2016-01-28

Des rendements appétissants

Depuis les années 2000, l’immobilier pour les grands investisseurs européens constitue 3 % à 8 %, en moyenne, de leur allocation globale. Depuis la dernière crise, en 2008, les commerces, pour les grands investisseurs institutionnels, sont devenus une allocation de choix et la concurrence pour ces produits n’a fait que s’accroître partout en Europe. Quelques faits stylisés pour comprendre le marché européen.

Le commerce reste la deuxième classe d’actifs la plus transactée après les bureaux, sur les vingt dernières années. Cet engouement s’explique par les rendements que cette classe d’actifs a pu générer sur moyen et long termes.

Sur les quinze dernières années, selon les données IPD-MSCI disponibles jusqu’en 2004, le commerce, en Europe, a offert un rendement moyen supérieur à celui des bureaux et autres classes d’actifs. Sur cette période, ce différentiel, ou premium des rendements des commerces sur celui des bureaux, a été de 230 points de base, en moyenne.

Bien que la classe d’actifs commerce de l’univers IPD-MSCI associe pieds d’immeuble, centres commerciaux et retail parks, l’univers d’analyse par pays (Grande-Bretagne, France, Suède, Italie, Espagne et Belgique) montre que l’essentiel des données traitées dans le benchmark IPD-MSCI est plus représentatif des centres commerciaux que du reste des actifs de commerce. En cela, les indices IPD-MSCI par grands pays européens offrent un échantillon suffisamment représentatif de la performance des centres commerciaux comme investissements comparativement à celle des bureaux.

À titre indicatif, sur les dix dernières années, les rendements moyens des centres commerciaux en Europe ont été de 6,9 % par an. Cette analyse sur les seules dix dernières années gomme les changements structurels qui se sont opérés entre les différents marchés européens et évite, ainsi, qu’un « effet rattrapage »  en termes de taux n’explique quasi seul les différentiels de performance entre périmètres géographiques.

Sur cette même période, la France fait figure de championne avec un rendement de 12,1 % par an, en moyenne, suivie de la Suède, dont le rendement se hisse à 8,6 % par an. En Grande-Bretagne (voir encadré ci-dessous), les rendements restent supérieurs à la moyenne européenne, mais inférieurs à ce qu’il sont en France ou en Suède.

Une analyse plus fine des données IPD britanniques démontre que les dispersions des rendements autour de la moyenne nationale sont beaucoup plus élevées, car les rendements des centres commerciaux sont très différents selon la localisation, la taille des centres ou le  « vintage » des centres.

Le marché des commerces en Grande-Bretagne est l’un des plus diversifiés en matière de produits : pieds d’immeuble, centres commerciaux et retail parks. Il est considéré comme le marché le plus liquide, en Europe, pour la classe des centres commerciaux. Le marché a été caractérisé par l’entrée de nouveaux acteurs, fonds souverains en direct ou en indirect. Ce marché est bien plus volatil que ses pairs européens, mais il l’est moins que le secteur des bureaux en Grande-Bretagne. Cette moindre volatilité explique son grand intérêt aux yeux des institutionnels qui ambitionnent d’investir en Grande-Bretagne.

Les rendements à long terme sont de 8 % par an, mais très dispersés. Comme le démontre le graphique ci-contre, les rendements en capital sont très différents selon la taille des centres : ils sont une fonction croissante de la taille des centres, et cela même si les rendements locatifs sont moins élevés que sur des centres de plus petite taille. Cela pourrait paraître paradoxal, mais une analyse plus fine démontre que la taille est aussi corrélée au « vintage » du centre. Les nouveaux grands centres ont tendance à surperformer en termes de rendements en capital, mais également en termes de rendements locatifs.

Rendements du commerce à 10 ans en Grande-Bretagne, par taille d’actif, en %



(Sources : IPD-MSCI et Grosvenor Research)

Rendements en Europe en commerce (2003-2014), en %



(Sources : IPD-MSCI et Grosvenor Research)

En termes de couple rendement-risque, le commerce offre un ratio supérieur à 1 sur long terme, et cela en tenant compte des différents cycles haussiers et baissiers dans la majorité des pays en Europe. Sur long terme, soit sur dix, quinze ou vingt ans, lorsque les données sont disponibles, une analyse par pays montre que le couple rendementrisque de l’actif commerce est toujours plus élevé que dans les bureaux. Cette supériorité du couple rendement-risque s’explique par une moindre volatilité des rendements en commerce comparativement à celle des bureaux.

Comparaison des rendements immobiliers à 10 ans, par type d'actif, en France, en Grande-Bretagne et en Suède

Rendements à 10 ans en France, par type d’actif immobilier, en %



(Sources : IPD-MSCI et Grosvenor Research)

Rendements à 10 ans en Grande-Bretagne, par type d’actif immobilier, en %

(Sources : IPD-MSCI et Grosvenor Research)

Rendements à 10 ans en Suède, par type d’actif immobilier, en %

(Sources : IPD-MSCI et Grosvenor Research)

La moindre volatilité des rendements locatifs et en capital des commerces par rapport aux bureaux est surtout observée en phase baissière du cycle immobilier. La croissance de la consommation, moteur des rendements immobiliers, a plus d’inertie que la croissance de l’emploi de bureau, plus volatil et élastique aux cycles économiques.

La crise de 2008 aura encore plus accentué le différentiel entre performances de ces deux classes d’actifs, commerces et bureaux, dans l’ensemble des pays européens. En effet, la reprise ne s’est pas caractérisée par un rebond du PIB et de l’emploi, mais plutôt par une croissance poussive et graduelle, notamment au sein de la zone euro. La croissance de la consommation a fait preuve de plus de résilience en dépit de la consolidation fiscale que la croissance de l’emploi dans l’ensemble des pays européens. Cette résilience de la consommation a été encore plus marquée dans les grandes agglomérations européennes, où les rendements des centres commerciaux ont continué de surperformer par rapport à la moyenne.

L’année 2014 marque un tournant, comme le démontre la figure 6, puisque l’indice agrégé IPD-MSCI pour l’ensemble des pays européens enregistre une très forte hausse des rendements : la hausse de ces rendements a été générée par un rebond des valeurs vénales, fin de la crise de la dette souveraine oblige, mais également par une forte hausse des rendements locatifs, en lien avec un rebond de la consommation dans la majorité des différents pays.

Rendements en Europe pour l’ensemble des actifs immobiliers vs les commerces, entre 2003 et 2014, en %

(Sources : IPD-MSCI et Grosvenor Research)

Les volumes d’investissement en commerce dans l’ensemble des pays européens se sont fortement accélérés, depuis la crise (voir figure 7) et la part des commerces dans le volume global d’investissement s’est également accrue dans l’ensemble des pays européens. Cet appétit s’est caractérisé par une très forte baisse des taux en regard de politiques monétaires très accommodantes partout en Europe (quantitative easing de la Banque d’Angleterre, de la Banque Centrale Européenne ou de la Risksbank, l’autorité monétaire suédoise). Dans l’ensemble de ces pays, les taux « prime » des centres commerciaux sont aujourd’hui bien en deçà de leur moyenne de long terme, même si les « spreads » avec les taux à dix ans dans chacun des pays européens restent encore élevés.

Volumes d’investissement en Europe dans le commerce, de 2008 à 2015, en millions d’euros

(Sources :RSA et Grosvenor)

Des rendements dispersés, liés à une communication plus digitale

Si les centres commerciaux restent des actifs de choix dans les poches d’allocation des grands institutionnels européens, les performances récentes et les écarts de performance entre les centres commerciaux pour tous les grands pays européens posent des questions sur les mutations nécessaires du traditionnel centre commercial, au-delà de celles déjà observées.

Les écarts de performance constatés s’expliquent par deux raisons, essentiellement : des croissances du pouvoir d’achat et de la consommation insuffisantes dans la zone de chalandise de certains centres commerciaux, ou un effet de cannibalisation provoqué par l’e-commerce.

En Grande-Bretagne, en France, en Espagne ou en Suède, la sous-performance de petits centres ou de centres moyens s’explique par l’incapacité de la zone de chalandise à renouer avec son potentiel de croissance de la consommation tel qu’observé dans le passé. Une analyse plus fine des données désagrégées de certains centres démontre que la consommation sous-potentielle au regard de sa tendance moyenne passée est le plus souvent liée à un manque de croissance de la productivité par tête dans la zone de chalandise ou aux alentours, de l’emploi, et donc du pouvoir d’achat. D’autre part, les études par pays montrent que la propension à consommer sur internet, soit la part de la dépense faite sur internet par rapport au revenu, s’est accélérée au cours de ces dernières années avec une révolution du comportement de consommation. Les ventes en ligne, et la désintermédiation du commerce en général, se sont véritablement accélérées avec l’apparition des smartphones en 2008.

Au sens de la théorie économique, le commerce en ligne offre une forte économie de transaction via une réduction de prix, du coût de transport physique, voire du coût psychologique pour le consommateur.

Aujourd’hui, en Europe, les ventes en ligne représentent de 3 % à 16 % des ventes au détail. En Grande-Bretagne, l’économie européenne la plus digitalisée, la contribution des ventes en ligne aux ventes totales est de 16 % contre 10 % en France. La Suède, les autres pays scandinaves et l’Allemagne sont entre les deux, avec des taux supérieures à 10 % mais encore loin de notre voisin britannique.

L’Espagne et l’Italie semblent épargnées ou « à la traîne », puisque les ventes en ligne ne représentent encore qu’une proportion inférieure à 6 % des ventes totales à cause d’une infrastructure moins établie.

Cette révolution digitale a pénalisé certains centres commerciaux plus que d’autres, expliquant la polarisation croissante du marché des centres commerciaux et des écarts de performance des rendements entre les moins et plus vulnérables des actifs. Cette révolution digitale a également pénalisé les   grandes enseignes commerciales, dans un premier temps. Toutefois, au regard des chiffres d’affaires plus récents des grandes enseignes européennes cotées et des rendements locatifs des grandes foncières cotées, il semblerait que ces acteurs aient rapidement réagi et finalement embrassé cette nouvelle révolution digitale au lieu de la subir. Enseignes et foncières cotées ont, en effet, renoué avec une nouvelle dynamique de croissance en opérant une mutation digitale synonyme de rendements sécurisés à moyen et long termes pour leurs investisseurs. Grâce au développement du « click and collect », comme contre-offensive, les prophéties apocalyptiques sur la mort du commerce physique ne se sont pas

avérées, tant pour les enseignes que pour les centres.

En Grande-Bretagne, selon Deloitte, aujourd’hui 40 % des centres commerciaux sont équipés de « click and collect » et selon Verdic, 68 % des « shoppers » en ligne utilisent le « click and collect ». Plus informatif, près d’un tiers des clients font une dépense supplémentaire à la suite du retrait en magasin

et ce surplus est en moyenne de 18 livres par visite.

Dans leur rapport annuel, toutes les foncières européennes témoignent de ce nouvel équipement. La foncière British Land, par exemple, dont le portefeuille est uniquement britannique, suggère que 64 % des « shoppers » passant par le « click and collect » font plusieurs achats dans ses centres. En France, selon la FEVAD, moins de 50 % des achats ont été livrés à domicile en 2014, le consommateur préférant le retrait en magasin. La Fnac a également suivi cette évolution stratégique du « click and collect » pour doper les cent huit points de vente. En 2014, 30 % des commandes internet étaient retirées en magasin contre 22 % en 2012. Au-delà du service et autres leviers que développe la Fnac pour recréer le lien d’antan avec son consommateur, l’enseigne française reconnaît également que tout retrait est aussi un vecteur pour motiver d’autres achats.

Les ventes en ligne continuent d’augmenter à un rythme élevé, de 10 % à 15 %, en moyenne, selon les différents pays européens. Pour les enseignes, ces ventes en ligne signifient moins de marge que dans les magasins physiques, c’est la raison pour laquelle les enseignes continueront à faire de leur boutique le lieu privilégié de la rencontre.

Si le « click and collect » devient la plateforme pour générer  du chiffre d’affaires lors du retrait en magasin, il récolte surtout, par des algorithmes, d’une nouvelle génération, une mine d’information sur le chaland. Aujourd’hui, les enseignes et les foncières savent qu’un achat sur deux se fait sur tablette et chacun des acteurs doit tenir compte du fait que plus de la moitié des clients en ligne va également sur les réseaux sociaux pour « liker » un produit ou une ambiance, y poster des commentaires et des photos. Les philosophes diraient que le lien social physique se distend au profit d’un réseau social virtuel omniprésent. Les pragmatiques et les « data scientists » (les spécialistes de la donnée, qu’ils soient informaticiens, statisticiens ou mathématiciens) diront qu’il est possible d’explorer ces données d’univers aussi différents que variés, de les analyser et d’en faire un nouveau « Graal » pour lutter contre le consommateur volage, mais également pour opérer une mutation plus cartésienne du centre commercial – data à l’appui !

Le « big data » est l’appellation, très en vogue, synonyme d’un ensemble de données infiniment grand (megadata) et massivement parallèles, tant par leur volume que par leur historique. Le stockage de ces données, de sources multiples et très différentes, n’est plus un problème, aujourd’hui, grâce à la numérisation, la quatrième révolution technologique de notre temps. Une fois numérisée, l’information peut être traitée et stockée.

Le « datamining » est l’analyse de l’information émanant de ces grands volumes de données de formats très différents. Pour faire rapide, il s’agit de traiter ces mégadonnées, c’est-à-dire de trouver des corrélations entre des variables ou de décorreler des variables pour éviter de passer à côté des vrais liens de causalité sur le comportement d’achat. Il convient, ensuite, d’analyser, classer et interpréter ces variables.

Les enseignes ont probablement eu un temps d’avance sur les foncières, au regard des données qu’elles ont pu collecter via leur stock, leurs ventes en ligne et les réseaux sociaux (« text mining »). Ce « datamining « , aussi nommé  « retail analytics » de manière plus commerciale et sexy que « bigdata » ou « datamining », a permis aux enseignes de retravailler, dans un premier temps, leur espaces et d’être plus performantes en matière de ventes par mètre carré.

En moins de trois années, la taille moyenne des surfaces prises par les locomotives dans les centres commerciaux, par les « fast fashion retailers », Zara, H&M, ou Next, a augmenté de 8 % à 15 % (33 % pour Next), ce qui peut paraître paradoxal pour le commun des mortels. Les algorithmes mis en place par les « data scientists » après croisement des données ventes en ligne, adresses IP, ventes « in store » et autres clicks sur les articles en ligne, ont suggéré que la taille moyenne des  « flagships » dans les centres commerciaux devait être plus grande pour combiner l’offre en ligne et hors ligne (in-off), et créer une forme « d’écosystème » pour l’enseigne.

Parallèlement à l’accroissement des surfaces, la profitabilité des boutiques dans les centres commerciaux a elle aussi été en hausse. Au-delà d’une rationalisation des coûts de la hausse de la productivité, soit les ventes par mètre carré, a été tirée par la gestion des stocks, elle aussi ultranumérisée mais pas seulement : les puces émettrices de radio-fréquences sur les codes-barres des différents articles ne se contentent pas de donner le prix en caisse, elles servent aussi à gérer les stocks et à récupérer les données à distance depuis le lieu d’achat jusqu’au lieu d’habitation – et forcément de la potentielle zone de chalandise – information vitale, pour les enseignes, mais également pour les centres commerciaux.

Les foncières européennes ont bien compris que l’innovation était la clé de voûte et du leadership en matière de commerce. Aux cartes de fidélité ont succédé les apps, qui peuvent être « sésames » ou « gadgets », selon les modules qu’elles développeront. À titre indicatif, 50 % des Français sont équipés d’un smartphone et près de 55 % en Grande-Bretagne et en Suède, ce qui laisse présager que la mutation des centres doit s’accélérer pour ne pas perdre ses chalands, plus volages que par le passé.

L’investissement technologique en infrastructure pour favoriser le « big data » est la nouvelle R&D de demain des centres commerciaux, au-delà de la simple app. Les données récupérées par géolocalisation et les algorithmes développés par les « data scientists » sont les nouveaux outils de prédilection pour donner une information très fine, des clients, de leurs déplacements, de leurs habitudes de consommation et de leur lieu de résidence, par exemple. Ils créent un cercle vertueux pour un shopping plus ciblé et, forcément, augmentent la dépense par tête du panier moyen au sein du centre commercial.

La foncière britannique Hammerson utilise depuis 2013 l’application Kudos (littéralement « gloire, prestige » en anglais), carte de fidélité VIP disponible sur les smartphones. Cette application customise en temps réel les offres envoyées aux  « shoppers » du centre. Sur l’ensemble de son portefeuille, Hammerson montre que l’utilisation de cette application augmente le temps passé dans le centre de plus d’un tiers, et multiplie le nombre de boutiques visitées par 1,1. On peut imaginer qu’en recevant un « voucher » à dépenser dans une certaine boutique, le « shopper » y passera plus de temps pour dénicher l’article de ses rêves – même si, de prime abord, il n’était pas très emballé.

La technologie « iBeacon » va plus loin que l’application Kudos. Elle combine les mondes digital et réel via une application mobile et dispose du bluetooth. L’enjeu est d’envoyer une information dite « contextuelle », soit la bonne information à la bonne cible à la bonne localisation comme une promotion : un traditionnel  « marketing in store ». Parallèlement, c’est un puissant moyen de récupérer les informations (soit un volume de statistiques important) sur ceux qui ont téléchargé l’application. Mathématiquement, il s’agit d’optimiser la propension à l’achat de la cible et, d’un point de vue marketing, de personnaliser la relation client cross-canal. L’iBeacon est indéniablement un puissant outil d’analyse en temps réel, mais pas seulement, car les données liées à l’espace physique ou sur le  comportement des visiteurs sont stockées, à la manière d’un Google Anatytics pour le monde réel. Cette  technologie a été utilisée par British Land pour la première fois en 2013, durant sa traditonnelle « ladies night », organisée pour son centre Meadowhall : le succès a été tel qu’il est maintenant pérenne. En téléchargeant l’application, les « shoppeuses » recoivent des promotions customisées sur leur smartphone. L’application cible l’âge, les goûts, et autres variables clés pour déclencher l’achat « d’impulsion » du consommateur, même si cela n’en est plus vraiment un. Cette technologie connaît probablement mieux la « shoppeuse » que la « shoppeuse » ne se connaît elle-même. La mise en place de cette activité a donné lieu à des pics d’activité, de trafic et de chiffres d’affaires pour l’ensemble des enseignes : la dépense par tête a, de fait, été forcément bien au-delà de la dépense moyenne de la « shoppeuse » représentative, puisque les offres sont hiérarchisées et organisées par groupes de « shoppeuses », selon un vecteur multicritères.

En France, Darty aurait été accompagné par Bealder, startup française, sur le même principe pour mieux satisfaire les besoins de ses clients.

Aux États-Unis, cette technologie est disponible via l’application Shopkick. L’entreprise a été pionnière en équipant ces iBeacons chez American Eagle, l’enseigne de mode fast fashion, et Macy’s, la chaîne de grands magasins américaine. Elle explique probablement les rebonds d’activité de Macy’s au-delà des traditionnels effets de saisonnalité.

Les nouvelles techniques de collecte d’informations et de données par ces nouvelles technologies depuis les smartphones sur les comportements de consommation peuvent être  représentées par « heatmap » ou en encore par « eye tracking » (comme le faisaient autrefois les études marketing), de manière statique ou dynamique, via le temps et l’espace : une visualisation en 3D quasi magique qu’offrent les dernières techniques numériques. Les volumétries de données en jeu ne sont plus un problème ; la variété non plus, tant la démultiplication des outils de collecte est sophistiquée et puissante. Quant à la fréquence à laquelle les données sont générées, elle peut être « quasi infinie ». Le champ d’analyse est immense et le  « data scientist » peut faire parler les données, de manière descriptive, pour dégager les tendances ou de manière inférentielle pour dégager des prédictions. Ces nouvelles technologies deviennent fondamentales pour repenser le retail mix de demain, développer de nouveaux produits, espaces de loisir et autre, et refidéliser le consommateur.

Les résultats trimestriels ou annuels des grandes foncières en Europe démontrent que la productivité des boutiques s’est améliorée, le couple « big data » et « datamining » en constituant les principaux facteurs, même si non formulés en tant que tels. À l’opposé du spectre, les centres secondaires, souvent petits, qui ne peuvent endiguer la baisse de leur productivité en raison des ventes en ligne. Ces petits centres ne peuvent s’équiper de telles technologies au regard du coût d’entrée de l’infrastructure.

Aussi, la polarisation entre les performances des centres commerciaux telle qu’observée à l’échelle européenne ne s’explique plus seulement par un différentiel de richesse entre les zones de chalandise : elle est aussi le fait de la capacité à mettre en place ces nouvelles innovations pour générer du chiffre d’affaires et, in fine, du rendement. Cela est incontestablement plus aisé pour une grande foncière qui bénéficie d’économies d’échelle via un effet portefeuille ; cela l’est nécessairement moins pour les détenteurs de petits centres ou les « petits » investisseurs.

Il est indéniable que les smartphones sont les espions d’un nouveau genre, soit le « big brother » de la révolution numérique. Ils sont aussi le facteur de mutation du commerce en général et du centre commercial en particulier. Comme le disait le psychologue et prix Nobel d’économie Kahneman « c’est le souvenir de l’expérience qui influence le consommateur dans son choix de répéter une expérience via l’émotion ». Or, Kahneman disait aussi, dans son dernier best-seller Thinking Fast and slow publié en 2011, que  « les goûts et les décisions sont formés par les souvenirs, mais les souvenirs peuvent être faux ».  Le « big data » est donc l’arme infaillible de la mémoire, par le stockage des données. Quant au « datamining », il crée ces aspirations émotionnelles si nécessaires à l’achat. Il semblerait que l’écart de performance des rendements des centres commerciaux continue de subsister et la polarisation du marché de s’accentuer via les développements récents et à venir. Un processus « quasi darwiniste » paraît s’opérer sur le marché ; seuls les centres commerciaux susceptibles de s’équiper des nouvelles infrastructures du commerce 3.0 seront capables de générer un plus fort rendement locatif et,  mécaniquement, un rendement en capital plus élevé que leurs pairs.

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