cette réponse, il semble que le ministère de la Santé et des services sociaux n’ait pas attendu le rapport d’enquête sur le décès de Fredy Villanueva pour mettre en place le processus de rétroaction souhaité par le coroner Perreault.

Toutefois, le responsable de l’accès à l’information du ministère a refusé de communiquer une « fiche synthèse » au demandeur, en invoquant les articles 34 et 37 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (communément appelée loi sur l’accès à l’information).

Notons que l’article 34 permet à un organisme public de refuser l’accès à un document du bureau d'un membre de l’Assemblée nationale ou un document produit pour le compte de ce membre par les services de l’Assemblée, du cabinet du président de l’Assemblée, d’un membre de celle-ci visé dans le premier alinéa de l’article 124.1 de la Loi sur l’Assemblée nationale ou d’un ministre visé dans l’article 11.5 de la Loi sur l’exécutif, ainsi que d’un document du cabinet ou du bureau d’un membre d’un organisme municipal ou scolaire.

Quant à l’article 37, il permet à un organisme public de refuser l’accès à un avis ou une recommandation faites depuis moins de dix ans, par un de ses membres, un membre de son personnel, un membre d’un autre organisme public ou un membre du personnel de cet autre organisme, dans l’exercice de leurs fonctions. Il permet également refuser de communiquer un avis ou une recommandation qui lui ont été faits, à sa demande, depuis moins de dix ans, par un consultant ou par un conseiller sur une matière de sa compétence.

À LA MINISTRE DE L'ÉDUCATION, DU LOISIR ET DU SPORT, JE RECOMMANDE :

- de promouvoir, dès le début du secondaire :

- l'enseignement de la façon adéquate de se comporter avec un policier lors d'une interpellation pour une infraction criminelle ou pénale et de la façon de contester une accusation criminelle ou un constat d'infraction;

- l'enseignement de la façon adéquate de se comporter en cas d'interpellation ou d'arrestation d'un tiers, en insistant sur les risques d'intervenir et sur la perception que les policiers peuvent avoir d'une telle intervention;

- l'enseignement des conséquences pour une personne qui refuse d'établir son identité à la demande d'un agent de la paix qui l'informe qu'elle a commis une infraction.

Le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport a fait parvenir au demandeur des documents totalisant une douzaine de pages, soit des correspondances par courriel entre divers hauts fonctionnaires du ministère, le compte rendu d’une réunion d’un « comité de travail affaire Villanueva », une lettre adressée au sous-ministre et une lettre adressée au Coroner en chef.

Cependant, la responsable de l’accès à l’information du ministère a jugé nécessaire d’élaguer certains renseignements de ces documents, en invoquant l’article 37 de la loi sur l’accès (voir ci-haut).

D’entrée de jeu, il convient de relever que certaines des correspondances par courriel, toutes datée du 13 janvier 2014, font référence à une « réponse préliminaire » au rapport du coroner Perreault formulée en décembre 2013, soit dans les jours ayant suivi le dépôt dudit rapport.

Or, le ministère n’a jamais communiqué au demandeur le document contenant cette « réponse préliminaire ».

Toutefois, le courriel de Liette Picard, directrice des Services éducatifs complémentaires et de l’intervention en milieu défavorisé au ministère, permet à tout le moins d’apprendre que cette « réponse préliminaire » contenait une allusion aux modifications apportées à la Loi sur l’instruction publique par le projet de loi visant à prévenir et combattre l'intimidation et la violence à l'école (nous y reviendrons).

Notons qu’environ la moitié du texte de ce courriel a été élagué.

Un autre courriel, celui-là de Stéphanie Vachon, secrétaire générale au ministère, permet par ailleurs d’apprendre que « la ministre [i.e. Marie Malavoy] souhaite traiter ce dossier en point d’échanges avec le sous-ministre le 14 janvier prochain lors du CDM ».

(Dans le jargon des hauts fonctionnaires et politiciens, l’expression « point d’échanges » signifie que le sujet sera abordé sans être nécessairement inscrit à l’ordre du jour d’une réunion, laissant ainsi supposer une discussion davantage informelle.)

Un autre document livre un compte-rendu de la première réunion tenue par le « comité de travail affaire Villanueva ».

On y apprend que la réunion s’est déroulée aux bureaux de la Sûreté du Québec, de 9 h 30 à 15 h, le 3 février 2014, en présence de Danielle Abel-Normandin (SPVM), Danielle Marquis (ministère de l’Éducation), Jean-Pierre Larose (Association des directeurs de police du Québec), Pierre Renaud (Sûreté du Québec) et Daniel Rochette (ministère de la Sécurité publique).

C’est donc dire que trois des cinq participants à la réunion provenaient directement des rangs policiers.

Cette présence majoritaire de représentants du milieu policier semble d’ailleurs correspondre aux vœux mêmes du ministère de l’Éducation puisque le compte rendu révèle que celui-ci « a sollicité les différents partenaires représentant les services de police pour déterminer les mesures qui seront prises pour donner suite aux recommandations du coroner ».

On peut également lire que l’École nationale de police du Québec est considérée comme l’un « des différents partenaires concernés par la question » des recommandations du coroner, le représentant de l’Association des directeurs de police s’étant d’ailleurs engagé durant la réunion à entrer en contact avec cet organisme.

L’École nationale de police du Québec est en outre nommée, avec les cinq autres organismes déjà représentés à la réunion, comme faisant partie du comité de travail mis sur pied sous la coordination du ministère de l’Éduction.

Le compte rendu de la réunion fait cinq pages. Le document communiqué au demandeur a cependant été élagué, encore une fois, en particulier au niveau des deux dernières pages.

La lecture du document permet néanmoins d’apprendre que les participants à la réunion ont « échangé sur les recommandations adressées au ministre de la Sécurité publique et à l’École nationale de police du Québec ».

Mais tout ce qui concerne les suites qui seront données aux recommandations du coroner semble avoir été caviardé, à part une mention à l’effet que les participants à la réunion ont eu des discussions « sur le  contenu et le format que pourrait prendre le produit final ».

Les passages non-élagués du document laissent toutefois croire que les participants à la réunion ont envisagé la possibilité de réutiliser, en tout ou en partie, le contenu d’un DVD du SPVM portant « sur la réalité des policiers » et « développé à l’intention des jeunes ».

Le ministère de l’Éduction a communiqué au demandeur un autre document, partiellement caviardé lui aussi, provenant cette fois-ci de la Direction générale des services éducatifs complémentaires et de l’intervention en milieu défavorisé.

Le document de cinq pages a été préparé par Danielle Marquis, responsable du dossier violence au ministère, le 17 février 2014, avant d’être approuvé par Liette Picard, directrice des services éducatifs complémentaires et de l’intervention en milieu défavorisé, Normand Pelletier, sous-ministre adjoint au développement pédagogique et au soutien aux élèves, et Bernard Matte, sous-ministre, lors des deux semaines suivantes.

Intitulé « note et lettre à l’intention du sous-ministre », le document a pour objet de traiter des « mesures mises en place par le Ministère relativement aux recommandations du rapport d’enquête publique du coroner, suite au décès de M. Fredy Alberto Villanueva ».

Les passages non-caviardés du document ne permettent toutefois pas d’apprendre grand-chose puisqu’on y fait simplement un retour sur les recommandations du coroner Perreault, la mise sur pied du comité de travail et la tenue de la réunion du 3 février 2014.

En fait, les seules brides d’information ayant échappées au caviardage révèlent que les passages élagués traitent des « étapes à venir » et des « implications financières » des suites qui seront données aux recommandations du coroner Perreault.

Enfin, le dernier document communiqué par le ministère est une lettre du sous-ministre Bernard Matte, datée du 3 mars 2014, adressée au Coroner en chef, Denis Marsolais.

« La Loi sur l’instruction publique, écrit le sous-ministre Matte, prévoit que les commissions scolaires et les services de police concluent des ententes de services pour couvrir les situations survenant dans les contextes de prévention, d’enquête et d’urgence ainsi que lors d’un acte d’intimidation et de violence. Les mesures qui seront proposées par le comité [de travail] pour répondre aux recommandations du coroner pourront être considérées dans le cadre de l’élaboration et de la mise en œuvre de ces ententes ».

AU SERVICE DE POLICE DE LA VILLE DE MONTRÉAL, JE RECOMMANDE :

- de veiller à ce que les policiers appelés à intervenir dans l'arrondissement de Montréal-Nord reçoivent une formation relative à l'intervention auprès de personnes issues de minorités ethnoculturelles et à leurs perceptions de la police;

- d'examiner la possibilité de doter ses véhicules de systèmes de localisation de véhicule par satellites Global Positioning System (GPS);

- d'examiner la possibilité de munir les policiers patrouilleurs de radios capables d'émettre et de recevoir en continu au moyen d'une action simple plutôt que de devoir sacrifier une main durant toute émission;

- de rendre publics les indicateurs de performance de son Plan stratégique en matière de profilage racial et social (2012-2014), les résultats d'évaluations externes dudit plan et les nouvelles mesures mises en œuvre.

La Ville de Montréal a communiqué au demandeur une « note de service » du SPVM datée du 19 février 2014.

Il s’agit d’un document de quatre pages expédié au directeur général de la Ville de Montréal, Alain Marcoux, par le directeur du SPVM, Marcel Parent.

D’entrée de jeu, le document permet d’apprendre que le directeur général Alain Marcoux a transmis, le 7 janvier 2014, le « mandat 2014-005 » au SPVM afin d’être informé « de la suite qu’entend donner le SPVM aux quatre recommandations contenues dans le rapport du Coroner Perreault ».

Au sujet de ces quatre recommandations, le directeur Parent écrit « que la plupart d’entre elles sont complétées et que les autres sont sur le point de l’être ».

Un document de trois pages, en annexe à la note de service, permet de prendre connaissance des actions posées par le SPVM, de même que celles que ce dernier compte réaliser dans le futur.

En ce qui concerne la recommandation portant sur la formation des policiers appelés à intervenir à Montréal-Nord auprès de personnes issues de minorités ethnoculturelles, le document dresse la liste de dix actions posées par le SPVM.

En gros, le SPVM dit avoir :

mis en place, depuis 2009, un programme d’accompagnement pour tout nouveau policier affecté au Poste de quartier 39, à Montréal-Nord;

tenu une série de séances d’information auprès de la population de Montréal-Nord;

consulté « régulièrement ses partenaires et les citoyens du secteur dans le cadre de l’élaboration de son plan d’action afin de tenir compte des besoins et de la réalité de sa communauté en matière de sécurité et de relations avec la police »;

tenu des journées de formation adaptées aux réalités locales dans chaque poste de quartier;

formé l’ensemble du personnel policier sur le « développement des compétences interculturelles »;

offert une journée de formation sur le profilage racial aux nouveaux policiers;

rendu disponible, en 2011, « des capsules vidéo présentant différentes communautés culturelles de Montréal et visant le renforcement des compétences interculturelles du personnel »;

développé et distribué un guide linguistique visant à faciliter les premiers contacts entre policiers et citoyens;

engagé 9 conseillers en concertation civil, dont l’un au PDQ 39, lesquels agissent comme personne ressource et favorisent la concertation et la communication avec les « partenaires »;

l’instauration du « Comité de vigie – Noire ».

Dans sa liste de gestes qu’il entend poser, le SPVM prévoit présenter des capsules vidéo au PDQ 39 sur la population de Montréal-Nord et tenir des ateliers d’information « pour que les citoyens connaissent mieux les services offerts par leur poste de quartier ».

En ce qui concerne la recommandation à l’effet d’examiner la possibilité de doter les véhicules du SPVM de systèmes GPS, le document indique qu’il existe présentement « un système de géolocalisation des ordinateurs véhiculaires des policiers », ajoutant toutefois que celui-ci « présente de grandes limitations ».

Le SPVM entend par là le fait que ce système :

« permet à un seul utilisateur, sur un seul ordinateur installé dans le Centre de répartition, d’avoir accès à la géolocalisation d’un terminal véhiculaire (CF-19) où l’on a déclenché le système d’urgence (10-07) »;

« permet uniquement la géolocalisation du terminal véhiculaire (pas du véhicule directement) »;

« permet au Centre de répartition de localiser seulement un terminal véhiculaire à la fois »;

« ne permet pas de faire de la répartition assistée par la géolocalisation »;

et « n’est pas prêt à recevoir la géolocalisation incluse dans les Walkies-Talkies qui seront bientôt livrés avec le Système évolué de radiocommunication de l’agglomération de Montréal (SÉRAM) ».

Le document permet aussi d’apprendre que le SPVM a adressé une demande au CIST (Comité sectoriel des technologies de l'information) de la Ville de Montréal « pour aller plus loin et permettre de prendre les données de géolocalisation et de les transférer dans une version améliorée du système RAO », c’est-à-dire la répartition assistée par ordinateur.

Pour ce qui est de la recommandation proposant que les radios portatives des policiers puissent émettre et recevoir en continu au moyen d’une action simple, le document précise qu’un patrouilleur est, par défaut, « en écoute (réception) continue du canal sélectionné. Aucune action de sa part n’est requise ».

Le document indique de plus que le SPVM a requis la mise en place d’une fonctionnalité permettant d’émettre en continue dans le cadre du projet SÉRAM et que les résultats relatifs au niveau de faisabilité devraient être connus d’ici la mi-février.

« La problématique étant qu’un policier en émission continue ne doit pas empêcher un autre patrouilleur sur le même canal de signaler une urgence », lit-on.

Enfin, le document se montre plutôt avare d’information en ce qui concerne la recommandation suggérant de rendre publics les indicateurs de performance du Plan stratégique en matière de profilage racial et social (2012-2014) du SPVM, de même que les résultats d’évaluations externes dudit plan et les nouvelles mesures mises en œuvre.

« Le comité expert en matière de profilage racial et social a pour mandat en 2014 d’identifier les indicateurs associés aux trois grandes orientations du plan triennal. Vers la fin 2014, une évaluation du plan stratégique sera effectuée et les résultats seront partagés », se contente-t-on d’écrire.

À LA DIRECTION DE L'ORGANISATION ET DES PRATIQUES POLICIÈRES DU MINISTÈRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE, JE RECOMMANDE :

- qu'un document explicatif du type de celui produit par l'École nationale de police du Québec le 10 octobre 2012 accompagne le modèle national de l'emploi de la force, sujet 2.1.1, Emploi de la force, annexé le 23 août 2012 au Guide de pratiques policières;

- que ledit document explicatif, après consultation auprès de juristes, comporte des indications claires sur la pratique des policiers de prendre l'initiative d'un contact physique sans qu'un individu soit détenu ou arrêté;

- que ledit document explicatif comporte des indications claires quant aux circonstances dans lesquelles un policier peut être autorisé à dégainer, à faire feu et à quel moment il doit cesser les tirs;

- que ledit document explicatif, après consultation auprès de juristes, expose une position claire du ministère de la Sécurité publique sur la pratique et l'enseignement controversés aux policiers patrouilleurs de toujours viser les « centres masses » jusqu'à ce que la menace cesse, sachant que cela conduit à ce que, presque systématiquement, des balles sont tirées inutilement;

- que soient élaborés des principes d'orientation, des pratiques d'application et des considérations, du type de ceux qui s'appliquent dans les cas de poursuite policière d'un véhicule (sujet 2.1.4 du Guide de pratiques policières), lorsque les policiers désirent intervenir auprès d'une personne relativement à la commission d'une infraction pénale provinciale ou municipale ne mettant pas en danger de façon imminente la santé ou la sécurité et que cette personne et les individus qui l'accompagnent sont en surnombre par rapport aux policiers;

- qu'elle s'assure que les corps de police ne munissent pas leurs policiers patrouilleurs d'armes à feu dont la séquence de tir après le premier tir est si rapide que, comme le démontrent les études récentes et des expériences, 3 à 8 balles peuvent être systématiquement tirées en 1 seconde ou 1,5 seconde après que la menace a cessé et avant que le policier le réalise;

Le ministère de la Sécurité publique a communiqué au demandeur deux documents d’une page chacun.

Le responsable de l’accès au ministère a toutefois refusé de communiquer un troisième document au demandeur, en invoquant, à son tour, l’article 37 de la loi sur l’accès à l’information.

Le premier document est une lettre datée du 31 mars 2014 du sous-ministre Martin Prud’homme adressée au Coroner en chef Denis Marsolais.

« Le ministère de la Sécurité publique prend acte des recommandations formulées par le coroner, lesquelles ont été soumises, le 7 février 2014, au Sous-comité consultatif permanent en emploi de la force », écrit le sous-ministre Prud’homme.

« Après avoir analysé les recommandations, le ministère de la Sécurité publique s’assurera que les corps de police soient informés des suites à leur donner, le cas échéant. Nous vous communiquerons également dans les meilleurs délais, les résultats de cette analyse », ajoute-t-il.

Le second document émane de la Direction de la prévention et de l’organisation policière du ministère de la Sécurité publique et décrit sommairement le mandat du Sous-comité consultatif permanent en emploi de la force, lequel se résume à l’analyse des recommandations du coroner Perreault et l’évaluation de leur faisabilité et de leur mise en application.

L’automne 2014 est identifié comme « échéancier », sans autre précision.

Le document permet en outre d’apprendre que les organismes participants au Sous-comité consultatif permanent en emploi de la force sont le ministère de la Sécurité publique, le SPVM, la Sûreté du Québec, le Service de police de la Ville de Québec, le Service de police de Laval, le Service de police de Sherbrooke et l’École nationale de police du Québec.

À L'ÉCOLE NATIONALE DE POLICE, JE RECOMMANDE :

- de prévoir que le programme de formation des patrouilleurs inclue les situations où un policier doit faire face à la situation où son partenaire est attaqué;

- de prévoir que le programme de formation des patrouilleurs inclue les situations où les policiers doivent décider s'ils interviennent auprès d'un groupe d'individus;

- de prévoir que le programme de formation inclue des apprentissages relatifs à l'attrait d'intervenir pour des proches d'un individu lorsqu'une altercation physique se déroule entre un policier et cet individu;

- de prévoir que le programme de formation inclue un volet sur les distinctions à faire entre le profilage criminel, le profilage racial et le profilage social;

- de prévoir un enseignement plus poussé sur les risques véritables d'être désarmé par un citoyen dans le contexte précis des mécanismes de rétention de l'arme dont est doté l'étui;

- de prévoir l'enseignement du désengagement jumelé à la demande de renfort comme technique à privilégier au contact physique lorsque des individus sont en surnombre et que l'intervention concerne une infraction pénale provinciale ou municipale ne mettant pas en danger la santé ou la sécurité de façon imminente;

- de concevoir et de diffuser auprès des corps policiers un outil de débreffage éthique incitant les policiers à rétroagir à des événements dans lesquels ils ont été impliqués en fonction des valeurs qui les ont amenés à agir comme ils l'ont fait plutôt qu'uniquement en fonction des enseignements techniques qu'ils ont reçus.

L’École nationale de police du Québec a communiqué deux documents au demandeur.

Le responsable de l’accès à l’École nationale a cependant refusé de communiquer un troisième document, en basant sa décision sur l’article 39 de la loi sur l’accès à l’information.

Cette disposition stipule qu’un organisme public peut refuser de communiquer une analyse produite à l’occasion d'une recommandation faite dans le cadre d’un processus décisionnel en cours, jusqu’à ce que la recommandation ait fait l’objet d’une décision ou, en l’absence de décision, qu’une période de cinq ans se soit écoulée depuis la date où l’analyse a été faite.

Pour ce qui est du premier document communiqué, celui-ci s’intitule « État de situation – Formation policière en lien avec les recommandations du coroner André Perreault ».

Il s’agit d’un document de sept pages ayant été mis à jour le 17 janvier 2014.

Les premières pages du document offrent un survol général de la formation en techniques policières dispensées dans les cégeps, ainsi que des différentes matières enseignées dans le cadre du Programme de formation initiale en patrouille-gendarmerie de l’École nationale de police du Québec, notamment l’emploi de la force, la formation au tir et l’atelier thématique diversité/profilage.

Ce n’est qu’à la cinquième page que le document entre vraiment dans le vif du sujet, soit les recommandations du coroner Perreault.

En ce qui concerne la recommandation proposant de prévoir que le programme de formation des patrouilleurs inclue les situations où un policier doit faire face à la situation où son partenaire est attaqué, l’École nationale indique que des activités du Programme de formation initiale en patrouille-gendarmerie « traitent de cet aspect dans la formation intitulée SAIR (Système d’analyse d’interventions à risque) ».

« Deux vidéos de simulation ont été réalisés dans un contexte ou le partenaire d’un policier est attaqué. Une simulation porte sur l’attaque au couteau par un rôdeur la nuit, alors qu’une autre porte sur la prise d’otage d’un patrouilleur avec une arme à feu », précise-t-on.

Relativement à la recommandation à l’effet de prévoir que le programme de formation des patrouilleurs inclue les situations où les policiers doivent décider s'ils interviennent auprès d'un groupe d'individus, l’École nationale explique que « tous les futurs policiers reçoivent des formations théoriques et pratiques en matière d’intervention en situation de crise et d’intervention policière, afin de développer chez l’apprenant des habiletés sur le plan :

des comportements sécuritaires;

des techniques de communication;

de l’adaptation de son comportement en fonction de l’évolution d’une situation;

de l’application rigoureuse des protocoles d’intervention, dont les directives de son corps de police;

des dimensions légales, méthodologiques, psycho-socio-communautaires, techniques et éthiques ».

Pour ce qui est de la recommandation suggérant de s’assurer que le programme de formation inclue des apprentissages relatifs à l’attrait d’intervenir pour des proches d’un individu lorsqu’une altercation physique se déroule entre un policier et cet individu, l’École nationale fait valoir qu’il existe des scénarios de simulation d’intervention prenant en compte cette problématique.

« Entre autres, il est prévu une variante de réalité simple qui consiste à l’ajout d’un étudiant cascadeur jouant le rôle d’un proche du suspect en altercation physique avec un policier », lit-on.

En ce qui a trait à la recommandation préconisant que le programme de formation inclue un volet sur les distinctions à faire entre le profilage criminel, le profilage racial et le profilage social, l’École nationale écrit que « tous les futurs policiers sont outillés pour faire la distinction entre le profilage criminel, racial et social grâce à des formations théoriques, des études de cas et des mises en situation ».

« À la suite de mises en situation et d’études de cas, on amène par exemple les futurs superviseurs à évaluer l’impact de comportements racistes au sein de leur équipe de travail », ajoute-t-on.

En ce qui concerne la recommandation consistant à dispenser un enseignement plus poussé sur les risques véritables d’être désarmé par un citoyen dans le contexte précis des mécanismes de rétention de l’arme dont est doté l’étui, l’École nationale évoque l’existence d’un « cours spécifique d’une durée de trois heures » traitant de la « garde et du contrôle de l’arme à feu permettant à l’aspirant policier d’utiliser les techniques appropriées de dégagement selon diverses situations ».

Pour ce qui est de la recommandation prônant l'enseignement du désengagement jumelé à la demande de renfort comme technique à privilégier au contact physique dans les situations décrites par le coroner Perreault, l’École nationale répond en faisant état de la notion de « repositionnement tactique ».

« S’il le juge tactiquement approprié, l’aspirant policier est formé pour envisager le repositionnement tactique dans le but de contenir et d’évaluer la situation, et de considérer d’autres solutions comme rechercher la protection d’une barricade, attendre du renfort, faire appel à des escouades spécialisées, etc. », lit-on.

Enfin, en ce qui a trait à la recommandation mettant de l’avant la conception et diffusion auprès des corps policiers d’un outil de débreffage éthique, l’École nationale affirme qu’elle offre « trois activités en éthique » aux aspirants policiers.

« Au niveau du perfectionnement professionnel, le développement de la formation Débriefing opérationnel en emploi de la force, qui répond à cette préoccupation, a été ajouté au portefeuille de développement pour l’année 2013-2014 », peut-on lire.

« L’École accueille favorablement les recommandations du coroner », lit-on également sous la rubrique « actions futures ».

Ainsi, l’École nationale entend « analyser le rapport d’enquête avec les comités d’experts composés de collaborateurs internes et de partenaires externes qui existent déjà dans différents domaines », soutenir le ministère de la Sécurité publique « dans l’analyse des recommandations le concernant », « évaluer la pertinence d’améliorer ou d’ajouter des éléments de formation en lien avec les recommandations », « évaluer d’ajouter à la formation certaines réalités complexes dans le domaine de l’emploi de la force » et « organiser des rencontres de travail avec les partenaires collégiaux afin de s’assurer d’une harmonisation complète des éléments en lien avec les compétences touchées par l’événement ».

Le second document est un extrait de Rapport annuel de gestion 2010-2011 de l’École nationale de police du Québec.

Naturellement, comme le document a été rédigé trois ans avant la publication du rapport d’enquête publique, l’extrait communiqué au demandeur n’apporte aucune information utile relativement au suivi des recommandations du coroner Perreault.

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À la lumière des documents obtenus via l’accès à l’information, il apparait encore trop tôt pour dire combien des recommandations du coroner Perreault seront réellement mises en œuvre.

En fait, la loi sur l’accès à l’information étant ce qu’elle est, il est même probable qu’il faudra attendre encore plusieurs années, voire toute une décennie dans certains cas, avant que certains documents traitant de ces recommandations ne deviennent accessibles au public.

Il vaut d’ailleurs la peine de souligner que l’École nationale de police du Québec, ainsi que les ministères de la Santé et de la Sécurité publique, n’avaient aucune obligation, en vertu de la loi sur l’accès à l’information, de refuser l’accès aux documents en question.

En effet, les articles 36, 37 et 39 de la loi sur l’accès invoqués par ces trois organismes pour fonder leur refus n’étaient pas impératifs, de sorte que les responsables de l’accès pour l’École nationale, les ministères de la Santé et de la Sécurité publique jouissaient d’un pouvoir discrétionnaire leur permettant de décider, à eux seuls, s’ils communiquent ou non les documents au demandeur.

En d’autres mots, ces trois organismes ont fait le choix de privilégier l’opacité au détriment de la transparence… dommage !

Cela étant, les documents obtenus auront au moins eu le mérite de révéler que certains organismes publics semblent avoir pris davantage au sérieux que d’autres les recommandations du coroner Perreault.

Comme on l’a vu, l’École nationale de police du Québec, de même que les ministères de l’Éducation et de la Sécurité publique, ont tous les trois soumis les recommandations que leur a adressées le coroner Perreault à des comités de travail.

Il est cependant pour le moins regrettable de constater que les milieux policiers pèseront de tout leur poids dans la suite qui sera donnée aux recommandations du coroner Perreault adressées au ministère de l’Éducation.

La société civile ne devrait-elle pas avoir un plus grand mot à dire au sujet des notions de rapports à l’autorité policière devant être enseignés aux jeunes élèves qui incarnent la société québécoise de demain ?

Cela étant, la volonté manifestée jusqu’à présent par l’École nationale de police du Québec et les ministères de l’Éducation et de la Sécurité publique de procéder à un réel suivi des recommandations du coroner contraste grandement avec l’attitude de la Ville de Montréal et de l’arrondissement de Montréal-Nord.

En effet, aucun des documents communiqués ne permettent de croire que la seule et unique recommandation que le coroner Perreault a formulé à l’endroit de ces deux organismes ait été analysé en comité, ni même par quiconque.

En fait, la Ville de Montréal n’a même pas fait d’effort pour essayer de sauver la face, par exemple, en produisant un plan d’action bidon pour ensuite quémander des fonds auprès de Québec et Ottawa afin financer le tout.

On voit bien à quelle enseigne logent les priorités de la Ville de Montréal lorsque le suivi relatif au rapport du coroner Perreault s’arrête aux recommandations adressées au service de police de la municipalité pour ignorer complètement celle concernant la lutte à la pauvreté et l’exclusion sociale : tout pour la police, rien pour les pauvres !

L’attitude de la Ville de Montréal est d’autant plus aberrante quand on connait le parcours politique de Denis Coderre, l’actuel maire de la métropole.

On se rappellera en effet qu’au moment de la sortie du rapport du coroner Perreault, en décembre 2013, Denis Coderre assumait la fonction de maire de la Ville de Montréal depuis un mois.

Et qu’avant d’être élu maire, Denis Coderre avait représenté les citoyens de Montréal-Nord à la Chambre des communes à titre de député fédéral de la circonscription de Bourassa, de 1997 à 2013.

Mais comment s’étonner du je-m’en-foutisme de la Ville de Montréal à l’égard de la recommandation la concernant quand on sait toute l’énergie déployée par ses propres avocats pour mettre des bâtons dans les roues du coroner Perreault pratiquement tout au long de l’enquête publique.

Ceux et celles qui ont suivi l’enquête publique se rappelleront sans doute de l’opposition farouche de Me Pierre-Yves Boisvert, principal procureur de la Ville de Montréal, au dépôt du rapport du criminologue du SPVM, Mathieu Charest, sur les pratiques d’interpellation de la police montréalaise dans les quartiers multi-ethniques de la métropole.

Ou encore la contestation de la Ville de Montréal devant la Cour supérieure du Québec de la décision du coroner Perreault de permettre la tenue d’un débat sur les mécanismes de sécurité de l’étui à pistolet de l’agent Jean-Loup Lapointe, une procédure qui eut pour effet de paralyser l’enquête publique pendant deux longues années.

Et après avoir activement entravé les travaux coroner Perreault, voilà maintenant que la Ville de Montréal se lave les mains de la seule recommandation qui lui a été adressé dans le rapport d’enquête publique.

De toute évidence, le maire de Montréal, Denis Coderre, a tourné le dos à la population de Montréal-Nord… cette même population qui l’a pourtant réélue à cinq reprises lorsqu’il était député libéral fédéral.

La nonchalance de l’arrondissement de Montréal-Nord par rapport à la recommandation du coroner Perreault est tout aussi condamnable.

Comment l’arrondissement de Montréal-Nord peut-il se permettre d’agir comme s’il ne se sent pas concerné par la recommandation que le coroner Perreault a pris la peine de lui adresser alors que le rapport d’enquête publique portait sur un incident tragique survenu sur son propre territoire… incident ayant lui-même été suivi, le lendemain, d’une importante émeute toujours dans l’arrondissement de Montréal-Nord !

En outre, compte tenu que le traitement des demandes d’accès a connu des ratés, tant dans le cas de la Ville de Montréal que dans celui de l’arrondissement de Montréal-Nord, il y a lieu de se demander s’il s’agit là d’une vulgaire coïncidence ou plutôt d’une tentative de cacher le fait que les autorités politiques municipales ont fait le choix d’ignorer la recommandation du coroner.

Chose certaine, si la Ville de Montréal et l’arrondissement de Montréal-Nord ont tous décidés d’opter pour la politique de l’autruche, il reste que les problèmes de pauvreté et d’exclusion ne disparaitront pas du jour au lendemain simplement du fait que les dirigeants politiques municipaux ont enfoui leur tête dans le sable.

À l’opposé, il convient de relever que d’autres organismes n’ont pas attendu la publication du rapport du coroner Perreault avant de mettre en place certaines mesures.

Il faut dire que le rapport l’enquête publique sur le décès de Fredy Villanueva s’est fait attendre pendant plusieurs années, donnant ainsi amplement le temps à certains organismes, comme le ministère de la Santé, de mettre en place les recommandations préconisées par le coroner Perreault.

Le discours à saveur auto-promotionnelle servie par l’École nationale de police du Québec dans son document mérite cependant d’être prit avec un grain de sel.

On est en effet en droit de se questionner sur l’efficience réelle de l’enseignement prodigué par l’École nationale aux aspirants policiers relativement au repositionnement tactique et au profilage racial, deux notions qui sont encore loin de faire l’unanimité au sein des rangs policiers eux-mêmes.

Ainsi, le fait que l’École nationale n’ait pas attendu le dépôt du rapport du coroner Perreault avant d’ajouter de telles notions à son programme de formation ne nous dit rien, par exemple, sur le nombre d’heures consacrées à inculquer ces matières à ses étudiants, ni sur la manière que ces problématiques sont abordées par les enseignants ou encore l’accueil qu’elles reçoivent chez les cohortes d’aspirants policiers.

Sources :

(1) Guide de Montréal-Nord, no. Vol: 57 No: 22, « Un nouveau plan de développement social pour Montréal-Nord », Frédérique Charest, 3 juin 2014, p. 8.

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