- Extrait GEAB N°84 (15 avril 2014) -
Notre équipe présente ici un scenario très sombre correspondant à un danger d’évolution qui a toujours été là mais dont la probabilité était
équilibrée, voire inférieure, à celle d’une transition hors de la sphère d’influence américaine vers un monde multipolaire à l’émergence duquel
l’Europe pouvait contribuer utilement. La crise ukrainienne a enclenché un déraillement de l’Europe qui fait désormais exploser le risque d’une dérive
de l’Europe hors des voies d’avenir, de paix, d’indépendance et de démocratie à une probabilité inquiétante que nous évaluons à 85%. À ce titre, il
mérite d’être présenté en détail.
Dans le GEAB N°1 de janvier 2006, Franck Biancheri (coordinateur de la publication jusqu’à
son décès en octobre 2012) décrivait la séquence suivante des étapes de la crise :
1. Crise de confiance en le dollar
2. Crise des déséquilibres financiers US
3. Crise pétrolière
4. Crise du leadership américain
5. Crise du monde arabo-musulman
6. Crise de la gouvernance mondiale
7. Crise de la gouvernance européenne
Le fait est que c’est bien à cette dernière étape de la liste d’événements anticipés par Franck Biancheri dès janvier 2006 que nous nous situons. Et,
depuis plusieurs mois déjà, le GEAB s’attache à rendre compte de la crise politique qui frappe désormais l’Europe en décrivant l’effondrement du cadre de
gouvernance post-Traité de Maastricht et en tentant de montrer qu’une piste de résolution de crise existe bien et qu’elle se situe du côté de l’Euroland.
Si l’on se demande pourquoi cette liste s’arrêtait à cette étape de crise politique européenne, la situation actuelle nous donne la réponse : autant les
étapes précédentes s’enchainent les unes aux autres logiquement, autant selon la nature du dénouement de la dernière des scenarii radicalement différents
s’ouvrent pour la suite des événements. L’UE va-t-elle imposer son effondrement ou les logiques d’avenir eurolandaises parviendront-elles à trouver leur
chemin ?
L’EUROPE À LA CROISÉE DES CHEMINS
A PRIS LE MAUVAIS
Depuis plusieurs mois également, nous évoquons l’idée d’une Europe à la croisée des chemins. Par ailleurs, LEAP en général préconise depuis longtemps un
rapprochement Euro-BRICS comme condition d’une coopération non-conflictuelle entre les différents pôles mondiaux. Mais aujourd’hui, l’Europe a commencé à
perdre le sens de son destin, de ses responsabilités et de ses valeurs… en même temps que son indépendance et ses promesses de paix.
Nous avons abondamment décrit dans le précédent numéro les conséquences néfastes pour l’indépendance de l’Europe de la construction d’un nouveau rideau de
fer sur sa frontière orientale. Un mois plus tard, la rhétorique de la guerre froide continue à être exploitée par l’ensemble de notre classe politique, de
nos médias et de la bureaucratie bruxelloise.
Les hypothèses que nous avons posées il y a un mois[1] demeurent : dans le cadre des négociations relatives à
la signature d’un accord de libre-échange UE-Ukraine, les Occidentaux, États-Unis en tête, ont obligé l’Ukraine à choisir son camp en rejetant la
proposition constructive russe pour une négociation tripartite (russo-ukraino-européenne) qui aurait permis de trouver un accord satisfaisant pour toutes
les parties de facto concernées. Obligée à choisir, l’Ukraine s’est divisée et a perdu sa liberté et son statut de pays-tampon, garant de relations fluides
entre Europe et Russie. De cette situation découle logiquement la confrontation Europe-Russie, accentuée par les positions belliqueuses et autoritaires des
États-Unis intervenant sans cesse en la matière, déséquilibrant les relations extérieures européennes et poussant l’UE dans les bras des États-Unis-OTAN.
Retour sur le devant de la scène des logiques parfaitement anachroniques de guerre froide et d’une OTAN en perte caractérisée de vitesse depuis la chute du
Mur ; augmentation considérable des chances de signature d’un TTIP perdu d’avance dans le contexte antérieur ; ouverture de pistes tous azimuts en matière
de partenariat énergétique UE-US, etc. Bipolarisation du monde à l’heure du multipolaire[2], américanisation
de l’Europe au moment où les scandales liés à la NSA étaient sur le point d’acter son désalignement, émergence d’une nouvelle idéologie « occidentaliste »
contrevenant à tous les principes de globalisation tant vantés par l’Occident et peu à peu adoptés par le reste du monde, un rideau de fer tombe à nouveau
sur l’Europe avec la complicité active de la plupart de nos gouvernements.
LA « DÉSAMÉRICANISATION » DE L’EUROPE
N’A PAS EU LIEU
Car, contrairement à ce que le « débat public » sur la crise ukrainienne semble indiquer, la vraie question n’est pas de savoir si Poutine a eu tort ou
raison de récupérer la Crimée, mais comment peut-on accepter que les États-Unis s’ingèrent à un tel degré dans les affaires étrangères européennes [3] ?
On se souvient en effet du silence retentissant des gouvernements nationaux face à la folie guerrière qui s’est emparée de Bruxelles et de nos médias le
mois dernier. Aujourd’hui la situation s’est empirée : nos gouvernements ne sont plus seulement silencieux, ils participent activement à l’œuvre de
division. La France demande l’annulation du sommet UE-Russie[4], les pays baltes demandent l’installation de
troupes de l’OTAN sur leurs territoires[5], la Pologne diminue ses importations russes en gaz[6], la Finlande et la Suède font mine de paniquer à l’idée d’une invasion russe de leurs pays [7]… L’intox est à son comble, désormais emmenée par de nombreux gouvernements nationaux, et toujours ce
silence de la part des autres…
L’appel chinois à la « désaméricanisation du monde » nous revient ainsi en mémoire. La mise en garde a été suivie d’effets dans certains pays : le grave
différend diplomatique entre l’Inde et les États-Unis[8] ou le sommet CELAC en Amérique du Sud [9] sonne le glas de l’influence US dans ces zones stratégiques majeures. La crise des écoutes de la NSA
fournissait l’occasion de se dégager des circuits d’influence américaniste présents dans les appareils de nos États, et a d’ailleurs été utilisée dans ce
sens jusqu’à la crise ukrainienne[10].
POLOGNE, ITALIE,
QUELQUES CAS CONCRETS DE RÉ-AIGUILLAGE
En revanche, on peut suivre assez précisément le basculement d’autres pays dans le camp occidentaliste.
Le cas de la Pologne est emblématique. Au terme du règne des très atlantistes frères Kaczyński, l’élection de Donald Tusk comme Premier Ministre en 2007 semblait signaler la sortie de la Pologne de l’ère
post-chute du Mur. Le nouveau dirigeant mène une politique résolument pro-européenne, anti-missiles américains et travaille à restaurer les liens avec la
Russie… jusqu’en juillet 2008. C’est à cette date qu’il refuse pour la dernière fois l’installation du bouclier anti-missile que les États-Unis n’ont de
cesse de lui imposer. Car en août 2008, il capitule et déclare que « grâce au bouclier, l’Amérique et la Pologne seront plus en sécurité ». Quels arguments
ont bien pu retourner Donald Tusk sur une position aussi capitale ? Mystère. Quoi qu’il en soit, la Pologne de M. Tusk a joué et joue encore un rôle
primordial dans l’escalade de tensions Euro-Russes[11].
Plus récemment, le coup d’État de Matteo Renzi en Italie, véritable porte-avion de l’OTAN, assure
certainement les États-Unis d’une bonne coopération avec ce pays. Renzi est un homme de gauche de l’étoffe des Clinton, Blair, Schröder, Obama,
Strauss-Kahn, etc. : gauche acquise aux thèses néo-libérales d’inspiration anglo-saxonne, bien pratique pour passer les mesures anti-sociales qui
provoquent des levées de bouclier lorsqu’elles viennent de la droite. La LSE le qualifie d’ « ami de l’Amérique et européiste » [12], une combinaison qui fait désormais frémir.
ÉTRANGES RECONFIGURATIONS
DU GOUVERNEMENT FRANÇAIS
Encore plus récemment, le revirement à 180°[13] de toute la politique française entamée par François
Hollande est un vrai sujet d’inquiétude. La gravité pour le PS des résultats des municipales a clairement été exagérée par les médias (mais avec le
consentement du gouvernement car aucune voix ne s’est élevée à gauche pour faire remarquer que dans un contexte de crise majeure et d’impopularité
chronique, la sanction pour le PS n’avait rien de très sérieux) dans le but de forcer un remaniement ministériel. On doit donc se demander dans quel
intérêt ce remaniement a eu lieu et l’examen attentif des CV et de la nouvelle organisation s’impose.
Ce qui inquiète notre équipe, c’est le profil très Clinton-Schröder-Blair-Obama-Renzi de Manuel Valls[14]
qui s’engage déjà en faveur de la politique de baisse des impôts[15], d’endettement et d’ « expansionnisme
» de la BCE[16] caractéristique de la logique FMI-Washington et contraire à la prudente doxa professée par
l’Allemagne-BCE consistant à réduire l’endettement (nous revenons sur cette analyse plus loin).
Il y a également ce surprenant transfert du commerce extérieur du Ministère de l’Économie au Ministère des Affaires Étrangères [17] qui fait sortir les questions commerciales – telles que le TTIP par exemple – du ressort de la
politique nationale, permet sans doute de mieux court-circuiter les passages obligés par l’Assemblée Nationale et renforce les influences étrangères sur le
dossier... sans compter que les Affaires Étrangères restent aux mains de Laurent Fabius dont l’atlantisme
n’est pas un secret.
Le troisième point qui nous chiffonne concerne le passage du Secrétariat général des affaires européennes (SGAE) sous la coupe de l’Élysée [18]. Ce changement peut être une bonne ou une mauvaise nouvelle : il sort la politique européenne de la
France d’un Matignon beaucoup plus indépendant que la précédente version pour la mettre sous le contrôle direct et renforcé du chef de l’État ; mais il
permet aussi aux décisions en la matière de contourner le contrôle parlementaire auquel les décisions du Premier Ministre sont soumises, contrairement à
celles de la Présidence. On voudrait court-circuiter la démocratie pour accélérer l’adoption du TTIP, par exemple, qu’on ne s’y prendrait pas autrement. En
la matière, notre équipe estime qu’il est trop tôt pour juger si cette dernière mesure en particulier correspond à une stratégie de combat contre des
pressions anticipées ou au contraire le symptôme d’une capitulation face à ces mêmes pressions.
UNE ALLEMAGNE TIRAILLÉE DE TOUS CÔTÉS
Du côté allemand, la situation est particulièrement illisible, probablement aussi en raison du manque d’objectivité de l’interprétation que font les médias
des événements. Le patron de la Bundesbank, Jens Weidmann, actant du risque de déflation en zone euro, semblait être brutalement devenu favorable à une
politique d’assouplissement quantitatif de la part de la BCE le 25 mars[19], pour expliquer quelques jours
plus tard les différences notables entre le QE des BOE, BOJ et autres Fed[20], et déclarait le 10 avril que
le risque de déflation était en fait encore très faible[21]... mais que, si l’euro forcit trop, il faudra
recourir à de l’assouplissement[22]… On devine des pressions énormes derrière une telle inconstance… chez
un banquier allemand de surcroît ! Schaüble, le Ministre des Finances, résiste et continue à se battre pour un renforcement du contrôle politique et
démocratique de l’Euroland, préconisant la création d’un Parlement de la zone Euro[23]. Merkel en revanche,
après avoir tenté d’élever sa voix contre les sanctions de la Russie, est désormais de plus en plus inaudible. Steinmeier, des Affaires Étrangères, vient
quant à lui de surprendre tout le monde en déclarant devant un parterre de patrons d’entreprises résolument opposé aux sanctions contre la Russie qu’il
n’était plus possible de commercer comme avant avec les Russes[24]. Combien de temps encore l’Allemagne
tiendra-t-elle ?
PEUR DE L’AVENIR
ET RESSERREMENT DU CAMP OCCIDENTAL
À ce stade, nous devons comprendre quels sont les ressorts de ce qui ressemble tant à une capitulation en rase campagne des élites européennes
(fonctionnaires, politiques et journalistes). En effet, toute cette classe politico-médiatique ne peut être subitement devenue traîtresse à la cause
européenne. Elle doit donc se sentir justifiée dans sa démarche de réorientation stratégique aussi radicale. Mais quelles peuvent être ces justifications ?
Les ressorts sont innombrables mais ceux qui nous intéressent sont ceux susceptibles d’avoir convaincu le sommet de la pyramide européenne. Or, notre
équipe a identifié deux évolutions dont la combinaison mise en perspective peut avoir effrayé nos responsables.
Côté américain, il y a ce fameux « taper » dont nous avons montré en février qu’il marquait l’échec de la politique précédente de surendettement et
signalait l’enclenchement d’un processus d’explosion du dollar[25]. Côté européen, il y a cette hantise
d’une déflation[26] qui réduirait à néant les efforts de bonne gestion des Européens ces dernières années.
Ce double contexte a donné la main aux occidentalistes de Bruxelles et de Washington qui ont ainsi trouvé les arguments pour convaincre de l’impérieuse
nécessité d’une alliance de fer entre l’Europe et les États-Unis, alliance dont on voit malheureusement qu’elle ne peut se faire que contre le reste du
monde (un constat qui à lui seul aurait dû éliminer cette prétendue piste de solution) : vous, Européens, êtes à la limite de l’explosion avec votre
austérité génératrice de ralentissement et de déflation… si le dollar s’effondre, vous ne résisterez pas… unissons donc nos forces pour nous sauver
ensemble ! Établissons une vaste zone de libre-échange Euro-Dollar (ou plutôt EuroDollar-Dollar puis Dollar-Dollar [27], car il s’agira alors inévitablement d’un Euro partie intégrante à la zone Dollar) permettant de
continuer à faire tourner les gigantesques quantités de monnaie en circulation ! Réorganisons le marché énergétique sur une logique d’autarcie au sein du
camp occidental (à coup de fracking sur tout le territoire) ! Mettons en place un monde fermé et « entre amis », fonctionnant sur les principes connus du «
monde-d’avant », loin de la complexité du monde multipolaire qui nous fait perdre la main (ce qui est vrai pour les US mais pas pour l’Europe) et de leur
concurrence déloyale !
Et en plus, nous tenons ainsi le moyen de restructurer notre dette, c’est-à-dire d’effacer notre ardoise, à bon compte. Il n’échappera à personne en effet
que l’Occident contre les émergents, c’est aussi le camp des débiteurs contre le camp des créanciers. Or, qui veut noyer son chien l’accuse de la rage, et
qui ne veut plus rembourser son voisin le traite d’ennemi.
DE L’OCCIDENTALISATION DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES ET TRANSNATIONALES…
OU DE LEUR EXPLOSION
Bien sûr, seules des logiques martiales peuvent présider à ce genre d’évolution, et cela constitue une excellente nouvelle pour l’OTAN qui croupissait
d’ennui, d’inutilité et d’obsolescence depuis la fin du Rideau de Fer. Il est d’ailleurs intéressant de noter que l’OTAN et l’UE, tous deux composés de 28
États membres, dont la plupart sont en effet les mêmes, dont les sièges sont tous deux situés à Bruxelles, dotés de prétendues assemblées parlementaires [28] qui ne représentent personne… semblent avoir combiné leurs agendas. François Ruffin a écrit un livre
pour savoir s’il fallait faire sauter Bruxelles[29]. Il a répondu que « non » ; il s’est trompé. Le
problème de l’Europe, c’est vraiment ce ghetto d’institutions non-démocratiques, technocratiques, monolingues, fermées sur elles-mêmes et déconnectées des
réalités européennes, qui vient aspirer les chancelleries des États membres dans son idéologie de survie. Notre équipe en sait quelque chose pour avoir
travaillé de 2002 à 2006, dans le cadre de son projet de réflexion/anticipation EuroRings[30], à faire
germer l’idée d’un déploiement de la géographie institutionnelle de l’UE sur un cercle de grandes capitales européennes pour désenclaver l’UE et permettre
sa démocratisation et son appropriation par les Européens.
En matière militaire, nous avons vu le mois dernier que la crise ukrainienne pourrait éventuellement servir l’annulation des coupes budgétaires récemment
imposées au Pentagone. Notre équipe suit donc régulièrement les nouvelles sur ce point mais, pour le moment, il ne semble être question de rien de tel. Ce
qui est apparu dans nos écrans en revanche, c’est le débat sur la réaugmentation des contributions des États-Unis aux organisations internationales de type
ONU[31]. En nous attardons sur ces questions, nous avons découvert d’intéressantes tractations qui peuvent
se résumer de la sorte : l’Ukraine par exemple a révélé un problème pour les États-Unis, à savoir qu’ils n’ont plus les moyens de leur politique. Empêcher
la Russie de prendre de l’influence sur l’Ukraine, oui ; éviter la banqueroute du pays, non : qui va payer ? l’Europe ? le FMI ? En tous cas, pas les
États-Unis qui n’ont en tout et pour tout proposé que 1 milliard sur les 35 dont l’Ukraine aurait besoin pour payer ses factures [32]… à la Russie d’ailleurs. Côté armée, c’est un peu la même chose : les coupes budgétaires brisent les
ailes du Pentagone.
Alors une stratégie à moindre frais pourrait consister à (re-)prendre le contrôle des organisations internationales que sont le FMI (pour financer
l’Ukraine) ou l’ONU (pour récupérer le contrôle des forces d’interposition). Pour ce faire, il est en effet de bon ton de commencer par réaugmenter sa
quote-part qui n’a cessé de baisser en valeur absolue (faute de moyens) et relativement à l’arrivée de nouveaux membres. Premier problème : le Congrès s’y
refuse[33]. Deuxième problème : pour doter ces organisations de l’argent des autres, argent bien utile pour
mener à bien ses politiques, il faut aussi leur céder du pouvoir ; mais, bien entendu, les Russes ou les Chinois ne vont pas accepter de doter des
organisations qui mèneraient des politiques allant à l’encontre de leurs intérêts. Cette tentative de récupération des organisations
occidentalo-occidentales du XXème siècle pour le compte des intérêts occidentalistes est vouée à l’échec car, inévitablement, elle fera fuir les
membres non-occidentaux et ce qui restera, s’il reste quelque chose, n’aura plus rien d’international… sans compter que ce n’est pas l’Occident en crise
qui dotera généreusement ces organisations nouvelle-mode.
DE L’OCCIDENT À L’OCCIDENTALISME
L’anticipation politique est là pour nous rappeler que lorsqu’un système ne parvient plus à s’adapter aux tendances historiques profondes (et l’émergence
de nouveaux pôles est une tendance historique profonde caractéristique du XXIème siècle), le temps se fige et s’enkyste pour laisser place à ces
ères de pierre dont l’Histoire est coutumière, régimes totalitaires idéologiques en tous genres, qui se dénouent généralement dans le sang pour permettre
aux tendances de reprendre leur cours.
Ce qui distingue la chute du communisme d’État de la fin des années 80 de l’effondrement du monde américain de la fin des années 2010, c’est que le premier
correspond à la fin d’un système idéologique et au retour des régions concernées dans le monde réel, alors que dans le second cas, c’est bien le contraire
qui se produit : le monde américain était tout simplement un système dominant, adapté aux caractéristiques de son temps, surfant sur les dynamiques réelles
d’échanges et de relations[34]. Mais le monde américain qui naviguait sur la réalité imposée par le
caractère bipolaire de la planète a commencé à dérailler de la réalité en général avec la transformation profonde de cette réalité en 1991. En vingt ans,
le système s’est mis à dysfonctionner de plus en plus gravement. La crise systémique globale enclenchée en 2008 correspondait à la fois à la sortie de
piste naturelle de ce système (en négatif) et à l’apparition de nouvelles caractéristiques structurelles (en positif).
L’Europe, quant à elle, trouvait facilement sa place dans ces nouvelles caractéristiques, nous l’avons souvent dit, et son insertion dans le nouveau
paradigme était même susceptible d’aider les États-Unis, naturellement les plus perdants de la transition, à trouver leur place dans la nouvelle
configuration.
Mais les voies empruntées actuellement nous éloignent de ce scénario. À sa place, nous voyons se mettre en place une tentative de retour en arrière, vers
un monde bipolaire articulé sur une confrontation. Et cette fois-ci, c’est l’Occident qui est du mauvais côté du Rideau, qui doit mettre en place une
idéologie, l’ « occidentalo-démocratisme » (ou quelque chose comme ça), pour justifier l’érection d’un système fermé paranoïaque.
DE LA DÉMOCRATIE AU DÉMOCRATISME
Si le mot « démocratie » est utilisé à tout bout de champ, c’est de facto dans une déconnexion complète entre peuples et élites politico-administratives
que nous entraînent les évolutions actuelles. En effet, sur de nombreux points, les peuples dérangent maintenant ces élites :
– tout d’abord, la déconnexion n’est pas récente et le transfert des compétences au niveau européen qui n’a pas été accompagné du transfert des pouvoirs
politiques cristallise depuis le Traité de Maastricht le divorce entre élites et peuples ;
– depuis 2008, la crise renforce encore ce sentiment d’impuissance des citoyens européens face aux cures qui leur sont administrées par des bureaucrates
qu’ils n’ont pas élus ou des élus qui ne défendent plus leurs intérêts.
Mais jusque-là, une interaction politiques-administrés était encore de mise. Avec la crise ukrainienne, on change de dimension :
– les postures martiales et le déploiement de troupes militaires aux frontières de l’Europe pour des « raisons (d’État) auxquelles la raison (citoyenne)
échappe » ne se fait pas sans qu’un certain sentiment d’abandon ne s’empare du citoyen lambda ;
– l’ingérence constante de Washington dans des affaires purement européennes, visible depuis le débat de la crise ukrainienne, ne manque pas de poser des
questions angoissantes aux Européens sur l’indépendance et l’identité des pilotes de l’UE ;
– une BCE en passe d’opter pour un recours aux méthodes américaines d’assouplissement quantitatif décriées depuis 6 ans et dont on peut en effet constater
aujourd’hui l’inefficience, provoque inévitablement une forte suspicion ;
– les manœuvres employées pour accélérer la signature du fameux TTIP (nous revenons sur ce sujet plus loin), envers et contre tous les avis (consommateurs,
défenseurs des libertés, patrons d’entreprises, etc.), achèvent de ranger les machinations du système dans la catégorie « trahison » des intérêts
collectifs européens les plus évidents.
NON, LA SIGNATURE DU TTIP N’EST PAS MOTIVÉE
PAR L’INTÉRÊT DES EUROPÉENS
Attardons-nous quelques instants sur ce TTIP dont la Commission européenne prétend qu’il nous fera gagner 120 milliards d’activité économique
supplémentaire. La première remarque qui vient à l’esprit, c’est « comment la facilitation d’échanges avec le marché atone de 250 millions de consommateurs
américains au détriment de notre accès aux marchés multimilliardaires et en pleine expansion des émergents pourrait-elle être une bonne affaire ? » Car le
problème est là : nous voyons bien que le TTIP nous coupe des Russes pour commencer, puis des BRICS[35] qui
resserrent leurs liens entre eux en réaction logique aux postures agressives de l’Occident[36].
Par ailleurs, les échanges commerciaux entre les États-Unis et l’Europe bénéficient déjà depuis longtemps de très faibles barrières douanières (rarement
plus de 3%)[37]. Ce n’est donc pas aux barrières tarifaires que s’attaque le TTIP mais aux protections
légales, celles que l’Europe s’est construites pour protéger son marché de produits toxiques notamment. Depuis des décennies, les Européens se sont créé un
marché notamment alimentaire répondant à des normes sanitaires très strictes réduisant le plus possible les OGM, les hormones, les produits chimiques en
tous genres,… normes que nous nous appliquons à nous-mêmes… et bien sûr aux produits d’importation. C’est grâce à cette normalisation que les Européens
bénéficient de l’alimentation la plus contrôlée et la plus saine de la planète, que ces normes s’imposent au reste du monde, qu’elles tirent donc vers le
haut pour le plus grand profit des consommateurs du monde entier, et que l’Europe s’est construit l’image justifiée d’un producteur de produits
alimentaires de grande qualité s’exportant donc facilement. L’objectif du TTIP est donc simple : abaisser le niveau de normalisation pour le rendre
compatible avec celui des États-Unis… La conséquence de cette dérégulation sera de rendre les produits US accessibles à notre marché, des produits
inévitablement compétitifs en termes de prix compte tenu de leur moindre qualité, qui tireront à moyen terme vers le bas la qualité de la production
alimentaire européenne et feront s’effondrer leur compétitivité qualitative… on comprend mieux pourquoi les patrons d’entreprise allemands, par exemple, se
sont affichés contre le TTIP dès l’origine.
Objet des attaques contre le TTIP, l’ISDS (Investor-State Dispute Settlement)
donne un avantage exorbitant aux entreprises sur les États en cas de litige[38]. Côté européen, il y a
encore peu de temps, on demandait à ce que cette clause soit tout simplement éliminée de l’accord mais, côté américain, il n’en était pas question.
Désormais, les Européens se sont pliés et entreprennent de « convaincre » la société civile des bienfaits de l’ISDS dans le cadre d’une
consultation/explication très transparente[39].
De nombreuses autres raisons mobilisent les associations de citoyens, de consommateurs et d’entrepreneurs contre le TTIP [40]. Mais selon notre équipe, une caractéristique se dégage de la description précédente qui condamne en
effet ce Traité, c’est qu’il apparaît clairement comme un outil au service des exportations américaines avant toute autre chose. Obama, par ses tentatives
de court-circuitage du Congrès via l’invention de mécanismes dits « fast-track » en dit
en effet long sur le caractère vital de ce TTIP pour Washington, bien plus que pour l’Europe. On imagine d’ailleurs aisément les puissances à l’œuvre
derrière ce Traité, au premier rang desquels l’immense Monsanto[41].
TOUT DROIT VERS UNE ESCALADE
DES TENSIONS UE-EUROPÉENS
Le sentiment croissant d’une trahison d’élites européennes n’œuvrant plus qu’à l’intérêt de puissances étrangères ou économiques multinationales exacerbe
donc inévitablement la grogne des Européens. La récente explosion d’une bombe à Athènes au pied des bâtiments de la troïka [42], les manifestations à Bruxelles contre l’austérité[43]
et le TTIP avec des mots d’ordre aussi explicites que « Europe: owned by wolves, governed by dogs », les manifestations de plus en plus brutalement
réprimées et désormais hors-la-loi[44] en Espagne notamment, … révèlent l’affolement d’une société civile
qui ne sait littéralement plus à quels saints se vouer. Et tout le problème est là en effet : ce que les médias interprètent et instrumentalisent comme un
sentiment anti-européen correspond à la prise de conscience graduelle que se plaindre auprès de nos gouvernements n’offre pas beaucoup de chances de
succès… moins par surdité de ces derniers que par impuissance. Mais auprès de qui se plaindre ? L’Europe ? « Qui dois-je appeler si je veux appeler
l’Europe »[45] !
Mais l’étape qui semble être en train d’être franchie consiste en ceci que les dirigeants UE et États membres, en quête de leviers de pouvoirs mais
incapables de les trouver auprès de leurs « administrés », se détournent désormais résolument des citoyens et se rapprochent d’un nouveau levier de pouvoir
: Washington qui leur fournit la direction commune, au lieu de l’intérêt collectif européen, à même de les structurer et de leur redonner la sensation du
pouvoir-faire (en l’occurrence le « pouvoir-créer un vaste marché transatlantique », le « pouvoir-se trouver un ennemi », le « pouvoir-faire acte de force
militaire »…). C’est l’extrême-droite que l’on craignait de voir remplir le vide politique européen. Et bien, dans un premier temps tout au moins [46], nous aurons un régime de « collaboration » qui nous en apprend sans doute sur les ressorts à l’œuvre
dans la tentation des élites européennes pendant la deuxième guerre mondiale : lorsque les classes dirigeantes sont déconnectées de leurs peuples, il n’y a
qu’en collaborant avec le fort du moment qu’elles peuvent se redonner la griserie du pouvoir… une sensation à laquelle aucun politique de moyenne catégorie
n’est capable de résister[47].
Les dirigeants des États membres en partenariat avec les fonctionnaires de Bruxelles se mettent donc en rang serré sous la houlette de Washington. Et nous
allons maintenant voir comment tout ce joli monde a prévu d’imposer aux Européens (et aux Américains) leur beau traité de collaboration, le fameux TTIP.
IMPOSER AUX EUROPÉENS UN GRAND MARCHÉ TRANSATLANTIQUE DONT ILS NE VEULENT PAS :
MODE D’EMPLOI
Avec le TTIP en effet, la rupture entre UE et société civile est quasi consommée. Elle est actée en matière de politique commerciale par le traité de
Lisbonne et le schéma des négociations du TTIP lui-même[48]. Par ailleurs à la question « faut-il consulter
la société civile ou faire une étude d’impact préalable sur les conséquences du marché transatlantique ? » le Parlement a tout simplement et sans débat
répondu « non »[49].
D'un côté nous avons des décideurs politiques non élus, la Commission européenne et sa horde de négociateurs, qui ont tout pouvoir pour négocier aussi
largement que possible en matière commerciale[50] (y compris en l’occurrence sur des dispositions qui
relèvent de la compétence propre des États[51]), n'ont de compte à rendre à aucun organe de contrôle (le
Parlement Européen tout comme le Conseil[52] n'auront connaissance du traité qu'une fois signé par la
commission européenne quand il leur sera soumis pour validation[53]), ne sont pas exempts de conflits
d'intérêts[54], travaillent sous la pression des lobbys industriels et financiers et, faut-il le rappeler,
sont toujours immuns à vie pour les actes accomplis dans le cadre de leur fonction[55].
Et de l'autre côté, nous avons des institutions pseudo-démocratiques qui, en fait, ne contrôlent à aucun moment le processus décisionnel, les négociations
menées par la commission européenne sont quasi secrètes, le texte ne sera dévoilé qu'une fois l'accord signé, le consentement du Parlement européen
préalable à la décision du Conseil sera, vu les grands équilibres politiques en Europe et la prépondérance des partis qui soutiennent le TTIP [56], de toute manière acquise [57], le Conseil lui-même
n'a en fait comme unique latitude que de pouvoir valider ou non la signature de l'accord, une marge de manœuvre qui se réduit à « prendre ou laisser » [58].
Il est donc in fine de peu d’intérêt de se pencher sur la question du rôle du Parlement Européen quant à l'adoption ou non du TTIP. Sans la
question du blocage de la procédure de fast-track aux États-Unis qui empêche Obama de passer outre le Congrès [59], l'accord serait sans doute déjà sur la table du Conseil pour validation.
Étant donné le beau monde qui se précipite au portillon, on peut juger que l'affaire est importante. Pas moins de 7 commissaires européens se présentent
aux élections de mai prochain, lesquels, à l'image de Karel de Gucht, le commissaire chargé du commerce, ou de Olli Rehn, responsable de l'économie, des
questions monétaires et de l’euro, ont tous le profil industrie, commerce, finances[60]. C'est la carte de
la coalition des mammouths, des lobbys au sein des groupes parlementaires, un exercice auquel tous ces commissaires sont parfaitement rodés...
Quelle que soit la nouvelle recomposition du Parlement européen, c'est le Conseil qui sera décisionnaire, et nous retrouvons alors les mêmes que ceux qui
en juillet 2013 avaient accordé à l’unanimité le mandat à la Commission européenne. Il n'y aura plus de changements dans les ministères d'ici là. Renzi [61] est bien évidemment tout acquis au TTIP et, en France, c'est Fabius, le très-atlantiste ministre des
affaires étrangères, qui a récupéré au sein de son ministère le portefeuille du commerce extérieur (avec la bénédiction de la Présidence [62]). La secrétaire d'État, Fleur Pellerin, s'est d'ailleurs empressée au lendemain de sa nomination de
soutenir le TTIP[63].
À noter qu'ici le couple franco-allemand converge parfaitement sur le TTIP, entre les ministères des Affaires étrangères français et allemand : Steinmeier,
SPD, et Fabius, PS – et les portefeuilles du Commerce extérieur : toujours Fabius même après le remaniement, et Gabriel, SPD [64]. Même si l'unanimité ne semble plus tout à fait acquise, la majorité qualifiée est suffisante.
On voit l’effort politico-procéduro-législatif mis en œuvre pour obtenir coûte que coûte la signature d’un traité qui, plus que jamais, mobilise la société
civile européenne, et pas seulement les organisations alter-mondialistes, comme on l’a vu plus haut !
ET SI TOUT CELA NE SUFFIT PAS, IL RESTE ENCORE
LA POSSIBILITÉ DE DIABOLISER LES EUROPÉENS
Mais si tout ceci ne suffit pas à faire passer le TTIP à la barbe des opinions publiques européennes, il n'est pas non plus inenvisageable que le Conseil
joue carrément une carte anti-démocratique. Exacerbé par un parlement européen qui déciderait de s’opposer au TTIP dans le cadre d’une campagne électorale
en partie supposée renouer avec les citoyens, le Conseil pourrait être enclin à vouloir passer outre en jugeant que le PE n'est pas légitime en la matière
et adopte le TTIP seul.
Sur ce point, la prétendue « vague » d’extrême-droite en Europe, combinée à une explosion de mouvements sociaux, le tout dans un contexte de
quasi-déclenchement de guerre avec la Russie, servirait admirablement les intentions très pures de nos dirigeants européens/technocrates UE qui pourraient
prétexter d’un risque majeur sur la démocratie européenne pour interrompre, ne serait-ce que temporairement, le processus électoral en mai prochain. Depuis
février dernier, brutalement, les temps semblent en effet devenus mûrs pour interrompre les processus démocratiques en Europe au nom de la démocratie, pour
protéger l’Europe des Européens devenus fous en prétendant éviter un scenario de type Allemagne 1933… L’histoire se répète mais ne se ressemble jamais : la
mise en place d’un régime totalitaire en Europe pourrait se faire contre une prétendue répétition de la prise de contrôle du pouvoir par les Nazis… où les
partis d’extrême-droite servent bien utilement de chiffon rouge. Les raccourcis conceptuels fleurissent déjà : racistes = anti-démocrates = populistes =
anti-Européens = anti-austérité = Euro-critiques = pro-Russes = bientôt anti-TTIP = tous des « terroristes » ! Voici l’ennemi intérieur qu’il sera bientôt
justifié d’amalgamer et de combattre.
IL EST TEMPS D’ÊTRE PARANOÏAQUE…
POUR NE PAS SOMBRER DANS LA NAÏVETÉ
Nos lecteurs savent que nous n’avons pas l’habitude d’être alarmistes en ce qui concerne l’Europe. Et le fait est que, jusqu’en février dernier, l’Europe
suivait chaotiquement mais assurément un chemin qui peu à peu l’amenait sur les voies d’avenir de relations équilibrées entre son allié historique
américain et les nouveaux pôles de puissance mondiaux constitués par les BRICS, relations équilibrées garantes de son indépendance et de sa prise
d’importance dans le jeu mondial du XXIème siècle. Forte de l’euro, d’une économie puissante, d’une balance commerciale équilibrée, œuvrant à la
structuration d’une gouvernance économico-politique de la zone euro, naturellement reliée aux marchés émergents sur le plan économique, l’Europe avait
toutes les cartes en main pour sortir renforcée de la crise systémique globale.
L’attaque dont elle a fait l’objet en février dernier l’a fait dérailler et notre équipe a du mal à voir où sont les prises pour la sortir de l’ornière où
elle a été jetée. Celles-ci se situent sans doute à la jonction de la société civile, des forces économiques « normales » (qui voient leur investissement
d’ouverture aux nouveaux marchés partir en fumée actuellement), des petits partis progressistes et peut-être encore de certaines organisations européennes
(comme la Cour de Justice qui parvenait encore récemment à rejeter une mesure de la Commission en faveur de la surveillance téléphonique et internet [65]). Mais tout ce monde n’est pas organisé au niveau européen, les partenaires potentiels ne se repèrent
pas bien, les nouveaux moyens d’action politique peinent à s’inventer… Si les États membres, mauvais mais uniques garants de l’intérêt collectif, lâchent
les citoyens, il y a vraiment lieu de s’inquiéter.
DES RAISONS D’ESPÉRER ?
Sur ce scénario particulièrement alarmiste, nous en sommes conscients, nous référons à nos recommandations du mois dernier qui constituent encore une piste
de sortie de crise[66]. Par ailleurs, nous avons évoqué la difficulté qu’a Obama à faire accepter son fast-track par le Congrès. Finalement l’espoir pourrait-il venir de là où est venue l’attaque, à savoir des États-Unis ? Ou bien des BRICS qui
trouveraient le moyen de ramener tout le monde à la raison par force de conviction ou autre force...
Il est peu probable que les élections européennes fournissent la base à un débat public de qualité sur ces questions. Les gros partis sont bien trop
occupés à s’approprier les maigres programmes communs qu’ils ont péniblement réussi à concocter à 28[67] ;
les partis anti-démocratiques se contenteront d’ « anti-européer » au nom des souverainetés nationales ; les petits partis, d’où pourrait venir l’espoir,
seront probablement incapables de coaliser leurs maigres forces au niveau transeuropéen.
C’est pourtant cette dernière piste qui constituerait la meilleure chance de l’Europe…
[1]
Source :
Communiqué public GEAB N°83
, LEAP/E2020, 15/03/2014.
[2]
À ce sujet, lire l’article «Crise ukrainienne : un coup dramatique porté au rapprochement Euro-BRICS et à l’émergence du monde multipolaire »
publié par le réseau Euro-BRICS de LEAP. Source :
LEAP/Euro-BRICS
, 04/04/2014
[3]
Ce sont les États-Unis qui ont anticipé et guidé toutes les réactions européennes à la crise ukrainienne : ils ont été les premiers à s’offusquer
du choix de Ianoukovitch en faveur de l’accord russe, ont poussé nos dirigeants aux sanctions ( Financial Times, 30/03/2014), nous injurient lorsque nous
n’obtempérons pas assez vite ( The Guardian, 07/02/2014),
décident de la date de signature du Traité UE-Ukraine (EU Business,
13/03/2014), installent leurs troupes en lieu et place de l’OTAN aux frontières orientales de l’UE ( ABC, 09/04/2014), etc. Les
États-Unis créent la guerre en Europe sans qu’aucun gouvernement européen ne trouve la force de répartir.
[4]
Source : Deutsche Welle, 20/03/2014
[5]
Source : Financial Times, 09/04/2014
[6]
Source : The Economist, 04/04/2014
[7]
C’est un journal américain qui est obligé de les ramener à la raison. Source : Washington Post,
09/04/2014
[8]
Source : Reuters, 13/03/2014
[9]
Source : MercoPress, 28/01/2014
[10]
Source : Deutsche Welle, 20/03/2014
[11]
Pour s’en convaincre, il suffit de taper «
Tusk + Ukraine
» dans Google.
[12]
Source : LSE, 29/11/2013
[13]
Notre équipe ne remet en aucun cas l’honnêteté et l’indépendance de la politique menée par François Hollande au cours de ses deux premières années
de mandat. En matière économique, la France a réellement représenté un vrai contre-modèle équilibré entre les politiques d’austérité et celles
d’endettement (à ce sujet, lire l’article « The Plot against France » de Paul Krugman,
publié le 10/11/2013 par le New York Times) fondé sur l’imposition égalitaire ; quant à sa politique étrangère, notamment africaine bien sûr, menée
en partenariat d’égal à égal avec les forces politiques et militaires régionales, elle a constitué un véritable espoir de renouvellement dans la
gestion de ce type de crise ; c’est cette voie française qui a d’ailleurs justifié la fureur des médias et des sondeurs, le fameux «
Hollande-bashing » auquel le président français, considérablement fragilisé politiquement, semble avoir finalement cédé en février dernier.
[14]
Par exemple : « Manuel Valls: a smart operator in the Blair mould », <a href="http://www.theguardian.com/world/2014/apr/01/manuel-valls-french-prime-minist