2014-01-04

J'ignore pourquoi les articles de Klaus Polkehn sur le sionisme n'ont jamais été traduits intégralement en français.



Cette lacune est maintenant en partie réparée puisque, après l'article sur les relations entre le mouvement sioniste et l'impérialisme, notamment allemand, dont
je vous ai déjà livré la traduction, je vous propose un autre article qui tombe à point nommé en ce jour où les sionistes
redoublent de condamnations morales, en attendant parfois des mesures plus pratiques, contre ceux qui selon eux ne prendraient pas assez au sérieux ce qu'ils appellent « holocauste » ou
« shoah. »

« Ne pas prendre au sérieux cet « holocauste » c'est par exemple contester le chiffre officiel de 6 millions de Juifs tués pendant la deuxième
guerre mondiale ou nier l'existence des chambres à gaz.

Mais c'est aussi situer le malheur des Juifs à l'époque dans une histoire commune des malheurs qui ont accablé et continuent à accabler l'humanité. C'et
précisément l'erreur commise par le député Anglais David Ward qui provoque un tollé chez les sionistes parce que, adepte
convaincu de la religion de l'holocauste, il pense être autorisé, au nom de principes universels, à critiquer les Juifs qui spolient et martyrisent le peuple palestinien. Les Juifs en question
sont bien entendu les sionistes et personne d'autre.

Mais il est interdit de critiquer l'entité sioniste parce que c'est le plus souvent une expression voilée d'antisémitisme et que comparer peu ou prou ses
agissements à ceux du nazisme relève du sacrilège.

Pourtant, s'il est des gens qui devraient faire profil bas quand on parle du nazisme, ce sont bel et bien les sionistes ainsi qu'on peut le constater en lisant
le texte qui suit de Klaus Polkehn. Ce dernier présente de manière détaillée la somme des relations connues entre la clique sioniste et le régime nazi dès l'arrivée au pouvoir d'Hitler, une
clique sioniste qui aurait dû être jugée à Nuremberg avec le reste de la bande.

Et contrairement aux apparences, la politique prosioniste des puissances européennes, de l'Allemagne tout particulièrement, loin de s'inscrire en rupture avec
celle du fascisme hitlérien, se situe en fait dans une étonnante continuité. Une continuité dont la perception est cependant rendue très difficile par tout le brouillard émotionnel entretenu sur
la première moitié du 20ème siècle et une guerre qu'on a voulue inanalysable par l'opinion publique.

L'article sur lequel j'ai basé ma traduction est en anglais (l'article original de Klaus Polkehn est écrit en allemand). Je n'ai pas reproduit l'important
appareil de notes de l'auteur qui renvoie aux documents sur lesquels il s'est appuyé. Vous trouverez toutes ces références dans l'article en anglais disponible en format pdf (lien
ci-dessous)

TheSecretContacts-ZionismAndNaziGermany1933-1941 - journal-of-palestine-studies - polkehn-klaus-vol-5-no-3-4-1976-pp-54-82_text (1).

Les contacts secrets : le sionisme et l'Allemagne nazie, 1933 - 1941

Par Klaus Polkehn, Journal of Palestine Studies - 1976 traduit de l'anglais par Djazaïri

L'antisémitisme devint une politique officielle du gouvernement allemand quand Hitler fut nommé chancelier du Reich allemand le 30 janvier 1933. Le printemps 1933
avait aussi vu le commencement d'une période de discrète coopération entre le sionisme et le régime fasciste allemand afin d'accroître le flux de capitaux et d'émigrants Juifs vers la Palestine.
Les autorités sionistes avaient longtemps réussi à maintenir cette coopération secrète, et ce n'est que vers le début des années 1960 que des critiques se sont exprimées ici ou là. La réaction
sioniste a généralement consisté en des déclarations selon lesquelles leurs brefs contacts avec l'Allemagne nazie avaient été entrepris à seule fin de sauver des vies juives. Mais ces contacts
étaient d'autant plus remarquables qu'ils avaient eu lieu à une époque où de nombreux juifs et organisations juives exigeaient un boycott de l'Allemagne nazie.

A l'occasion de la 16e convention du Parti Communiste Israélien, un document proposé au début de la conférence affirmait que « après la prise de
pouvoir par Hitler en Allemagne, alors que toutes les forces antifascistes dans le monde ainsi que la grande majorité des organisations juives avaient proclamé un boycott contre l'Allemagne
nazie, des contacts et une collaboration existaient entre les dirigeants sionistes et le gouvernement hitlérien. » Le document citait les propos tenus par le dirigeant sioniste Eliezer
Livneh (qui était le rédacteur en chef de l'organe de la Haganah pendant la deuxième guerre mondiale) lors d'un symposium organisé par le journal israélien Maariv en 1966, qui expliquait
« que pour les dirigeants sionistes, secourir les juifs n'était pas un but en soi, mais seulement un moyen » (c'est-à-dire pour établir un Etat juif en Palestine). S'interroger sur la
réaction du mouvement sioniste face au fascisme allemand qui, pendant ses douze années au pouvoir, a assassiné des millions de juifs relève du tabou aux yeux des leaders sionistes. Ce n'est que
rarement qu'on peut tomber sur des preuves authentiques ou des documents au sujet de ces questions. Cette enquête rassemble des informations recueillies jusqu'à tout récemment sur certains
aspects importants de la coopération entre les fascistes et les sionistes. La nature des choses veut que cette enquête ne présente pas une image complète. Cela ne sera possible que quand les
archives (surtout celles qui sont en Israël) dans lesquelles les documents concernant ces évènements sont enfermés à double tour seront accessibles aux chercheurs universitaires.

L'avènement d'Hitler

Pour les dirigeants sionistes, l'arrivée d'Hitler au pouvoir était grosse de la possibilité d'un afflux d'immigrants en Palestine. Auparavant, la majorité des juifs
allemands, qui se considéraient eux-mêmes comme allemands, n'avaient guère de sympathie pour l'entreprise sioniste. Les statistiques allemandes, compilées avant la prise du pouvoir par les
fascistes, classait la minorité juive uniquement en tant que « confession religieuse » et ce sont les législateurs fascistes qui introduiront la notion de « race » en tant que
caractéristique et incluront de la sorte même les descendants assimilés issus de la communauté juive dans la catégorie [raciale, NdT] juive.

Selon les statistiques, 503 000 juifs vivaient en Allemagne en 1933, constituant ainsi 0.76 % de la population totale. 31 % de tous les juifs allemands résidaient
dans la capitale Berlin où ils représentaient 4,3 % de la population de la ville. Les statistiques allemandes indiquent aussi que la proportion de juifs dans la population de l'Allemagne avait
diminué entre 1871 et 1933, passant de 1,05 % à 0.76 %.

Ces juifs allemands étaient dans leur écrasante majorité non sionistes ou antisionistes et, avant 1937, l'Union Sioniste pour l'Allemagne (Zionistische Vereinigung
für Deutschland, ZVFD) avait beaucoup de mal à se faire entendre.

Parmi les juifs recensés en Allemagne en 1925, il n'y en avait par exemple que 8739 (pas même 2 %) susceptibles de voter dans les conventions sionistes (c'est-à-dire
en qualité d'adhérents d'organisations sionistes). Aux élections régionales de la communauté juive tenues en Prusse en février 1925, seulement 26 des 124 personnes élues appartenaient à des
organisations sionistes. Un rapport de Keren Hayesod présenté à la 24e session de la ZVFD en juillet 1932 constatait : « dans le processus d'évaluation du travail de Keren Hayesod
en Allemagne, on ne doit pas oublier qu'n Allemagne, nous devons tenir compte non seulement de l'indifférence de larges cercles juifs mais aussi de leur hostilité. »

Par conséquent, à l'époque de l'avènement au pouvoir d'Hitler, les sionistes étaient pour l'essentiel une petite minorité insignifiante et peu influente et d'étaient
les organisations non sionistes qui jouaient un rôle dominant parmi les juifs. A leur tête se trouvait la Centralverein deutscher Staatsbürger jüdischen Glaubens (CVn ou Union Centrale des
Citoyens Allemands de Confession Juive), fondée en 1893 qui, ainsi que son nom le laisse entendre, considérait les juifs allemands comme des allemands et considérait que son premier devoir était
de combattre l'antisémitisme.

En accord avec cette position fondamentale, la CVn avait aussi nettement affirmé son rejet du sionisme. C'est ainsi qu'une résolution adoptée par la principale
instance de la CVn le 10 avril 1921 se concluait par ces mots : « si le travail de colonisation en Palestine n'était qu'une affaire d'aide et d'assistance, alors, du point de vue de la
Centralverein, il n'y aurait rien à redire à la promotion de ce travail. Cependant, la colonisation en Palestine est d'abord l'objet d'une politique nationale juive et sa promotion et son soutien
doivent donc être rejetés. » En conséquence, c'était la CVn qui, pendant les années précédant l'arrivée d'Hitler au pouvoir, se tenait à l'avant-garde des partis et organisations
progressistes dans leur lutte contre l'antisémitisme. Au sujet de cette attitude, l'écrivain juif Werner E. Mosse remarquait : « Alors que les dirigeants de la CV considéraient comme de leur
devoir de représenter les intérêts des juifs allemands dans l'action et le combat politiques, le sionisme prenait position pour ... une non participation des juifs à la vie publique allemande. Il
rejetait par principe toute participation à la lutte menée par la CVn. »

L'attitude des sionistes à l'égard de la menace d'une domination fasciste totale en Allemagne était déterminée par certains présupposés idéologiques communs : les
fascistes tout comme les sionistes croyaient aux pseudo théories raciales, et les uns comme les autres partageaient la croyance dans des généralisations mystiques comme le caractère national»
(volkstum) et la « race » les uns et les autres étaient chauvins et penchaient pours « l'exclusivisme racial. » C'est ainsi que l'officiel sioniste Gerhart Holdheim écrivait
en 1930 dans une livraison du Süddeutsche Monatshefte consacrée à la question juive (une publication dans laquelle, entre autres, des antisémites notoires faisaient connaître leurs opinions) :
« Le programme sioniste conçoit la communauté juive comme étant homogène et indivisible, sur une base nationale. Le critère qui définit la communauté juive n'est pas al confession ou la
religion, mais un sentiment global d'appartenance à une communauté raciale que réunissent des liens de sang et historiques et qui est déterminée à préserver son individualité nationale. »
C'état le même langage, la même phraséologie que celle utilisée par les fascistes. Il va de soi que les fascistes allemands voyaient d'un bon œil les conceptions sionistes, tel Alfred Rosenberg,
le principal idéologue du parti nazi qui écrivait :

« le sionisme doit être soutenu vigoureusement de sorte à ce qu'un certain nombre de juifs allemands partent chaque année en Palestine ou que, du moins, on leur
fasse quitter le pays. » Considérant une déclaration de ce genre, Hans Lamm écrira plus tard : « ...il est incontestable que dans les premières étapes de leur politique juive, les
nationaux socialistes pensaient qu'il convenait d'adopter une attitude pro sioniste. »

De manière très perspicace, la CVn avait remarqué que la reconnaissance par les sionistes de «certains postulats des nationalistes allemands » avait donné des
munitions aux antisémites et, dans une déclaration de politique générale émise par la CVn il était même question du sionisme comme ayant mis au mouvement [juif] un «coup de poignard dans le dos»
dans la lutte contre le fascisme.

Mais les sionistes pensaient que seul Hitler pouvait pousser les juifs allemands antisionistes dans le bras du sionisme. Robert Welsch, qui était alors rédacteur en
chef du journal sioniste allemand Jüdische Rundschau déclarait le 8 janvier 1933 (trois semaines après l'arrivée d'Hitler au pouvoir) lors d' une réunion du comité local de la ZVFD : « Le
caractère antilibéral du nationalisme allemand [i.e. les tendances réactionnaires de la bourgeoisie allemande - K.P.] s'accordaient avec la position antilibérale du sionisme et nous nous trouvons
maintenant devant une chance de trouver, non une base pour une compréhension [mutuelle, NdT] mais pour la discussion. »

L'appel à Hitler le 30 janvier pour prendre la tête du gouvernement fut suivi par une mainmise sur toutes les positions d'autorité par le parti national Socialiste,
ce qui signifiait que des antisémites déclarés étaient désormais au pouvoir. Les juifs allemands regardaient ces évènements avec appréhension parce que dans le programme du parti nazi figuraient
le retrait de la citoyenneté aux juifs (Point 5) la révocation des Juifs exerçant dans la fonction publique (Point 6) ainsi que l'expulsion de tous les Juifs qui avaient immigré en Allemagne
après le 2 août 1914 (Point 8).

Seuls les sionistes voyaient des avantages à cette tournure des évènements (L'historien britannique Christopher Sykes, qui n'était certes pas antisioniste, est de
l'opinion « que les dirigeants sionistes étaient déterminés dès le tout début du désastre nazi à retirer un avantage politique de la tragédie. »

La première expression publique de cela fut l'œuvre du Dr Joachim Prinz, un rabbin berlinois qui était un sioniste convaincu et qui immédiatement après le 30 janvier
1933 décrivit la prise de pouvoir par Hitler comme étant le « début du retour des juifs à leur judaïsme. »

Évoquant le terrorisme fasciste contre les juifs allemands, Prinz écrivait : « Nous n'avons plus nulle part où nous cacher. Au lieu de l'assimilation, nous
souhaitons la reconnaissance de la nation juive et de la race juive. » Ce point de vue n'était pas du tout celui d'un individu isolé. On pouvait lire le 13 juin 1933 dans l'organe officiel
de la ZVFD, le Jüdische Rundschau :

« Le sionisme reconnaît l'existence d'une question juive et veut la résoudre d'une manière généreuse et constructive. A cette fin, il veut s'attirer le soutien
de tous les peuples ; ceux qui ont de la sympathie pour les juifs tout comme ceux qui leur sont hostiles, dans la mesure où, du point de vue sioniste, ce n'est pas une question sentimentale mais
un véritable problème à traiter à la solution duquel tous les peuples sont intéressés. »

En recourant à cette argumentation, le sionisme adoptait la même ligne politique que les fascistes.

Le 21 juin 1933, les sionistes firent une déclaration officielle sur leur politique à l'égard de la prise de pouvoir par les fascistes : « La déclaration de
l'Union Sioniste pour l'Allemagne en Référence à la Position des Juifs dans la Nouvelle Allemagne. » Dans une partie de ce long document, il était souligné que « Notre avis est qu'un
des principes du nouvel état allemand d'exaltation nationale rendrait possible une solution satisfaisante. » Dans son document, la ZVFD, jetait un regard sur l'histoire de la situation des
juifs en Allemagne, en se servant d'un vocabulaire fasciste comme les « liens du sang et de la race » et, exactement comme Hitler, postulait une « âme spécifique » pour les
juifs. Les sionistes affirmaient ainsi : « Pour le juif aussi, l'origine, la religion, la destinée commune et la conscience de soi doivent avoir une signification décisive dans sa façon de
vivre. Ce qui nécessite de surmonter l'individualisme égoïste qui s'est répandu à l'époque libérale, et devrait être réalisé à travers l'acquisition d'un sentiment commun d'unité et en assumant
avec joie notre responsabilité. »

Après cette admission et cette reprise des thèses fascistes, suivait une reconnaissance ouverte de l'Etat fasciste : « Sur le sol du nouvel Etat [i.e.
l'Allemagne fasciste], qui a établi le principe de la race, nous volons organiser l'ensemble de la structure de notre communauté de la même manière, de sorte que, pour nous aussi, l'aboutissement
de la revendication de notre patrie puisse aboutir dans la sphère qui nous est allouée. » En conclusion, les sionistes condamnaient la lutte contre le régime hitlérien menée par les forces
antifascistes qui avaient appelé au printemps 1933 au boycott économique de l'Allemagne nazie. « La propagande pour le boycott qu'ils sont en train de faire contre l'Allemagne est dans sa
nature même contraire au sionisme dès lors que le sionisme ne veut pas combattre mais convaincre et construire. »

Pour saisir toute la portée de cette déclaration du ZVFD, il faut ici aussi se souvenir de ce qui l'a précédée. La persécution des juifs avait déjà commencé et avait
déjà atteint un premier point culminant avec un grand pogrom qui avait touché toute l'Allemagne le 1er avril 1933. Dans les premiers jours de mars 1933, les citoyens juifs allemands
avaient été maltraités dans des viles allemandes (par exemple des boutiques juives avaient été pillées à Brunswick le 11 mars et, le 13 mars, des avocats juifs avaient été malmenés devant le
palais de justice de Breslau [aujourd'hui Wroclaw en Pologne]. Les autorités fascistes avaient promulgué la loi sur la restauration de la fonction publique [le 7 avril 1933] qui aura pour
conséquences, entre autres, la révocation de 2000 chercheurs et professeurs juifs des universités. Le 18e congrès sioniste, qui s'était réuni à l'été 1933 n'y voyait pas de problème :
quand, pendant las session du congrès sioniste qui se tenait le 24 août 1933, la situation des juifs en Allemagne allait être débattue, le présidium du congrès a fait en sorte d'empêcher la
discussion. Il avait aussi réussi à empêcher l'introduction d'une résolution appelant au boycott des marchandises allemandes, et avait à la place insisté fortement sur la nécessité d'organiser
l'émigration des juifs allemands. Les protestations contre les évènements en cours en Allemagne avaient été réduites au plus strict minimum.

Les fascistes récompensèrent les sionistes pour leur «retenue » et permirent au ZVFD de poursuivre ses activités sans entraves. (C'était au moment où tous les
partis et organisations démocratiques et antifascistes en Allemagne étaient soumis à une répression des plus rigoureuses et où leurs cadres et leurs membres étaient en prison ou en camp de
concentration) Dans le même temps, les fascistes mettaient toutes sortes d'obstacles sur le chemin des organisations non sionistes. Ces entraves touchaient en tout premier lieu la CVn parce que,
avant 1933 déjà, les fascistes voyaient dans la CVn « leurs principaux opposants juifs, » ainsi qu'il est indiqué dans de nombreux exemples tirés de la presse nazie.

La CVn avait toujours accusé les sionistes de monter peu d'intérêt pour la «lutte [contre le fascisme ... et qu'ils [les sionistes] suivaient une politique
d'indifférence [devant l'emprise du péril fasciste] parce qu'il ne se sentait pas concerné.»

Le 1er mars 1933, les SA, des paramilitaires fascistes, occupaient le siège central de la CVn pour le fermer. Le 5 mars 1933, la CVn était interdite en
Thuringe pour cause de « complot de haute trahison ». Dans le même temps, l'Etat nazi se tournait contre d'autres organisations juives non sionistes, comme la « Ligue du Reich des
Anciens Combattants », par exemple, qui représentait une tendance juive nationaliste allemande. L'« Union Nationale des Juifs Allemands » était également interdite.

Avec ce soutien fasciste, les dirigeants de l'Union Sioniste pour l'Allemagne purent obtenir pour la première fois une position dominante auprès des juifs allemands.
A l'automne 1933, l'« Association du Reich des Juifs en Allemagne» fut fondée et de grandes organisations juives, dont le CV et le ZVFD y participèrent. Le chef de cette organisation était
le rabbin Leo Baeck dont la personne reflétait l'attitude ambivalente de l'organisation à l'égard du sionisme ; Baeck était à la fois membre de la principale instance du CV, et président du fonds
de colonisation juive « Keren Hayesod » en Allemagne.

L'organisation nouvellement créée offrait aux dirigeants sionistes une plateforme plus large pour leurs activités.

L'Association du Reich n'avait pas été, comme on l'a parfois prétendu, créée sur instruction des autorités fascistes. Ball-Kaduri écrit :

« Il s'est avéré que la création de l'Association du Reich se fit sans aucune interférence de l'Etat ; une fois le processus de structuration achevé,
l'organisation a simplement été déclarée au ministère de l'intérieur du Reich. - la Gestapo ne s'y était pas du tout intéressée.» C'est seulement le 4 juillet 1939 que l'ordonnance concernant la
création obligatoire d'une Union des Juifs du Reich en Allemagne fut promulguée, amenant à changer le nom de l'organisation qui passa de celui de Députation à celui d'Union. Cette ordonnance
rendait obligatoire l'adhésion de tous les Juifs à l'Union du Reich. Le paragraphe 2 de cette ordonnance satisfaisait également un des objectifs du sionisme en affirmant : «L'Union du Reich a
pour objectif la promotion de l'émigration de tous les Juifs. »

Le parti nazi, à ses échelons les plus élevés, autorisait des activités politiques de divers types. A cet égard, par exemple, la police politique bavaroise notait le
9 juillet 1935 :

« Les organisations sionistes collectent depuis un certain temps de l'argent auprès de leurs adhérents et de leurs sympathisants avec l'intention de promouvoir
l'émigration, en achetant de la terre en Palestine, et d'obtenir un soutien pour la colonisation en Palestine. Ces collectes n'ont pas besoin d'obtenir une autorisation administrative parce
qu'elles se font dans des cercles juifs fermés. De plus, la police de l'Etat n'a pas d'objections contre l'organisation de ces réunions dès lors qu'elles portent sur ce genre de fonds qui ont
pour but de promouvoir la résolution en pratique du problème juif. »

Après 1933, les fascistes permirent aux sionistes de continuer avec leur propagande. Tandis que tous les journaux en Allemagne étaient placés directement sous
supervision du Ministère de la Propagande (les journaux publiés par les communistes, le parti Social-démocrate ou les syndicats et d'autres organisations progressistes étaient interdits) le
Jüdische Rundschau pouvait paraître sans entraves.



© Yad Vashem
1936: réunion berlinoise de la ZVFD, l’organisation sioniste en Allemagne

Winfried Martini, correspondant à l'époque de la Deutsche Allgemeine Zeitung à Jérusalem et qui, selon son propre témoignage, avait des « liens personnels
étroits avec le sionisme » observa plus tard ce « fait paradoxal » que « de toute la presse, c'était la presse juive i.e. sioniste] qui pendant des années conserva une
certaine marge de liberté qui avait été complètement retirée à la presse non juive. » Il ajoutait que dans le Jüdische Rundschau, on pouvait très souvent trouver des opinions critiques à
l'égard des nazis sans pour autant que cela se traduise par l'interdiction du journal.

C'est seulement à partir de fin 1933 que cela conduisit à une interdiction de la vente de ce journal à des non juifs. Les Juifs devaient, c'est ce que souhaitaient
les fascistes, être convertis au sionisme même si cela devait se faire avec une argumentation dirigée contre les fascistes. De la sorte, la diffusion de ce journal sioniste qui était auparavant
assez faible connut une rapide augmentation.

Que le journal sioniste ait pu se féliciter d'être dans les bonnes grâces des dirigeants fascistes est compréhensible quand on examine la position de cet organe de
presse vis-à-vis du boycott des commerces juifs du 1er avril 1933. Ce pogrom organisé contre des citoyens Juifs en Allemagne, qui avait soulevé l'indignation dans le monde entier et
provoqué colère et répulsion chez tous les Allemands honnêtes n'avait pas été condamné franchement par le journal qui l'évaluait plutôt comme une confirmation de la justesse de la position
sioniste : « l'erreur fatale de nombreux Juifs [de croire] que quelqu'un peut représenter les intérêts juifs sous une autre casquette [autre que juive en tant que telle, NdT] est
écartée, » écrivait le Jüdische Rundschau en parlant du pogrom : « Le 1er avril 1933 peut être un jour de réveil juif et de renaissance juive. »

La liberté d'action des sionistes incluait aussi l'édition de livres à côté de leur journal. Jusqu'en 1938, plusieurs maisons d'édition (dont entre autres, Jüdische
Verlag à Berlin-Charlottensburg et Schochen-Verlag à Berlin) pouvaient publier sans entraves de la littérature sioniste. C'est ainsi que purent être publiés en toute légalité dans l'Allemagne
fasciste des textes de Chaim Weizmann, David Ben Gourion et Arthur Ruppin.

Les premiers jours de la domination nazie en Allemagne virent aussi le début d'une collaboration économique entre les fascistes et les sionistes. En mai 1933, la
compagnie sioniste de plantation de citronniers en Palestine, Hanotea», avait déjà sollicité du ministère de l'économie du Reich la permission de transférer du capital d'Allemagne, ouvrant ainsi
la voie à l'accord de transfert (Haavara) qui interviendra plus tard.

La compagnie « Hanotea » achetait les marchandises allemandes dont elle avait besoin, les payant avec des comptes bancaires en Allemagne d'émigrants Juifs.
Les émigrants quittaient alors l'Allemagne et recevaient l'équivalent en immobilier de ce qui avait été prélevé sur leurs comptes. Comme l'expérience avec Hanotea semblait avoir été une réussite
aux yeux des dirigeants sionistes, des négociations furent entreprises à l'été 1933 entre la partie sioniste et le ministère allemand de l'économie, ce qui aboutit à la signature de ce qu'on a
appelé l'accord Haavara.

Les négociations de 1933 sur la Haavara sont un des épisodes de l'histoire du sionisme sur lequel un voile a été jeté, vu qu'elles constituaient un exemple de
coopération économique au moment où les forces antifascistes essayaient de prendre la tête d'un boycott de l'Allemagne nazie. En évoquant cette démarche de boycott, Nahum Goldmann qui occupait
alors une position importante dans le mouvement sioniste, écrira plus tard :

« Cependant, beaucoup d'organisations juives refusèrent d'y participer [au boycott], soit parce que beaucoup de firmes juives étaient en fait des représentantes
commerciales d'entreprises allemandes, ou parce que certaines organisations juives, celles des Etats Unis plus précisément, avaient adopté la position selon laquelle in était antipatriotique
d'organiser un boycott contre un pays avec lequel son propre pays entretient des relations commerciales normales. »

Cet exposé est sans doute valable pour les raisons évoquées prises une à une, mais il occulte néanmoins la vérité, parce que ceux qui ont rompu le boycott ont
d'abord été les sionistes eux-mêmes.

Il y a des versions divergentes sur les circonstances qui ont amené à l'accord Haavara. Selon une version, l'initiative des négociations avec les autorités fascistes
serait venue des l'Union Sioniste pour l'Allemagne qui avait intéressé au projet Hoofien, le directeur-général de l'Anglo-Palestine Bank en Palestine. Hoffien, est-il rapporté, s'était rendu à
Berlin en 1933 et était entré sur place en négociations avec Oberregieunsgrat Hartenstein du ministère de l'économie du Reich. (raison pour laquelle l'accord Haavara est souvent appelé aussi
l'accord Hoofien, une appellation qui réduit la responsabilité de l'ensemble de la chose au seul personnage de Hoofien). Dans la mesure où Hoofien était impliqué (une implication sans doute
nécessaire du moment où il était question d'accords concrets sur des questions de transferts qui requéraient l'expertise d'un banquier professionnel), on doit considérer qu'une affaire d'une
telle importance ne pouvait pas résulter d'une initiative privée et qu'elle n'aurait pu être mise en œuvre sans l'autorisation des institutions sionistes. On peut de fait apprendre par d'autres
publications que les négociations étaient chapeautées à Berlin par celui qui était alors le chef du département politique de l'Agence Juive : Chaim Arlosoroff. Finalement, l'accord conclu en 1935
sera approuvé officiellement par le Congrès Sioniste Mondial !

Les mots mêmes de Ball-Kaduri sont que l'accord Haavara avait été conclu « sous la forme d'une lettre adressée à Herr Hoofien par le ministère de l'économie du
Reich. Les négociations s'étaient déroulées sereinement car les Nazis avaient encore un « penchant sioniste » à l'époque.

En vertu de l'accord signé à Berlin, deux compagnies furent créées : la compagnie Haavara à Tel Aviv et une compagnie sœur baptisée Paltreu à Berlin. La procédure se
déroulait de la manière suivante : l'émigrant Juif payait avec son argent (la somme minimale était d'un millier de livres sterling) sur le compte en Allemagne de la Haavara (à la banque
Wassermann Bank de Berlin ou à la banque Warburg de Hambourg). Avec cet argent, les importateurs Juifs pouvaient acheter des marchandises allemandes pour les exporter en Palestine tout virant une
somme équivalente en livres palestiniennes dans le compte de la Haavara à l'Anglo-Palestine Bank en Palestine. Quand l'émigrant arrivait, il trouvait dans son compte une somme équivalente à celle
qu'il avait versée en Allemagne (c'est là que Ball-Kaduri observe : « après avoir déduit des frais assez élevés »).

En relation avec l'émigration vers la Palestine permis par l'accord Haavara, les sionistes fondèrent la Palestine Shipping Company qui acheta le bateau allemand de
transport de passagers « Hohenstein » qu'ils rebaptisèrent « Tel Aviv ». Le bateau fit son premier voyage vers Haïfa au
départ du port allemand de Bremerhaven au début de l'année 1935. Pendant ce voyage, le bateau portait à la poupe son nouveau nom en caractères hébraïques tandis que le swastika flottait sur son
mât ; « une combinaison d'absurdité métaphysique » écrira plus tard un des passagers. Le capitaine du navire, Leidig, était un adhérent du parti Nazi !



Le Hohenstein rebaptisé Tel Aviv sera revendu en 1937 au Japon

L'accord Haavara vouait à l'échec la démarche de boycott de l'État nazi et maintenait sans disruption pour l'économie fasciste l'accès à 'un large marché à l'export
à une époque où le commerce mondial souffrait encore des traces de crise économique internationale de1929. Ce point avait été souligné dans un mémorandum par Stuckart, le secrétaire d'État au
ministère de l'intérieur du Reich. Dans ce mémorandum, daté du 17 décembre 1937, il était observé : « Les principaux avantages [de l'accord Haavara] sont les suivants : l'influence du groupe
Haavara en Palestine a amené au résultat imprévu et inhabituel mais espéré que, de tous les endroits, la Palestine est le pays dans lequel les biens allemands ne sont pas boycottés par la partie
juive... » En même temps, la procédure Haavara a rendu possible une accélération du mouvement d'émigration juive vers la Palestine, amenant au renforcement de la position des sionistes en
Palestine. Les immigrants qui viennent d'Allemagne amènent avec eux un plus haut niveau de compétences économiques entre autres choses.

Ce qui résultait aussi de la « sélectivité ». Comme l'accord requérait le versement par l'émigrant d'un millier de livres sterling au minimum, seuls des
membres de la bourgeoisie juive étaient en mesure de profiter de ce dispositif, tandis que les travailleurs d'origine juive étaient lassés à leur destin. Ainsi, l'évaluation suivante de l'accord
de Haavara dans le cadre de l'examen de la politique raciale du fascisme peur être considérée comme parfaitement juste : le principe de solidarité qui nécessitait que les Juifs restent unis
devant leurs persécuteurs avait volé en éclats du fait d'intérêts capitalistes. Pecunia non olet. Dans le même temps, les dispositions prises par les entrepreneurs Juifs dans le seul
objectif de transférer leurs capitaux de l'Allemagne fasciste vers la Palestine étaient accueillies avec grande considération. On a affirmé que le capital envoyé au Moyen Orient était placé au
service des Juifs. En réalité cependant, cet argent servait en Palestine aux mêmes objectifs qu'en Allemagne : le profit de ses détenteurs.

Le même livre affirme que « l'Internationale Sioniste voulait que les émigrants Juifs d'Allemagne arrivent sur le sol de Palestine non comme des sans le sou
mais en tant que propriétaires d'un capital qui contribuera à l'édification d'un État capitaliste. C'est à partir de ce désir qu'a grandi l'intérêt des sionistes pour s'associer avec des
antisémites. »

De fait, avant même la création d'Israël, l'accord de transfert donna une forte impulsion à l'économie sioniste en Palestine. Des sources sionistes parlent d'une
somme de 139,6 millions de Reichsmarks - une somme énorme à l'époque - transférée d'Allemagne en Palestine. Une autre source situe le montant transféré à 8 millions de livres sterling. Ce n'est
pas une simple coïncidence si les projets les plus importants en Israël ont été créés ou dirigés par des émigrants partis d'Allemagne. La plus grande fonderie de Palestine et l'industrie du
ciment par celui qui fut à une époque directeur de la compagnie des eux et d'électricité de Berlin, le Dr Karl Landau. Le Dr Arnold Barth de Berlin, le Dr Siegfried Sahlheine de Hambourg et
Herbert Förder de Breslau furent les premiers organisateurs de la banque Leumi. Fritz Naphtals de Berlin et George Josephthal de Nuremberg transformèrent en entreprise géante l'insignifiante
«Arbeiterbank.» Certains des plus importantes firmes israéliennes furent fondées par Yekutiel er Sam Federmann de Chemnitz ( Karl-Marx-Stadt à l'époque communiste) ; l'entré Yekutiel dans le
Who's Who en Israël (1962) le présente comme un « fondateur » de 'l'Israel Miami Group' (Dan Hotel) ; le partenaire israélien du cimentier 'Isasbest' ; le fondateur et associé de
'Israel Oil Prospectors Corp, Ltd ' qui procéda au premier forage pétrolier 'Mazal 1' et présida de nombreuses autres entreprises.

Les accords économiques entre les sionistes et le fascisme allemand avaient l'approbation de toutes les instances du Reich nazi. Le ministère des affaires étrangères
avait déjà adopté une attitude pro-sioniste en maintes occasions avant 1933 (il y avait eu des rencontres entre Chaim Weizmann et les secrétaires d'Etat von Schubert et von Bullow).

C'est seulement après le déclenchement de la révolte arabe palestinienne de 1936 que les premières divergences d'opinion s'installèrent dans les diverses
institutions fascistes sur l'utilité de poursuivre les transferts dans le cadre de la Haavara. Le ministère des affaires étrangères se rendait maintenant compte que la politique de facto
pro-sioniste allait aliéner les Arabes à l'Allemagne hitlérienne - une perspective qui n'était pas dans l'intérêt du Reich Nazi. Döhle, consul général d'Allemagne à Jérusalem, était le porte-voix
de ce point de vue et, dans un long mémorandum daté du 22 mars 1937, il observait que « par notre promotion de l'immigration juive... la position qu'avait pu réoccuper l'Allemagne... allait
être mise à mal. » En adoptant cette position, Döhle était moins animé par un intérêt pour les Arabesque par une inquiétude pour les intérêts politiques du fascisme allemand. Il ajoutait que
l'Allemagne ne devait « pas trop se préoccuper des sympathies des Arabes à l'égard de l'Allemagne dès lors que ce dont nous avions besoin était moins d'avoir une politique arabe active que
d'éviter la promotion voyante accordée à l'édification d'un foyer national juif. »

Döhle craignait « un revirement de l'humeur des Arabes et que nous soyons accusés de participer activement à la lutte contre eux ».

Les inquiétudes de Döhle étaient partagées par d'autres autorités fascistes. Ainsi, l'Office du Commerce Extérieur de l'Auslandsorganisation du parti nazi (le bureau
du parti chargé des affaires internationales) déclarait en toute franchise : « Politiquement, il [l'accord de la Haavara] revient à apporter un soutien efficace à l'établissement d'un foyer
national juif avec l'aide du capital allemand. »

Le 17 décembre 1937, il était signalé dans le mémorandum déjà cité de Stuckart, Secrétaire d'État au ministère de l'Intérieur, que depuis le début de la révolte
arabe en Palestine « les avantages procurés par la procédure [de Haavara] sont devenus plus faibles tandis que ses inconvénients deviennent de plus en plus importants. »

Stuckart était d'avis que si la création d'un Etat juif était inévitable, alors « tout ce qui permettrait le développement d'un tel Etat devrait être évité.»
Puis Stuckart déclarait clairement : Il est hors de doute que la procédure de la Haavara a apporté la plus forte contribution au développement extrêmement rapide de la Palestine [i.e. des
colonies sionistes - K.P.]. Cette procédure n'a pas seulement permis l'apport de très grosses sommes d'argent [d'Allemagne] ; elle a aussi apporté les hommes les plus intelligents parmi tous les
immigrants, et a en fin de compte fourni les machines et les équipements industriels nécessaires - aussi d'Allemagne. »

Les craintes de ces responsables (qui, ainsi que nous le verrons étaient en contradiction avec l'opinion des SS et de la Gestapo) furent finalement communiquées à
Hitler. Hitler, ainsi qu'on peut le lire dans un mémorandum du département de la Politique Commerciale du ministère des affaires étrangères en date du 27 janvier 1938, décida que la procédure de
la Haavara devait continuer. Cette position d'approbation prise par Hitler vis-à-vis du renforcement de la colonisation sioniste de la Palestine resta inchangée malgré les doléances émanant du
ministère des affaires étrangères er l'Auslandorganisation du parti nazi relativement à la montée de l'hostilité des Palestiniens à l'égard de l'Allemagne. C'est ainsi que l'Auslandorganisation
au ministère des affaires étrangères exigea à nouveau dans un mémorandum daté du 12 novembre 1938 que « une initiative soit entreprise pour une annulation d'un accord de Haavara qui n'a que
trop duré. » Jon et David Kimche confirment le fait qu'Hitler « avec une détermination sans ambigüité, avait ordonné la promotion d'une immigration de masse en Palestine », et
qu'Hitler avait en outre formulé la décision fondamentale que « l'émigration juive devait être encore plus encouragée par tous les moyens disponibles. Il est donc indiscutable que l'opinion
du Führer était qu'une telle émigration devait être avant tout orientée vers la Palestine. »

Finalement, même Winfried Martini confirme la position pro-sioniste des cercles fascistes les plus importants pendant la révolte arabe de 1936-39. Il écrit que, en
tant que correspondant de la Deutsche Allgemeine Zeitung en Palestine, ses articles sur la révolte « étaient assez clairement favorables à la partie juive », et que cela n'avait soulevé
aucune objection de la part des responsables nazis.

Hitler resta donc le garant des transferts Haavara qui ne furent stoppés qu'avec le déclenchement de la deuxième guerre mondiale.

Coopération avec les services de renseignements nazis

Pendant les premiers jours de la domination fasciste sur l'Allemagne, les sionistes avaient un contact direct avec l'appareil de répression fasciste, ce qui se
traduisit par une coopération informelle entre la direction sioniste et les organisations de terreur du Reich nazi (la Gestapo, la SS etc.). Dès avant 1933, le dirigeant sioniste Leo Plaut «avait
une connexion» avec la police politique et avec un cadre de la police, l'Oberregierungsrat Rudolf Diels (supposé être un camarade de classe de Plaut). Quand Diels fut d'abord nommé chef de la
police secrète en 1933, il maintint ses relations avec Plaut. « En fait, Plaut avait même le numéro de la ligne secrète de Diels et pouvait l'appeler à tout moment. » On peut seulement
spéculer sur les détails de leurs contacts parce que les documents à ce sujet sont enfermés à double tour aux archives de Yad-Vashem à Jérusalem. On peut cependant supposer que c'est grâce à ces
contacts qu'une rencontre avait pu être arrangée entre le premier ministre Prussien Herman Goering (plus tard condamné à mort par le tribunal de Nuremberg pour crimes de guerre) et les chefs des
organisations juives allemandes. La réunion eut lieu le 26 mars 1933. Parmi les dirigeants sionistes présents, se trouvait Kurt Blumenfeld, mais il a gardé le silence sur cet épisode sans ses
mémoires.

De tels contacts se faisaient en secret, mais il existe des preuves concernant des préparatifs en vue d'une coopération entre les sionistes et la SS (l'organisation
qui chapeautait tout l'appareil policier et du renseignement dans l'Etat fasciste). Peu de temps après la prise du pouvoir par les fascistes, le journal Der Angriff, contrôlé par les chefs
propagandistes Nazi, publiait un article sur un voyage en Palestine qui présentait en termes positifs la colonisation sioniste en Palestine. Le reportage, intitulé « Un
nazi voyage en Palestine », « ne comportait pratiquement aucune critique ».

Médaille commémorative du séjour de Leopold von Mildenstein en Palestine

Le pseudonyme de l'auteur « Lim » dissimulait l'identité du SS Untersturmführer (équivalent du grade de lieutenant dans l'armée) Leopold von Mildenstein.
Mildenstein servait dans le SD (le service de sécurité de la SS) qui était à l'origine le service secret interne du parti nazi mais qui, à partir de 1934, cessa d'être simplement la police du
parti et un instrument entre les mains du commandement de la police pour se transformer en service secret intérieur principal de la dictature fasciste.

Le SD était aussi devenu l'organisation de commandement politique et de formation des cadres pour la police fasciste. Le fait que Mildenstein ait pu être l'homme
capable d'écrire des articles ouvertement pro-sionistes n'était pas une simple coïncidence puisque, en 1934, le Bureau II du SD s'était étoffé d'un bureau II-112 ou « Judenreferat »
(bureau des affaires juives) dont il assurait la direction. Selon Martini, Mildenstein avait été « discrètement conseillé par des officiels sionistes » pendant son séjour en Palestine.
Le département dirigé par Mildenstein a eu la charge de la politique juive du nazisme jusqu'en 1938 Cette politique avait été formulée par l'organe officiel de la SS, Das Schwarze Korps, dans les
termes suivants : «Le temps n'est peut être pas bien loin qui verra la Palestine recevoir à nouveau les enfants qu'elle avait perdu il y a un millier d'année. Nos vœux ainsi que la bonne volonté
de l'Etat les accompagnent ». Il y a eu des tentatives pour décrire la politique pro-sioniste de la SS comme reflétant l'attitude personnelle de Mildenstein plutôt que l'entente officielle
entre sionistes et fascistes. Mais il n'y a pas que la citation extraite du Schwarze Korps pour contredire cette thèse : Mildenstein lui-même, quelques années plus tard, republiera sous forme de
livre ses notes de voyage parues dans l'Angriff. Mais cette fois-ci, il transformera sa tendance pro-sioniste initiale en antisémitisme sans fard.

Les dirigeants sionistes qui avaient « discrètement conseillé » le directeur du « Judenferat » au SD pendant son voyage en Palestine
poursuivirent leurs contacts avec la SS et le SD. Naturellement, peu de détails sont connus sur ces contacts dont les traces sont des documents hautement classifiés. Un des rares documents
disponibles sur ces relations est un mémorandum du professeur Franz Six daté du 17 juin 1937 qui porte la mention « Affaire secrète pour le commandement. » ce mémorandum contient des
informations sur une visite de l'émissaire sioniste Feivel Polkes à Berlin. Polkes était membre de l'état major de l'armée sioniste clandestine, la Haganah, avec le grade de commandant.
L'Oberscharführer de la SS Herbert Hagen qui avait succédé à Mildenstein à la direction du Judenferat affirmait que Polkes avait le « commandement de l'ensemble de l'appareil d'auto-défense
des Juifs de Palestine. »

En Palestine, Polkes avait été en relation étroite avec le correspondant de la « German News Agency », le Dr Reichert qui était actif dans le réseau
d'espionnage du SD en Palestine. Ce réseau était dirigé pat Otto von Bodelschwingh, un agent du SD établi comme agent commercial à Haïfa. C'est le Dr Richert qui avait obtenu un visa d'entrée en
Allemagne pour Polkes.

Polkes resta à Berlin du 26 février au 2 mars 1937, participant à plusieurs réunions avec des agents du SD représentant le régime nazi, dont deux avec le
Hauptscharführer Adolf Eichmann (Eichmann avait alors commencé à travailler au « Judenferat »). Polkes avait alors offert de collaborer avec le gouvernement allemand, disant à Eichmann
qu'il était par-dessus tout intéressé à « accélérer l'immigration juive en Palestine, de sorte à ce que les Juifs deviennent majoritaires par rapport aux Arabes dans son pays. A cette fin,
il travaillait avec les services secrets anglais et français et ils voulait aussi coopérer avec l'Allemagne d'Hitler. »

Hagen avait noté un peu plus loin dans son rapport sur la visite de Polkes à Berlin : « Il avait aussi signalé sa disponibilité à rendre des services à
l'Allemagne sous la forme d'informations, dans tant qu'elles n'entraient pas en conflit avec ses propres objectifs... »

Entre autres choses, il soutiendrait avec vigueur les intérêts allemands au Moyen Orient... » Höhne avait commenté l'offre de Polkes en ces termes : « ...
derrière ça, il y a clairement la politique d'immigration de la Haganah.»

La SS avait immédiatement récompensé les intentions coopératives de Polkes avec les instructions préconisées par Six. « Une pression est exercée sur
l'association des Juifs du Reich en Allemagne afin d'obliger les Juifs qui émigrent d'Allemagne à se rendre seulement en Palestine et dans aucun autre pays. »

C'était exactement ce que voulaient les sionistes mais, ajoutait Six : « Une telle mesure va entièrement dans le sens des intérêts de l'Allemagne et elle est
déjà mise en œuvre par la Gestapo ».

Feivel Polkes, le commandant de la Haganah, s'était mis en quatre pour faciliter le développement de la coopération entre sionistes et fascistes ; il avait même
lancé une invitation à Eichmann pour une visite en Palestine comme invité de la Haganah.

Six observait :

« Dans le travail de mise en contact, le nom du SS Hauptscharführer Eichmann du Dépar

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