2016-12-18

par Jeanne Barnicaud, Lucille Nicolas et Julien Saint-Pol

Criminocorpus est une plateforme numérique francophone de publication scientifique en ligne sur l’histoire de la justice, des crimes et des peines. L’objectif principal de cette plateforme est de diffuser en libre accès des connaissances et des sources sur l’histoire de la justice, à destination d’un public comprenant aussi bien la recherche et l’éducation que les professionnels du champ judiciaire et les publics intéressés. Pour cela, elle est composée de 3 sites internet principaux qui sont le Musée numérique, la Revue et le Blog d’information auxquels s’ajoutent des comptes Facebook, Twitter ainsi qu’une chaîne Youtube que nous présenterons et tenterons d’analyser. Le site Criminocorpus est créé en 2005, tout d’abord sous l’égide du seul CNRS alors que la plateforme dans sa version actuelle de Criminocorpus date de 2015. Elle est aujourd’hui gérée par le CLAMOR (Centre pour les humanités numériques et l’histoire de la justice) qui est une unité créée en 2015 par le CNRS et le ministère de la Justice, en partenariat avec les Archives Nationales. Cette unité rassemble des spécialistes de l’histoire de la justice et de l’édition numérique. Ce support institutionnel de l’actuel Criminocorpus s’est donc formé après cette plateforme et spécifiquement pour celle-ci, pour la développer et la promouvoir. Pour piloter Criminocorpus, le CLAMOR s’appuie sur une équipe éditoriale composée d’un comité de lecture et d’un comité de rédaction. Ces deux comités sont en quelque sorte les garants de la rigueur scientifique de la plateforme.

Un ensemble d’expositions virtuelles et de sources en ligne sous la forme d’un véritable musée en ligne



Page d’accueil du portail principal

Le musée virtuel est, à ce jour, la partie la plus visible du site internet de Criminocorpus: ses expositions y sont accessibles du premier onglet, des catégories défilantes, des menus de la première page et renvoient à diverses thématiques en lien avec le crime, à la façon d’une histoire du droit pénal au Japon ou encore d’une exposition sur les graffitis des prisons. Le site est lui-même titré « Musée d’histoire de la justice, des crimes et des peines ». En effet, la volonté de présenter des expositions sur le site de Criminocorpus remonte à ses origines : en entrant l’ancienne adresse du site internet, http://criminocorpus.cnrs.fr, dans le moteur de recherche de la Wayback Machine, il est possible d’accéder aux archives du 1er novembre 2005. On peut alors constater que, un an après la création du site internet, il existait déjà une exposition en ligne sur la peine de mort ouverte le 11 octobre 2006. « Favoriser la diffusion de travaux historiques par l’accueil d’expositions virtuelles » y était déjà mentionné comme l’objectif du site. Par ailleurs, celles-ci se caractérisent par un très dense propos scientifique qui dépasse la forme traditionnelle du « diaporama » pour viser à la fois chercheurs, étudiants, professeurs et simples curieux.

On pourrait ainsi replacer Criminocorpus dans une position de rupture et d’élargissement du modèle traditionnel de l’exposition virtuelle. Originellement, cette dernière était utilisée comme une annexe à une exposition physique. Très utilisée par la BNF, elle permettait par exemple de feuilleter des manuscrits en ligne en complément de diverses expositions, comme L’aventure du Livre en 2011, sans ajouter de propos scientifique propre. Criminocorpus exploite la visée originale d’une exposition nativement virtuelle et exclusivement virtuelle, une ambition rare dont un autre exemple pourrait être celui de la Cinémathèque virtuelle.

À partir de ces expositions, Criminocorpus a développé une forme spécifique de contenu en ligne. On trouve d’une part des repères chronologiques, des outils, des instruments de recherche (bibliographie, base de données, guide des archives, sources judiciaires contemporaines) facilement accessibles par une barre de recherche et différents onglets car en partie formulés pour être des compléments des expositions et être utiles à tous les types de publics, qu’ils soient spécialisés dans les questions traitées ou non. D’autre part, il est possible d’accéder à des visites virtuelles de prisons et de tribunaux, dans une perspective axée sur le visuel, l’originalité et l’exclusivité. En effet, celles-ci concernent des lieux difficiles ou impossibles d’accès et appellent à la curiosité, avec par exemple la visite de la prison de la Santé ou de l’ancienne prison du Havre, présentés sous formes de cartes interactives et de vidéos et conjugués à des témoignages. Criminocorpus présente également des collections qui lui sont propres, notamment celles de Philippe Zoummeroff, composées de plus de six mille pièces allant du XVIe siècle au XXe siècle ou encore les archives complètes de Police Magazine entre 1931 et 1939, et des entretiens exclusifs. Plus récemment, on y trouve enfin un dépôt virtuel d’expositions physiques en partenariat avec les Archives Nationales et la Bibliothèque des Littératures Policières – c’est le cas de l’exposition De Fantômas à Méphisto: René Navarre (1877-1968). L’artiste aux mille visages, initialement présentée à la BILIPO entre le 5 mai et le 1er août 2015.

De cette façon, Criminocorpus a très largement dépassé le cadre de simple « exposition virtuelle » ou de simple site de ressources pour les chercheurs, et est devenu un objet protéiforme qui partage beaucoup de points communs avec les musées véritables : accessibilité pour tous, organisation d’expositions qui permettent à ce large public de se renseigner sur des sujets, et approfondissement de ces sujets par un ensemble de ressources pour la recherche qui ne vont pas sans rappeler les outils pédagogiques et les réserves du musée. Ce but est par ailleurs clairement avancé par le directeur de la publication de Criminocorpus, Marc Renneville. Dans le communiqué de presse publié à l’occasion de l’ouverture du site actuel en 2015, il expliquait vouloir regrouper en un lieu les ressources autour de la justice et du crime et les rendre facilement accessibles faute d’existence d’un véritable musée dédié, indiquant que le projet est né d’un « constat d’absence »1 .

Cette logique et cette centralisation permettent même à Criminocorpus de se lancer dans une logique « d’acquisitions » pour enrichir ses fonds: c’est le but de l’Inventaire du patrimoine judiciaire de France réalisé en partenariat avec les Archives Nationales, la région Normandie, le Ministère de la Justice et le CNRS. Concernant à la fois les éléments architecturaux, culturels, matériels, immatériels, il vise aussi à collecter des objets et traces du quotidien par le biais du projet « HUGO » en appelant à tout contributeur volontaire, qu’il soit spécialiste ou passionné.



« Dans la Courouaïe », cliché extrait de l’exposition « Le Bagne en Relief », Criminocorpus

Il faut cependant noter que Criminocorpus n’a pas non plus vocation à cesser d’exister le jour où un musée physique ouvrira ses portes sur le même sujet – le projet exploite pleinement les possibilités du portail internet en proposant des contenus presque impossibles à présenter ailleurs : c’est le cas des visites virtuelles, mais c’est aussi le cas d’expositions telles que Le Bagne en relief , exclusivement proposée en deux versions, l’une avec lunettes 3D et l’autre sans. Marc Renneville indique ainsi que « le numérique n’est d’ailleurs pas pour nous un choix par défaut »2 . Cette utilisation du numérique n’a pas été sans conséquences positives : l’impact de la partie musée de la plateforme est bien réel, avec plusieurs éléments utilisés ou mentionnés dans des articles de la revue cairn.info. L’accessibilité et la lisibilité de Criminocorpus permettent ainsi une utilisation dans l’enseignement3 . L’efficacité des éléments d’aide à la recherche est également soulignée comme un outil efficace4 . Bien entendu, les dossiers et contenus sont aussi utilisés directement comme sources5 .

Une revue scientifique et un blog qui profitent pleinement des possibilités de l’hypermédia

La revue en ligne de la plateforme Criminocorpus a été créée en 2005. Il s’agit avant tout d’une revue hypermédia : bien qu’elle soit composée essentiellement d’articles en ligne, nombre de ceux-ci renvoient à des sources numérisées, principalement des textes, images et vidéos dont beaucoup proviennent du site du musée Criminocorpus,, mais pas exclusivement. C’est une revue qui a une vocation scientifique très claire et qui, de ce point de vue, fonctionne de la même manière que les autres revues scientifiques : les spécialistes de l’histoire de la justice qui gèrent la revue en ligne conditionnent la publication d’articles dans cette revue à une relecture en double aveugle. Celle-ci s’appuie sur une grille d’évaluation établie à l’avance. Ces procédés servent à déterminer si la contribution est acceptée ou non et si elle doit faire l’objet de modifications de la part de son auteur. À cela s’ajoute la caution scientifique de Revues.org. Pour être hébergé sur cette plateforme de revues en sciences humaines et sociales, il est en effet nécessaire de répondre à un certain nombre de critères, notamment du point de vue de la scientificité et d’être accepté par le Comité Scientifique d’OpenEdition. Cet hébergement sur Revues.org participe également à un autre aspect important de la revue en ligne Criminocorpus, à savoir qu’il s’agit d’une publication qui se veut la plus accessible possible, y compris pour les non spécialistes. En effet, la plateforme revues.org est une référence pour tous ceux qui, spécialistes ou non spécialistes recherchent des publications en ligne sur tous les sujets ayant trait aux sciences humaines et sociales : elle héberge aujourd’hui 400 publications et reçoit, en moyenne, 2,8 millions de visites par mois6 . Toujours dans cette perspective d’accessibilité, la revue Criminocorpus est aussi plurilingue (la langue d’édition principale est le français mais tout article peut être édité dans une seconde voire une troisième langue) et surtout, elle est, dans sa totalité, en accès libre et gratuit.

La revue Crimnocorpus se singularise dans le champ des revues d’histoire de la justice par son approche « hypermedia » ainsi que par son choix de l’accès libre. En effet, c’est ce que l’on constate si l’on prend comme exemples d’autres revues disponibles sur les plateformes françaises : la revue Crime, histoire et sociétés par l’IAHCCJ (International Association for the History of Crime and Criminal Justice), la Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière », toutes deux accessibles sur revues.org et la revue Histoire de la Justice publiée par l’AFHJ (Association Française d’Histoire de la Justice), accessible sur Cairn.info. Le point commun des ces trois revues est d’être avant tout des revues qui sont éditées sur papier et qui utilisent l’édition en ligne comme un moyen d’élargir leur public et de se rendre accessibles plus facilement. À l’inverse, la revue Criminocorpus est exclusivement numérique. De plus, tous les numéros de ces revues ne sont pas disponibles en ligne, notamment les derniers numéros. Le délai de mise en ligne de l’intégralité des articles (et pas seulement des résumés) diffère en fonction des revues mais ce qui est notable est que, contrairement à ces trois revues en ligne, la revue Criminocorpus est disponible dans sa totalité en accès libre sur internet, y compris les toutes dernières publications. La plateforme Criminocorpus fait ici un effort supplémentaire pour favoriser son accessibilité la plus large possible. La seconde différence notable entre la revue Criminocorpus et les autres revues d’histoire de la justice que nous avons étudiées c’est qu’elle est la seule à avoir un caractère hypermédia et surtout à fonctionner en lien avec un ensemble de sites liés à la même plateforme Criminocorpus : le musée numérique, le blog d’information ou encore les comptes sur les réseaux sociaux. Évidemment, ces liens avec d’autres types de ressources en ligne apportent une richesse supplémentaire à la revue Criminocorpus

Le blog d’information Criminocorpus fonctionne en parallèle de la revue avec laquelle il a de nombreux liens. Il est hébergé sur la plateforme Hypothèses.org qui publie des carnets de recherche en sciences humaines et sociales. Il s’agit d’abord d’un moyen plus vivant et davantage accessible que la revue scientifique en ligne pour diffuser les connaissances et les sources de connaissances de l’histoire de la justice, des crimes et des peines. C’est pour cela que l’on y trouve des liens vers les nouvelles publications de la revue ou les nouveautés du musée numérique ainsi qu’une grande diversité de ressources sur l’histoire de la justice, des crimes et des peines qui sont signalées dans ses publications (romans, polars, documents sonores, travaux universitaire etc). Le blog publie également des appels à contribution pour les prix scientifiques, les séminaires, les colloques ou les journées d’études dans le domaine de l’histoire de la justice. C’est là le deuxième aspect important de ce blog, c’est qu’il constitue en quelque sorte un espace numérique qui a vocation à rapprocher les différents acteurs de l’histoire de la justice. Il contribue ainsi à former une véritable communauté scientifique dans ce domaine, et ce autour de la plateforme Criminocorpus.

Il est possible de mesurer si l’objectif d’accessibilité de ce blog, y compris pour les non spécialistes, est réussi. Pour cela, on constate la mise en ligne sur le blog d’une note générale d’aide pour les recherches biographiques et généalogiques7 . Cette note a été rédigée par les gestionnaires du blog pour faire face à un trop grand nombre de demandes d’aide pour les recherches en question auxquelles ils ne pouvaient répondre individuellement. C’est le signe que ce blog est visité, qu’il suscite un intérêt et notamment pour des non spécialistes. Les statistiques d’Open Edition8 viennent confirmer cette analyse : elles enregistrent entre 10 000 et 27 000 visiteurs différents par mois sur l’année 2016 pour le blog de Criminocorpus. Ces chiffres sont considérables, notamment si on les compare aux autres blogs qui ont trait à l’histoire de la justice hébergés par OpenEdition. Par exemple, le blog Droit et justice enregistre entre 141 et 647 visiteurs différents par mois sur la même année ; pour le blog Historia, crimen y justicia, ces moyennes mensuelles oscillent entre 356 et 1792. On peut dire que, de ce point de vue, c’est un pari réussi pour Criminocorpus.

Un «écosystème numérique» tourné vers la diffusion et la démocratisation des savoirs

Outre le musée en ligne, la revue et le blog de recherche, Criminocorpus est aussi une plateforme qui dispose de relais sur les réseaux sociaux. En effet, ce projet a mobilisé trois des principaux réseaux sociaux actuels : Twitter depuis janvier 2010, Facebook depuis mars 2010 et un compte Youtube a été ouvert en septembre 2016.

Les pages Twitter et Facebook peuvent être présentées ensemble car elles ont globalement les mêmes types d’activités. Le 10 décembre 2016, la page Twitter comptait 1 812 abonnés tandis que la page Facebook recensait 3 210 mentions « J’aime ». Sur ces deux réseaux sociaux, Criminocorpus a une activité qui n’est pas vraiment quotidienne avec en général deux à trois publications par semaine. Cette activité périodique reste tout de même assez régulière pour se faire le relais de l’activité des différentes plateformes du projet et de la vie scientifique en général. Parmi les publications de ces deux comptes sur les réseaux sociaux, une typologie permettrait de définir les aspirations et les objectifs de l’insertion de Criminocorpus sur les réseaux sociaux : actualité de la justice, actualité de la revue avec des redirections vers les nouveaux articles mis en ligne, appels à communications ou à concourir pour des remises de prix scientifiques, actualité de la recherche sur l’histoire de la justice en général (publications d’ouvrages, d’articles, de journées d’études) ou encore promotion et mise en avant des différentes plateformes.

La chaîne Youtube disposait quant à elle (toujours au 10 décembre 2016) de 29 abonnés et de 9 vidéos originales pour un total de 895 vues en tout sur l’ensemble des vidéos. On a donc une réception et une activité pour l’instant moins répandues que sur Twitter et Facebook, ce qui peut s’expliquer par le caractère récent de la page Youtube (2 mois seulement) et par la nature du projet : réaliser et mettre en ligne une vidéo prend plus de temps et de travail que poster un tweet ou une publication facebook. Il faut préciser que Criminocorpus s’emploie à une véritable production de vidéos originales pour cette chaine. En réalité, Criminocorpus a deux types d’activités sur cette chaine. La première est qu’elle a créé différentes playlists regroupant des vidéos produites par d’autres chaînes sur un sujet commun: c’est par exemple le cas d’une playlist « Grandes affaires : Dreyfus » qui regroupe trois documentaires sur l’affaire Dreyfus. Criminocorpus a donc d’abord une activité de relai, de promotion de diverses vidéos portant sur l’histoire de la justice produites par d’autres chaines. En ce sens, le projet s’inscrit dans un système numérique beaucoup plus large et se fait en quelques sortes médias de l’histoire de la justice en général. Cependant, Criminocorpus ne se contente pas de cela puisque, comme cela a été précisé auparavant, le CLAMOR produit lui-même des vidéos comme un reportage sur l’exposition « Un œil sur le crime. A. Bertillon , précurseur de la police scientifique » présentée à Vire en 2015 et commentée par Pierre Piazza, historien spécialiste de la justice. Ainsi, plus qu’un simple relais, Criminocorpus est un véritable producteur de savoir sur l’histoire de la justice par le biais de sa chaine Youtube. Cela peut témoigner d’une volonté de s’ouvrir à la sphère publique de façon beaucoup plus large dans un souci de vulgarisation et de démocratisation des savoirs sur l’histoire de la justice. La scientificité de ceci étant garantie par le « label » Criminocorpus (depuis la création de la revue en ligne) et par le laboratoire CLAMOR qui gère cette chaîne Youtube.

Ces trois relais sur les réseaux sociaux ne sont pas indépendants les uns des autres, ils ne sont pas annexes au projet d’ensemble de Criminocorpus, ils s’y inscrivent pleinement en proposant une plus grande diffusion et un prolongement (notamment par les reportages et mini documentaires sur Youtube). En témoignent les renvois sur la chaîne Youtube vers les liens du musée, de la revue, du blog, de la page facebook et twitter qui montrent bien que tous ceux-ci s’inscrivent dans un projet d’ensemble. On a des interactions entre les différents projets qui ne sont pas fermés sur eux-mêmes. En ce sens, on pourrait parler d’un véritable « écosystème numérique ».

Pour les « sciences dures », un écosystème est un système où vivent, se reproduisent et interagissent entre elles des espèces animales et/ou végétales. Dans ce contexte et dans le cas de Criminocorpus, parler d’un écosystème numérique consisterait à établir l’idée selon laquelle le projet d’ensemble serait un système à l’intérieur duquel plusieurs plateformes coexistent, interagissent et se nourrissent les unes les autres. Les renvois vers les différentes plateformes l’attestent, Criminocorpus n’est pas un projet inerte et fermé sur lui-même, c’est un système vivant et actif où chaque plateforme a son rôle spécifique tout en faisant partie d’un tout.

Ce projet et cet « écosystème numérique » sont assez inédits en France en ce qui concerne l’histoire de la justice et dans le monde de la recherche en général. Il existe quelques autres projets numériques à l’étranger sur l’histoire de la justice. Le plus récent est le projet Legal History Miscellany développé par trois chercheuses spécialistes de l’histoire de la juste en contexte britannique (Sara M. Butler, Krista Kesselring et Katherine D. Watson) depuis le printemps 2016. Selon le blog de ce projet, son objectif est de présenter des archives inédites, présenter des ouvrages à paraître ou encore l’actualité de la recherche. Cependant, comme l’indiquent les trois historiennes à la base du projet, celui-ci est essentiellement tourné vers le monde académique, il n’y a pas de réelle volonté d’ouverture en-dehors de la sphère universitaire. C’est peut-être cela qui peut expliquer que, en-dehors d’un compte twitter, ce projet ne dispose d’aucun relais sur les réseaux sociaux comme Criminocorpus. En ce sens, on ne peut pas parler d’un « écosystème numérique » pour Legal History Miscellany contrairement à Criminocorpus. Citons également le projet Grupo de Estudios Historia y Justicia développé par des étudiants de philosophie et d’humanités de l’Universitad de Chile basée à Santiago. Tout comme Criminocorpus, le projet dispose d’un important relai sur les réseaux sociaux avec une présence sur Twitter et Facebook. La volonté explicite de ce projet étudiant est d’ouvrir le dialogue entre les différentes sciences sociales sur l’histoire de la justice des sociétés coloniales et contemporaines au Chili. Là encore, d’une façon similaire à Criminocorpus et contrairement à Legal History Miscellany, on retrouve un aspect dynamique et interactif à ce projet avec différentes plateformes qui communiquent entre elles. On pourrait donc également associer ce projet à un « écosystème numérique ». Cependant, ce qui semble être la particularité du projet Criminocorpus est une certaine volonté de diffuser le savoir à plus grande échelle dans un souci de vulgarisation et de démocratisation des savoirs universitaires.

*

Depuis sa création en 2005, Criminocorpus est parvenu à créer un véritable musée virtuel, une revue et un blog efficaces et riches en publications à valeur scientifique, mais aussi à développer autour de ces ensembles un véritable écosystème numérique qui exploite tous les moyens de diffusion pour se développer et gagner en cohérence. Le projet de Criminocorpus étant de « contribuer au rapprochement du monde de la recherche historique, de la culture et de l’éducation, des professionnels et des acteurs du champ judiciaire, ainsi que de tout public intéressé »9 , l’accent a été mis sur la multiplication des contenus approfondis mais aussi sur leur accessibilité – ouvrant à terme la porte à la participation du public sans posur autant négliger la rigueur scientifique. Il faut noter également l’efficacité avec laquelle Criminocorpus parvient à s’ancrer dans la forme spécifique du contenu sur internet. Au-delà de la simple accessibilité, Criminocorpus a su repérer les possibilités offertes par ce langage et les appliquer: un élément que l’on retrouve à la fois dans les visites et expositions virtuelles, l’utilisation de toutes les possibilités ouvertes par l’édition hypermédia d’articles et de contenus, mais aussi par les réseaux sociaux et le développement de contenus inédits par les vidéos Youtube. Dans la genèse et le développement de Criminocorpus, il y a eu une volonté de profiter pleinement du numérique pour ne pas se limiter à un simple musée transféré sur internet, ou la reproduction de ce qui aurait pu être contenu dans l’édition papier des mêmes élément. En somme, Criminocorpus apparaît comme un projet numérique remarquablement abouti et original par sa seule nature de portail nativement et exclusivement virtuel. On se rapproche ici de la notion de « digital public history » largement développée par Serge Noiret, notamment au travers du carnet Digital & Public History : le développement de nouvelles formes et pratiques de l’Histoire par l’avènement des humanités numériques, profitant pleinement des nouvelles possibilités ouvertes par les nouvelles technologies et, notamment, internet.

Crédit image de une : Tony Webster, « Police Line / Police Tape », en cc sur Flickr

« Musée d’histoire de la justice, des crimes et des peines : dossier de presse, septembre 2016 », Criminocorpus, 2016.

Idem

Un aspect par exemple souligné dans la Nouvelle Revue de l’adaptation et de la scolarisation, n°60, 2012/4, dans l’article « Ressources documentaires pour les enseignements adaptés et l’éducation des jeunes handicapés ou en difficulté » par Philippe Caillaud et Daniel Beauvais

Un exemple pourrait en être l’utilisation de la bibliographie de Criminocorpus dans l’article « Une histoire sans sciences sociales ? » de Claire Lemercier, dans la revue Histoire, Sciences Sociales, annales de la 20e année (2015/2)

« L’habitus professionnel spécifique aux éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse », Thomas Falchun, Déviance et Société, vol. 40, 2016/1.

« À propos de Revues.org », Revues.org, [consulté le 8 décembre 2016]

« A propos des demandes d’aide… », Criminocorpus , 2010, mise à jour en 2011 [consulté le 4 novembre 2011]

« Statistiques d’Openedition », OpenEdition, [consulté le 11 décembre 2016].

« Presentation », Criminocorpus, 2016 [consulté le 11 décembre 2016]

Show more