2014-06-25

En France la loi du 16 octobre 1919 relative à l’utilisation de l’énergie stipule que « nul ne peut disposer de l’énergie [...] des cours d’eau sans une concession ou une autorisation de l’État ». Seulement la libéralisation du marché de l’énergie impulsée par Bruxelles contraint aujourd’hui le gouvernement à réfléchir à de nouvelles modalités d’organisation de la filière. Après la concertation organisée en février 2012 par la Direction Générale de l’Energie et du Climat, le projet de loi sur la transition énergétique apporte une nouvelle perspective pour l’hydroélectricité française en précisant les conditions de création des sociétés d’économie mixte…

Le parc hydroélectrique sous pression

Actuellement, le parc hydroélectrique français est en grande partie contrôlé par EDF et GDF Suez (via deux filiales la Société hydroélectrique du Midi et la Compagnie nationale du Rhône), les deux entreprises gèrent respectivement 87% et 20% des installations en exploitation.(1)

La France résiste à l’ouverture à la concurrence

Début juillet 2012, le Conseil Européen  réaffirme que de « nouvelles étapes sont nécessaires pour améliorer l’accès d’opérateurs alternatifs à la capacité de production en France, comme la production hydroélectrique ». Effectivement, en 2006 la Commission européenne avait déjà menacé la France d’effectuer « un recours en manquement pour cause d’absence de mise en concurrence des entreprises gestionnaires des barrages ».

L’énergie hydraulique en France

En France, une centaine de centrales sont associées à des retenues d’eau créées par des barrages, et plus de 2000 installations sont installées « au fil de l’eau ».

La puissance hydraulique  installée des 399 barrages français est de 25 GW (25 000 MW) en 2012, soit environ 25 % de la puissance de l’ensemble des centrales électriques contribuant à l’alimentation des réseaux électriques publics,

640 : en 2014, le groupe EDF possède 640 barrages et 439 centrales hydroélectriques.

Les tractations avaient commencé en 1997 lorsque Lionel Jospin a entamé la libéralisation du secteur de l’énergie. Pour ce qui concerne l’hydroélectricité, c’est finalement le gouvernement de François Fillon en 2010 qui doit soumettre à la concurrence de nos partenaires européens, la première filière d’énergie renouvelable du pays…

Jospin promet alors d’ouvrir 20% du parc hydraulique à la concurrence par l’inévitable mécanisme de l’appel d’offres ; il concernerait alors 49 installations regroupées en 10 lots d’une puissance de 5300 MW sur les 75,7 TWh produits en 2013.

Seulement depuis le décret de septembre 2008 (2), « le renouvellement des concessions hydrauliques [est soumis] à des règles de mise en concurrence s’inspirant de celles fixées par la loi Sapin et son décret d’application du 24 mars 1993 pour les délégations de service public ». Par ailleurs, pour adapter le droit français aux exigences communautaires, le directeur général de la DGEC, Pierre-Marie Abadie et la chef du bureau de la production électrique, Clémentine Marcovici avaient souhaité revoir le calendrier présenté par le communiqué d’avril 2010 de Jean-Louis Borloo.

Des négocations sur … la méthode

Pour élaborer une feuille de route claire, le Ministère de l’Energie a donc relancé les concertations en février 2012 en présence notamment du spécialiste des Partenariats Public / Privé du Groupe Edmond de Rothschild, Alain Porchet, et de l’expert de l’ingénierie de projet d’infrastructure de la Caisse des Dépôts, Emmanuel Tremouille. A cette époque, les discussions portaient sur les modalités de la procédure d’appel d’offres et sur « la phase de « dialogue » prévue dans les procédures de passation »…

Cela étant, un nouveau rebondissement est venu bouleverser les travaux des services du ministère de l’Energie sous l’autorité de Delphine Batho. L’ancienne disciple de Ségolène Royal annonçait le 24 octobre 2012, devant la commission des affaires économiques de l’Assemblée Nationale, « l‘étude de scénarios alternatifs » qui seraient « compatibles avec les règles européennes ». Une déclaration qui est venue brouiller la volonté du gouvernement, toutefois rapidement clarifiée avec le renvoi de l’élue des Deux-Sèvres…

Comme le précisait alors le juriste Arnaud Gossement, « il n’y a pas de scénarios alternatifs, c’est la loi Sapin qui s’applique (…) le gouvernement cherche à gagner du temps ».

Ce coup politique révélait en réalité le changement de stratégie de la nouvelle équipe ministérielle, ce qui a fortement contrarié les acteurs étrangers et leur armée de consultants mobilisés, ainsi que la Cour des Comptes. Dans un courrier daté du 21 juin, les sages de la rue Cambon (3) pointaient notamment l’irrégularité du procédé au regard du droit européen mais surtout un manque à gagner pour l’exercice budgétaire en cours.

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