2015-10-08

La Médiatrice européenne (Ombudsman), Emily O’Reilly, a organisé le 28 septembre une table ronde, à laquelle avaient été conviées plusieurs personnalités politiques et de la société civile, pour débattre de la place du trilogue dans le processus législatif européen, et notamment de son manque patent de transparence. C’était également l’occasion de discuter des améliorations possibles à apporter, deux jours seulement avant la date butoir imposée aux institutions impliquées dans le trilogue – Commission, Conseil de l’Union européenne, Parlement – pour communiquer les documents demandés par l’Ombudsman : divulgation des documents des trilogues, y compris des détails des réunions, des documents concernant des trilogues en cours, des compte-rendus ou des notes élaborés après de telles réunions, ainsi que des listes de participants. Ces documents sont demandés dans le cadre d’une enquête ouverte le 28 mai dernier. L’enquête vise à promouvoir la transparence des trilogues, en vue de renforcer la transparence du processus législatif de l’Union européenne. En accord avec ses prérogatives, l’Ombudsman va maintenant pouvoir proposer des solutions aux institutions pour améliorer la transparence des trilogues. Mais qu’est-ce qu’un trilogue ? Sur quoi se fondent ces accusations de manque de transparence ? En quoi cela menace-t-il la légitimité de l’Union européenne en tant que « législateur supranational » ?

Les trilogues:eviter les blocages législatifs

Les trilogues sont à replacer dans la procédure législative de codécision entre le Parlement européen et le Conseil. Schématiquement, ce processus se déroule comme suit : l’initiative de la Commission européenne donne lieu à une première lecture au Parlement, qui peut proposer des amendements. Elle est suivie d’une première lecture au Conseil. Evidemment, le Conseil peut également approuver l’ensemble des amendements du Parlement ou approuver le texte tel que proposé par la Commission dès la première lecture si le Parlement n’a apporté aucun amendement. En fait, c’est même le cas le plus courant : 85% à 87% des propositions d’actes législatifs sont adoptées chaque année en première lecture.

Cependant, il peut arriver que le Conseil refuse en première lecture le texte et propose à son tour des amendements. Le Parlement européen dispose alors d’une seconde lecture pour approuver (l’acte est réputé adopté) ou rejeter ceux-ci (l’acte est réputé non-adopté). Mais le Parlement dispose aussi d’une troisième possibilité : il peut à nouveau proposer des amendements à la position du Conseil. Ce dernier bénéficie à son tour d’une seconde lecture, durant laquelle il peut accepter la version finale du texte telle que proposée par le Parlement en seconde lecture, ou la rejeter. Dans ce dernier cas, la Présidence du Conseil, en accord avec la Présidence du Parlement, dispose de six semaines pour convoquer un comité de consultation.

La procédure de consultation est un peu la négociation « de la dernière chance ». Elle a pour but de dégager un compromis face à une situation visiblement particulièrement épineuse. En effet, si la plupart des textes sont adoptés en première lecture, c’est en grande partie grâce à la coopération étroite qui s’est établie, de fait, entre les institutions de l’Union européenne, autant en amont qu’au cours du processus législatif. Il est donc finalement étonnant que le résultat d’une telle concertation permanente soit nul. C’est surtout la preuve que le sujet débattu est particulièrement sensible.

Le comité de conciliation réunit les représentants des 28 États membres au sein du Conseil, qui sont invités à se prononcer séparément sur le texte. C’est ce qui explique que le Conseil statue à la majorité qualifiée. La délégation du Parlement est composée d’un nombre équivalent de députés, dont le rapporteur sur le dossier et les shadow rapporteurs. Les députés sont désignés par les groupes politiques en fonction de la taille de ceux-ci au sein du Parlement. Comme ils se prononcent au nom du Parlement européen en tant qu’unique protagoniste, seule la majorité des membres présents est requise, contrairement au Conseil.

Au total, un minimum de 56 négociateurs est ainsi réuni autour de table, auxquels s’ajoutent les experts de la Commission en charge du dossier. Le comité dispose ensuite de six semaines pour rechercher un accord qui prenne en compte de manière équilibré, sur l’ensemble du texte, les avis de chacun des protagonistes présents. Concrètement, il s’agit « d’échanger » des concessions sur les amendements dans la recherche d’un « paquet global ». Le travail est facilité par un tableau synoptique à quatre colonnes (« four column document ») : les trois premières colonnes présentent les positions des trois institutions, et la quatrième colonne présente le texte de compromis. Les éventuelles suggestions de la Commission figurent le plus souvent en bas de page.

Dégager un compromis entre des dizaines de protagonistes, en 6 semaines seulement, sur un sujet particulièrement délicat au point d’achopper au cours des deux premières lectures relève de la haute voltige. En comparaison, le Conseil dispose de 3-4 mois en seconde lecture, et le Parlement de 13-15 mois en première lecture ! C’est la raison pour laquelle, lorsqu’une procédure de conciliation se profile, les institutions mettent à profit la « réserve de temps » dont dispose le Conseil en seconde lecture pour développer des contacts, notamment au cours de trilogues informels. Ceux-ci se déroulent une à deux fois par semaine, pour maintenir la pression sur les parties à la négociation dans le but de favoriser la conclusion de l‘accord, soit lors de la seconde lecture du Conseil, soit lors du comité de conciliation.

Ces trilogues ne sont pas prévus par les traités. Ils ont émergés dans la pratique à la suite du renforcement du rôle du Parlement dans la procédure de codécision par le Traité de Lisbonne (2009), contraignant les États à légiférer sur un pied d’égalité avec les députés européens.

Les trilogues ou le risque de contournement de la démocratie

Littéralement, un trilogue désigne un dialogue entre trois protagonistes. Au sein de l’Union européenne, les trilogues ne réunissent, par souci d’efficacité, qu’un nombre très restreint de personnes pour envisager, au niveau technique et politique, les différents compromis possibles. Pour le Parlement européen, seuls participent la personne élue pour présider la délégation au sein du comité de conciliation, le président de la commission parlementaire concernée et le rapporteur. Ils peuvent être éventuellement accompagnés d’un membre du Service juridique du Parlement. La délégation du Conseil est, elle, réduite au représentant permanent de l’État membre assurant la présidence. En ce moment, il s’agit donc du représentant permanent du Luxembourg auprès de l‘Union européenne. Il peut être éventuellement assisté par des membres du secrétariat du Conseil, notamment du Service juridique. Les participants aux trilogues opèrent toujours sur la base d’un mandat de négociation que leurs confèrent leurs délégations respectives.

L’objectif du trilogue est d’explorer les différentes pistes de compromis possibles, avant d’en rendre compte aux différentes délégations. Si ce travail est particulièrement fructueux, les membres du comité de conciliation n’ont plus qu’à avaliser l’accord trouvé lors du trilogue. On observe là un premier glissement néfaste pour la démocratie : l’essentiel des négociations ont lieu à huis-clos, lors des trilogues, et les débats publiques au sein du comité de conciliation se trouvent vidés de leur sens. Aucune conférence de presse ne vient ponctuer les trilogues. Il est impossible, dans ces conditions, de connaître la position que chaque État membre ou chaque député a adopté. Cela signifie également l’absence d’un historique à la disposition du public pour comprendre comment l’accord final a été obtenu, au prix de quels accommodements et quelles concessions.

Une conséquence prévisible : lors des trilogues, l’efficience de la loi a tendance à disparaître derrière la nécessité de légiférer malgré les oppositions persistantes rencontrées de part et d’autre. C’est ainsi que, « outil politique », le trilogue a tendance a grandement dégrader la qualité de la loi. Cela génère une incertitude préjudiciable au bon fonctionnement de tout système juridique. Vicky Marissen, professeur invitée au Collège d’Europe de Bruges et de Natolin, dénonce ainsi des solutions superficielles, inexactes et inapplicables. Cela accroît l’usage d’actes de mise en œuvre exhaustifs, pour compenser les flous juridiques volontairement laissés dans le compromis politique lors du trilogue.

Or, au niveau de l’Union, ces actes de mise en œuvre sont, de plus en plus depuis le Traité de Lisbonne (2009), des « actes délégués », c’est-à-dire des actes non-législatifs de portée générale qui complètent ou modifient certains éléments non-essentiels de l’acte législatif. Ces actes sont produits par la Commission européenne, qui supplée ainsi les deux législateurs de l’Union – Parlement européen et Conseil. Sauf que la Commission n’a pas la même légitimité démocratique que les deux législateurs : les eurodéputés sont élus au suffrage universel direct, tandis que les ministres du Conseil sont issus de gouvernements formés à la suite d’élections nationales libres. La Commission, elle, est nommée par le Conseil européen – composé des chefs d’États et de gouvernements – sur la base de tractations diplomatiques entre États membres. Les trilogues encouragent ainsi le transfert d’une partie du pouvoir de légiférer à un organe dont ce n’est pas le rôle premier, et qui n’a pas été élu mais nommé. C’est en contradiction totale avec le concept de démocratie parlementaire où le législateur est l’organe élu directement par les citoyens afin d‘assurer la prise en compte de l’intérêt général.

De plus, le rôle de la Commission aux comités de conciliation est celle d’un facilitateur de compromis, qui doit rapprocher autant que possible les positions des deux co-législateurs tout en défendant l’intérêt général. Mais, lors des trilogues, elle a tendance à se transformer en acteur à part entière des négociations. En fait, la Commission peut, en vertu des traités, rejeter un amendement proposé durant le processus législatif ordinaire. Par extension, la Commission exige d’avoir aussi ce pouvoir lors des comités de conciliation et des trilogues. C’est ainsi qu’en décembre 2013, le député Alain Cadec (France, PPE) confiait à un journaliste à l’occasion des négociations sur le Fonds européen des affaires maritimes et de la pêche (FEAMP) : « la Commission européenne est intervenue auprès du Conseil pour contrer l’une de mes propositions ! La majorité des États était prête à l’accepter, mais le projet ne plaisait pas à la commissaire… ». Une prise de position ferme de la Commission qui a finalement eu raison du député, qui a abandonné le trilogue.

Pour des raisons d’efficience, il serait encore possible de fermer les yeux sur ces « raccourcis de la démocratie européenne » s’ils restaient exceptionnels. Mais le fait est qu’ils ont, au contraire, tendance à se généraliser, jusqu’à devenir quasi-systématiques. Ils font désormais partie intégrante du processus législatif européen, mais à défaut d’être prévus dans les traités, ils se déroulent hors de tout contrôle démocratique.

Le rôle de l’Ombudsman: gardien de la démocratie en Europe

Le Médiateur européen a été créé lors du traité de Maastricht en 1992 mais le premier médiateur européen, le finlandais Jacob Söderman, n’a été élu qu’en 1995. Entre 2003 et 2013, c’est le grec Nikiforos Diamandouros qui a exercé ce poste. Il a été remplacé le 1er octobre 2013 par l’irlandaise Emily O’Reill.

Depuis le Traité de Lisbonne, le médiateur est inscrit à l’article 228 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Le Médiateur est élu par le Parlement européen pour un mandat renouvelable de cinq ans. Organe impartial, il ne reçoit d’instructions d’aucun gouvernement ou organisation. Il présente chaque année un rapport d’activité au Parlement européen.

Son rôle est de servir d’intermédiaire entre l’Union et les citoyens, afin de renforcer les droits de ces derniers contre tout cas de « mauvaise administration » qui pourraient menacer les droits fondamentaux ou la démocratie. On désigne par cette expression des comportements abusifs ou discriminatoires, les abus de pouvoir, l’absence ou le refus de fournir des informations, des retards injustifiés ou des entorses à la procédure de la part de l’Administration. Le médiateur peut, soit recueillir les plaintes des citoyens et résidents européens, soit décider d’ouvrir une enquête de sa propre initiative. C’est ce qui a été fait pour les trilogues le 28 mai 2015.

Cette enquête peut aboutir à informer simplement l’institution concernée du manquement constaté. Si cela ne suffit pas, l’Ombudsman s’efforce de parvenir à un accord amiable afin de remédier à la situation. En cas d’échec, il peut adresser des recommandations à l’institution. Finalement, si cette dernière n’accepte pas les recommandations, le Médiateur peut soumettre un rapport spécial au Parlement européen, qui doit alors prendre les mesures nécessaires.

Trilogues : une menace pour la légitimité de l’Union?

Dans son discours d’ouverture à la table-ronde du 28 septembre, Emily O’Reilly revenait sur les raisons qui l’avaient poussée, en tant que Médiatrice européenne, à ouvrir une enquête sur les trilogues en mai 2015 : « les trilogues sont maintenant une composante clef du processus législatif de l’Union européenne. Après une proposition par la Commission et l’examen initial par les législateurs, c’est de plus en plus au sein des trilogues que la législation est finalement négociée et décidée. C’est là où des marchés sont conclus, qui affectent plus de 500 millions d’Européens… »[i].

Devant ce constat, la Médiatrice européenne a rappelé que la transparence dans le processus législatif est un aspect essentiel de toute démocratie. C’est la transparence qui légitime les lois adoptées par les hommes et femmes politiques en les rendant responsables des choix effectués devant les citoyens qui les ont élus. La force de la loi réside dans l’accord des citoyens acceptant d’être liée par celle-ci en sachant qu’elle a été ouvertement débattue et négociée. Le manque de légitimité dont souffre couramment l’Union auprès des citoyens, ainsi que le manque de confiance publique, exigent que des habitudes comme celles des trilogues soient enrayées.

Trilogues:faut-il jeter le bébé avec l’eau du bain?

Lors d’un trilogue, la balance entre, d’un côté, l’efficience et la réactivité du corps législatif, et de l’autre côté, la transparence, la démocratie et la responsabilité politique se trouve déséquilibrée : le gain d’efficacité dans le processus législatif est obtenu au détriment de la transparence. En effet, lorsque le compromis s’annonce difficile, le trilogue le rend opaque, encourageant soit des choix techniques qui vident de leur substance politique les débats, soit des choix politiciens rocambolesques et irréalistes. Mais les trilogues ne seraient-ils pas plutôt le signe que le sujet litigieux n’a pas été suffisamment débattu et approfondie ? La nécessité exige parfois de surmonter les blocages et désaccords, mais à quel prix le trilogue le permet-il ? Ne peut-on pas trouver un arrangement plus salutaire entre efficacité et légitimité ?

Les trilogues ne sont pas un mauvais arrangement institutionnel en soi, mais ils nécessitent d’être plus transparents afin de répondre aux impératifs des démocraties modernes telles que nous les ambitionnons. Emily O’Reilly a insisté dans son introduction sur sa volonté de respecter les contraintes inhérentes à toutes négociations. Ainsi, il n’est sans doute pas nécessaire que « absolument tout ce qui est discuté en trilogues soit documenté, écrit, ou noté d’une quelconque manière. C’est absurde, puisqu’il s’agit de négociations »[ii]. De même, non sans une pointe d’humour, la Médiatrice européenne a affirmé que « l’enquête n’a pas non plus pour but de déterminer comment les trilogues doivent être organisés. Si les négociateurs veulent délibérer avec 3, 30 ou 300 participants dans la même pièce, même à trois heures du matin, ce n’est pas mon problème »[iii].

Plusieurs pistes ont été dégagées lors de l’audition publique organisée par la Médiatrice européenne, le 28 septembre, pour améliorer la transparence des trilogues sans compromettre la recherche d’un accord politique délicat. Nous retiendrons ici essentiellement les pistes synthétiques proposées par Vicky Marissen. Il a tout d’abord été envisagé de cesser de recourir systématiquement à l’usage de trilogues, pour évaluer leur intérêt au cas par cas. Le choix de recourir à un trilogue devrait également être publiquement justifié. En ce sens, la fréquence des trilogues pourrait être régulée à l’aide d’un plafond légal, afin d’assurer un temps suffisant à la réflexion entre chaque rencontre pour garantir un compromis de qualité. La présence de la Commission pourrait n’être envisagée que sur demande des co-législateurs, afin de confiner autant que possible son rôle à celui de médiateur. Les four column documents devraient être obligatoirement publiés, tout comme les commissions du Parlement devraient être tenues informées du déroulé des négociations au sein des trilogues au fur et à mesure de ceux-ci. Enfin, afin d’éviter que l’accord trouvé en trilogue soit simplement entériné par le comité de conciliation, il est impératif de le soumettre à un véritable débat en plénière au sein du Parlement européen, suivi d’un vote pour adoption où chaque député est responsable de son choix politique. Certains pourraient faire remarquer qu’il y a là des éléments bien audacieux .

L’Ombudsman va désormais pouvoir finaliser son enquête et proposer aux institutions de changer leurs pratiques, voire de légiférer pour encadrer juridiquement les trilogues. C’est l’occasion pour les institutions de prouver leur bonne volonté à rapprocher l’Union des citoyens, et de regagner en légitimité démocratique à leurs yeux. Dans tous les cas, la Commission n’a pas attendu les conclusions de la Médiatrice pour inclure la question de la transparence des trilogues dans sa Proposition d’accord interinstitutionnel pour une meilleure règlementation du 19 mai 2015 : « les trois institutions doivent garantir un degré approprié de transparence dans le processus législatif, y compris dans le cadre des négociations trilatérales [c.-à-d. les trilogues] entre les trois institutions  »[iv] (point 28).

Les accords interinstitutionnels sont conclus par les trois institutions de l’Union afin d’affirmer des principes communs ou d’aménager leurs relations réciproques. Non prévus par les traités à l’origine, ces accords se sont multipliés à partir des années 1980 afin de combler les vides juridiques des traités ou de normaliser les relations entre les institutions. Leur succès a justifié qu’ils soient inclus dans le droit primaire de l’Union à partir du Traité de Lisbonne (2009).

La proposition de la Commission a fait l’objet d’une première négociation les 25 et 26 juin entre le Président de la Commission Jean-Claude Juncker, le Président du Parlement européen Martin Schultz et le Premier ministre letton Laimdota Straujuma, dont le pays exerçait alors la présidence du Conseil de l’Union.

Lauriane Lizé-Galabbé

Pour en savoir plus :

-. Pour consulter un schéma de la procédure de codécision avec explications (FR, EN)http://ec.europa.eu/codecision/stepbystep/diagram_fr.htm

-. Pour en savoir plus sur les dérives au sein des trilogues (FR)https://www.contexte.com/article/relations-interinstitutionnelles/les-trilogues-ces-raccourcis-de-la-democratie-europeenne_23550.html

– . Pour en savoir plus sur le médiateur européen et pour déposer une plainte (FR, EN)http://europa.eu/about-eu/institutions-bodies/ombudsman/index_fr.htm

– . Pour consulter le discours d’ouverture de la Médiatrice européenne, Emily O’Reilly, prononcée le 28 septembre 2015 à Bruxelles (EN)http://www.ombudsman.europa.eu/activities/speech.faces/en/60991/html.bookmark

-. Pour lire la note d’information à destination du public de Vicky Marissen, « Way to improve efficiency and transparency in trilogues and EU law-making » à l’occasion de l’audition publique « Trilogues and transparent law-making » organisée par la Médiatrice européenne le 28 septembre 2015 (EN)http://www.ombudsman.europa.eu/fr/activities/visitreport.faces/fr/61004/html.bookmark

-. Proposal for an Interinstitutionnal Agreement on better Regulation http://ec.europa.eu/smart-regulation/better_regulation/documents/com_2015_216_en.pdf(FR) http://ec.europa.eu/smart-regulation/better_regulation/documents/com_2015_216_fr.pdf

[i] Citation originale (EN) : “Trilogues are now a key part of the EU legislative process. After a proposal by the Commission and initial consideration by the legislators, it is increasingly in trilogues that legislation is finally negotiated and decided upon. It is where deals are done that affect over 500 million Europeans… Major pieces of legislation on matters ranging from President Juncker’s Investment Plan to mobile phone roaming charges are finalised during trilogies”.

[ii] Citation originale (EN) : “[the inquiry does not aim at ensuring that] absolutely everything discussed in trilogues be documented, written down, or otherwise noted. This is absurd, as these are negotiations”.

[iii] Citation originale (EN) “The inquiry also does not seek to shape how trilogues are organised. If negotiators want to deliberate with 3, 30 or 300 participants in the room, even at three in the morning, that is not my concern”.

[iv] Traduction non-officielle (EN) : « The three institutions will ensure an appropriate degree of transparency of the legislative process, including of trilateral negotiations between the three institutions »

La Médiatrice européenne (Ombudsman), Emily O’Reilly, a organisé le 28 septembre une table ronde, à laquelle avaient été conviées plusieurs personnalités politiques et de la société civile, pour débattre de la place du trilogue dans le processus législatif européen, et notamment de son manque patent de transparence. C’était également l’occasion de discuter des améliorations possibles à apporter, deux jours seulement avant la date butoir imposée aux institutions impliquées dans le trilogue – Commission, Conseil de l’Union européenne, Parlement – pour communiquer les documents demandés par l’Ombudsman : divulgation des documents des trilogues, y compris des détails des réunions, des documents concernant des trilogues en cours, des compte-rendus ou des notes élaborés après de telles réunions, ainsi que des listes de participants. Ces documents sont demandés dans le cadre d’une enquête ouverte le 28 mai dernier. L’enquête vise à promouvoir la transparence des trilogues, en vue de renforcer la transparence du processus législatif de l’Union européenne. En accord avec ses prérogatives, l’Ombudsman va maintenant pouvoir proposer des solutions aux institutions pour améliorer la transparence des trilogues. Mais qu’est-ce qu’un trilogue ? Sur quoi se fondent ces accusations de manque de transparence ? En quoi cela menace-t-il la légitimité de l’Union européenne en tant que « législateur supranational » ?

Les trilogues : éviter les blocages législatifs à tous prix

Les trilogues sont à replacer dans la procédure législative de codécision entre le Parlement européen et le Conseil. Schématiquement, ce processus se déroule comme suit : l’initiative de la Commission européenne donne lieu à une première lecture au Parlement, qui peut proposer des amendements. Elle est suivie d’une première lecture au Conseil. Evidemment, le Conseil peut également approuver l’ensemble des amendements du Parlement ou approuver le texte tel que proposé par la Commission dès la première lecture si le Parlement n’a apporté aucun amendement. En fait, c’est même le cas le plus courant : 85% à 87% des propositions d’actes législatifs sont adoptées chaque année en première lecture.

Cependant, il peut arriver que le Conseil refuse en première lecture le texte et propose à son tour des amendements. Le Parlement européen dispose alors d’une seconde lecture pour approuver (l’acte est réputé adopté) ou rejeter ceux-ci (l’acte est réputé non-adopté). Mais le Parlement dispose aussi d’une troisième possibilité : il peut à nouveau proposer des amendements à la position du Conseil. Ce dernier bénéficie à son tour d’une seconde lecture, durant laquelle il peut accepter la version finale du texte telle que proposée par le Parlement en seconde lecture, ou la rejeter. Dans ce dernier cas, la Présidence du Conseil, en accord avec la Présidence du Parlement, dispose de six semaines pour convoquer un comité de consultation.

La procédure de consultation est un peu la négociation « de la dernière chance ». Elle a pour but de dégager un compromis face à une situation visiblement particulièrement épineuse. En effet, si la plupart des textes sont adoptés en première lecture, c’est en grande partie grâce à la coopération étroite qui s’est établie, de fait, entre les institutions de l’Union européenne, autant en amont qu’au cours du processus législatif. Il est donc finalement étonnant que le résultat d’une telle concertation permanente soit nul. C’est surtout la preuve que le sujet débattu est particulièrement sensible.

Le comité de conciliation réunit les représentants des 28 États membres au sein du Conseil, qui sont invités à se prononcer séparément sur le texte. C’est ce qui explique que le Conseil statue à la majorité qualifiée. La délégation du Parlement est composée d’un nombre équivalent de députés, dont le rapporteur sur le dossier et les shadow rapporteurs. Les députés sont désignés par les groupes politiques en fonction de la taille de ceux-ci au sein du Parlement. Comme ils se prononcent au nom du Parlement européen en tant qu’unique protagoniste, seule la majorité des membres présents est requise, contrairement au Conseil.

Au total, un minimum de 56 négociateurs est ainsi réuni autour de table, auxquels s’ajoutent les experts de la Commission en charge du dossier. Le comité dispose ensuite de six semaines pour rechercher un accord qui prenne en compte de manière équilibré, sur l’ensemble du texte, les avis de chacun des protagonistes présents. Concrètement, il s’agit « d’échanger » des concessions sur les amendements dans la recherche d’un « paquet global ». Le travail est facilité par un tableau synoptique à quatre colonnes (« four column document ») : les trois premières colonnes présentent les positions des trois institutions, et la quatrième colonne présente le texte de compromis. Les éventuelles suggestions de la Commission figurent le plus souvent en bas de page.

Dégager un compromis entre des dizaines de protagonistes, en 6 semaines seulement, sur un sujet particulièrement délicat au point d’achopper au cours des deux premières lectures relève de la haute voltige. En comparaison, le Conseil dispose de 3-4 mois en seconde lecture, et le Parlement de 13-15 mois en première lecture ! C’est la raison pour laquelle, lorsqu’une procédure de conciliation se profile, les institutions mettent à profit la « réserve de temps » dont dispose le Conseil en seconde lecture pour développer des contacts, notamment au cours de trilogues informels. Ceux-ci se déroulent une à deux fois par semaine, pour maintenir la pression sur les parties à la négociation dans le but de favoriser la conclusion de l‘accord, soit lors de la seconde lecture du Conseil, soit lors du comité de conciliation.

Ces trilogues ne sont pas prévus par les traités. Ils ont émergés dans la pratique à la suite du renforcement du rôle du Parlement dans la procédure de codécision par le Traité de Lisbonne (2009), contraignant les États à légiférer sur un pied d’égalité avec les députés européens.

Les trilogues ou le risque de contournement de la démocratie

Littéralement, un trilogue désigne un dialogue entre trois protagonistes. Au sein de l’Union européenne, les trilogues ne réunissent, par souci d’efficacité, qu’un nombre très restreint de personnes pour envisager, au niveau technique et politique, les différents compromis possibles. Pour le Parlement européen, seuls participent la personne élue pour présider la délégation au sein du comité de conciliation, le président de la commission parlementaire concernée et le rapporteur. Ils peuvent être éventuellement accompagnés d’un membre du Service juridique du Parlement. La délégation du Conseil est, elle, réduite au représentant permanent de l’État membre assurant la présidence. En ce moment, il s’agit donc du représentant permanent du Luxembourg auprès de l‘Union européenne. Il peut être éventuellement assisté par des membres du secrétariat du Conseil, notamment du Service juridique. Les participants aux trilogues opèrent toujours sur la base d’un mandat de négociation que leurs confèrent leurs délégations respectives.

L’objectif du trilogue est d’explorer les différentes pistes de compromis possibles, avant d’en rendre compte aux différentes délégations. Si ce travail est particulièrement fructueux, les membres du comité de conciliation n’ont plus qu’à avaliser l’accord trouvé lors du trilogue. On observe là un premier glissement néfaste pour la démocratie : l’essentiel des négociations ont lieu à huis-clos, lors des trilogues, et les débats publiques au sein du comité de conciliation se trouvent vidés de leur sens. Aucune conférence de presse ne vient ponctuer les trilogues. Il est impossible, dans ces conditions, de connaître la position que chaque État membre ou chaque député a adopté. Cela signifie également l’absence d’un historique à la disposition du public pour comprendre comment l’accord final a été obtenu, au prix de quels accommodements et quelles concessions.

Une conséquence prévisible : lors des trilogues, l’efficience de la loi a tendance à disparaître derrière la nécessité de légiférer malgré les oppositions persistantes rencontrées de part et d’autre. C’est ainsi que, « outil politique », le trilogue a tendance a grandement dégrader la qualité de la loi. Cela génère une incertitude préjudiciable au bon fonctionnement de tout système juridique. Vicky Marissen, professeur invitée au Collège d’Europe de Bruges et de Natolin, dénonce ainsi des solutions superficielles, inexactes et inapplicables. Cela accroît l’usage d’actes de mise en œuvre exhaustifs, pour compenser les flous juridiques volontairement laissés dans le compromis politique lors du trilogue.

Or, au niveau de l’Union, ces actes de mise en œuvre sont, de plus en plus depuis le Traité de Lisbonne (2009), des « actes délégués », c’est-à-dire des actes non-législatifs de portée générale qui complètent ou modifient certains éléments non-essentiels de l’acte législatif. Ces actes sont produits par la Commission européenne, qui supplée ainsi les deux législateurs de l’Union – Parlement européen et Conseil. Sauf que la Commission n’a pas la même légitimité démocratique que les deux législateurs : les eurodéputés sont élus au suffrage universel direct, tandis que les ministres du Conseil sont issus de gouvernements formés à la suite d’élections nationales libres. La Commission, elle, est nommée par le Conseil européen – composé des chefs d’États et de gouvernements – sur la base de tractations diplomatiques entre États membres. Les trilogues encouragent ainsi le transfert d’une partie du pouvoir de légiférer à un organe dont ce n’est pas le rôle premier, et qui n’a pas été élu mais nommé. C’est en contradiction totale avec le concept de démocratie parlementaire où le législateur est l’organe élu directement par les citoyens afin d‘assurer la prise en compte de l’intérêt général.

De plus, le rôle de la Commission aux comités de conciliation est celle d’un facilitateur de compromis, qui doit rapprocher autant que possible les positions des deux co-législateurs tout en défendant l’intérêt général. Mais, lors des trilogues, elle a tendance à se transformer en acteur à part entière des négociations. En fait, la Commission peut, en vertu des traités, rejeter un amendement proposé durant le processus législatif ordinaire. Par extension, la Commission exige d’avoir aussi ce pouvoir lors des comités de conciliation et des trilogues. C’est ainsi qu’en décembre 2013, le député Alain Cadec (France, PPE) confiait à un journaliste à l’occasion des négociations sur le Fonds européen des affaires maritimes et de la pêche (FEAMP) : « la Commission européenne est intervenue auprès du Conseil pour contrer l’une de mes propositions ! La majorité des États était prête à l’accepter, mais le projet ne plaisait pas à la commissaire… ». Une prise de position ferme de la Commission qui a finalement eu raison du député, qui a abandonné le trilogue.

Pour des raisons d’efficience, il serait encore possible de fermer les yeux sur ces « raccourcis de la démocratie européenne » s’ils restaient exceptionnels. Mais le fait est qu’ils ont, au contraire, tendance à se généraliser, jusqu’à devenir quasi-systématiques. Ils font désormais partie intégrante du processus législatif européen, mais à défaut d’être prévus dans les traités, ils se déroulent hors de tout contrôle démocratique.

Le rôle de l’Ombudsman : gardien de la démocratie de l’Union européenne

Le Médiateur européen a été créé lors du traité de Maastricht en 1992 mais le premier médiateur européen, le finlandais Jacob Söderman, n’a été élu qu’en 1995. Entre 2003 et 2013, c’est le grec Nikiforos Diamandouros qui a exercé ce poste. Il a été remplacé le 1er octobre 2013 par l’irlandaise Emily O’Reill.

Depuis le Traité de Lisbonne, le médiateur est inscrit à l’article 228 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Le Médiateur est élu par le Parlement européen pour un mandat renouvelable de cinq ans. Organe impartial, il ne reçoit d’instructions d’aucun gouvernement ou organisation. Il présente chaque année un rapport d’activité au Parlement européen.

Son rôle est de servir d’intermédiaire entre l’Union et les citoyens, afin de renforcer les droits de ces derniers contre tout cas de « mauvaise administration » qui pourraient menacer les droits fondamentaux ou la démocratie. On désigne par cette expression des comportements abusifs ou discriminatoires, les abus de pouvoir, l’absence ou le refus de fournir des informations, des retards injustifiés ou des entorses à la procédure de la part de l’Administration. Le médiateur peut, soit recueillir les plaintes des citoyens et résidents européens, soit décider d’ouvrir une enquête de sa propre initiative. C’est ce qui a été fait pour les trilogues le 28 mai 2015.

Cette enquête peut aboutir à informer simplement l’institution concernée du manquement constaté. Si cela ne suffit pas, l’Ombudsman s’efforce de parvenir à un accord amiable afin de remédier à la situation. En cas d’échec, il peut adresser des recommandations à l’institution. Finalement, si cette dernière n’accepte pas les recommandations, le Médiateur peut soumettre un rapport spécial au Parlement européen, qui doit alors prendre les mesures nécessaires.

Trilogues : une menace pour la légitimité de l’Union ?

Dans son discours d’ouverture à la table-ronde du 28 septembre, Emily O’Reilly revenait sur les raisons qui l’avaient poussée, en tant que Médiatrice européenne, à ouvrir une enquête sur les trilogues en mai 2015 : « les trilogues sont maintenant une composante clef du processus législatif de l’Union européenne. Après une proposition par la Commission et l’examen initial par les législateurs, c’est de plus en plus au sein des trilogues que la législation est finalement négociée et décidée. C’est là où des marchés sont conclus, qui affectent plus de 500 millions d’Européens… »[i].

Devant ce constat, la Médiatrice européenne a rappelé que la transparence dans le processus législatif est un aspect essentiel de toute démocratie. C’est la transparence qui légitime les lois adoptées par les hommes et femmes politiques en les rendant responsables des choix effectués devant les citoyens qui les ont élus. La force de la loi réside dans l’accord des citoyens acceptant d’être liée par celle-ci en sachant qu’elle a été ouvertement débattue et négociée. Le manque de légitimité dont souffre couramment l’Union auprès des citoyens, ainsi que le manque de confiance publique, exigent que des habitudes comme celles des trilogues soient enrayées.

Trilogues : faut-il jeter le bébé avec l’eau du bain ?

Lors d’un trilogue, la balance entre, d’un côté, l’efficience et la réactivité du corps législatif, et de l’autre côté, la transparence, la démocratie et la responsabilité politique se trouve déséquilibrée : le gain d’efficacité dans le processus législatif est obtenu au détriment de la transparence. En effet, lorsque le compromis s’annonce difficile, le trilogue le rend opaque, encourageant soit des choix techniques qui vident de leur substance politique les débats, soit des choix politiciens rocambolesques et irréalistes. Mais les trilogues ne seraient-ils pas plutôt le signe que le sujet litigieux n’a pas été suffisamment débattu et approfondie ? La nécessité exige parfois de surmonter les blocages et désaccords, mais à quel prix le trilogue le permet-il ? Ne peut-on pas trouver un arrangement plus salutaire entre efficacité et légitimité ?

Les trilogues ne sont pas un mauvais arrangement institutionnel en soi, mais ils nécessitent d’être plus transparents afin de répondre aux impératifs des démocraties modernes telles que nous les ambitionnons. Emily O’Reilly a insisté dans son introduction sur sa volonté de respecter les contraintes inhérentes à toutes négociations. Ainsi, il n’est sans doute pas nécessaire que « absolument tout ce qui est discuté en trilogues soit documenté, écrit, ou noté d’une quelconque manière. C’est absurde, puisqu’il s’agit de négociations »[ii]. De même, non sans une pointe d’humour, la Médiatrice européenne a affirmé que « l’enquête n’a pas non plus pour but de déterminer comment les trilogues doivent être organisés. Si les négociateurs veulent délibérer avec 3, 30 ou 300 participants dans la même pièce, même à trois heures du matin, ce n’est pas mon problème »[iii].

Plusieurs pistes ont été dégagées lors de l’audition publique organisée par la Médiatrice européenne, le 28 septembre, pour améliorer la transparence des trilogues sans compromettre la recherche d’un accord politique délicat. Nous retiendrons ici essentiellement les pistes synthétiques proposées par Vicky Marissen. Il a tout d’abord été envisagé de cesser de recourir systématiquement à l’usage de trilogues, pour évaluer leur intérêt au cas par cas. Le choix de recourir à un trilogue devrait également être publiquement justifié. En ce sens, la fréquence des trilogues pourrait être régulée à l’aide d’un plafond légal, afin d’assurer un temps suffisant à la réflexion entre chaque rencontre pour garantir un compromis de qualité. La présence de la Commission pourrait n’être envisagée que sur demande des co-législateurs, afin de confiner autant que possible son rôle à celui de médiateur. Les four column documents devraient être obligatoirement publiés, tout comme les commissions du Parlement devraient être tenues informées du déroulé des négociations au sein des trilogues au fur et à mesure de ceux-ci. Enfin, afin d’éviter que l’accord trouvé en trilogue soit simplement entériné par le comité de conciliation, il est impératif de le soumettre à un véritable débat en plénière au sein du Parlement européen, suivi d’un vote pour adoption où chaque député est responsable de son choix politique. Certains pourraient faire remarquer qu’il y a là des éléments bien audacieux .

L’Ombudsman va désormais pouvoir finaliser son enquête et proposer aux institutions de changer leurs pratiques, voire de légiférer pour encadrer juridiquement les trilogues. C’est l’occasion pour les institutions de prouver leur bonne volonté à rapprocher l’Union des citoyens, et de regagner en légitimité démocratique à leurs yeux. Dans tous les cas, la Commission n’a pas attendu les conclusions de la Médiatrice pour inclure la question de la transparence des trilogues dans sa Proposition d’accord interinstitutionnel pour une meilleure règlementation du 19 mai 2015 : « les trois institutions doivent garantir un degré approprié de transparence dans le processus législatif, y compris dans le cadre des négociations trilatérales [c.-à-d. les trilogues] entre les trois institutions  »[iv] (point 28).

Les accords interinstitutionnels sont conclus par les trois institutions de l’Union afin d’affirmer des principes communs ou d’aménager leurs relations réciproques. Non prévus par les traités à l’origine, ces accords se sont multipliés à partir des années 1980 afin de combler les vides juridiques des traités ou de normaliser les relations entre les institutions. Leur succès a justifié qu’ils soient inclus dans le droit primaire de l’Union à partir du Traité de Lisbonne (2009).

La proposition de la Commission a fait l’objet d’une première négociation les 25 et 26 juin entre le Président de la Commission Jean-Claude Juncker, le Président du Parlement européen Martin Schultz et le Premier ministre letton Laimdota Straujuma, dont le pays exerçait alors la présidence du Conseil de l’Union.

Lauriane Lizé-Galabbé

Pour en savoir plus :

-. Pour consulter un schéma de la procédure de codécision avec explications (FR, EN)http://ec.europa.eu/codecision/stepbystep/diagram_fr.htm

-. Pour en savoir plus sur les dérives au sein des trilogues (FR)https://www.contexte.com/article/relations-interinstitutionnelles/les-trilogues-ces-raccourcis-de-la-democratie-europeenne_23550.html

– . Pour en savoir plus sur le médiateur européen et pour déposer une plainte (FR, EN)http://europa.eu/about-eu/institutions-bodies/ombudsman/index_fr.htm

– . Pour consulter le discours d’ouverture de la Médiatrice européenne, Emily O’Reilly, prononcée le 28 septembre 2015 à Bruxelles (EN)http://www.ombudsman.europa.eu/activities/speech.faces/en/60991/html.bookmark

-. Pour lire la note d’information à destination du public de Vicky Marissen, « Way to improve efficiency and transparency in trilogues and EU law-making » à l’occasion de l’audition publique « Trilogues and transparent law-making » organisée par la Médiatrice européenne le 28 septembre 2015 (EN)http://www.ombudsman.europa.eu/fr/activities/visitreport.faces/fr/61004/html.bookmark

-. Proposal for an Interinstitutionnal Agreement on better Regulation http://ec.europa.eu/smart-regulation/better_regulation/documents/com_2015_216_en.pdf(FR) http://ec.europa.eu/smart-regulation/better_regulation/documents/com_2015_216_fr.pdf

[i] Citation originale (EN) : “Trilogues are now a key part of the EU legislative process. After a proposal by the Commission and initial consideration by the legislators, it is increasingly in trilogues that legislation is finally negotiated and decided upon. It is where deals are done that affect over 500 million Europeans… Major pieces of legislation on matters ranging from President Juncker’s Investment Plan to mobile phone roaming charges are finalised during trilogies”.

[ii] Citation originale (EN) : “[the inquiry does not aim at ensuring that] absolutely everything discussed in trilogues be documented, written down, or otherwise noted. This is absurd, as these are negotiations”.

[iii] Citation originale (EN) “The inquiry also does not seek to shape how trilogues are organised. If negotiators want to deliberate with 3, 30 or 300 participants in the room, even at three in the morning, that is not my concern”.

[iv] Traduction non-officielle (EN) : « The three institutions will ensure an appropriate degree of transparency of the legislative process, including of trilateral negotiations between the three institutions »

Classé dans:CITOYENNETE EUROPEENNE, Droit à l’information, DROITS FONDAMENTAUX, Questions institutionnelles

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