2016-11-10

Elle est désormais considérée comme une valeur clé au cœur de toute entreprise. La donnée, quel que soit le secteur d’activité dans lequel on évolue, est appelée à être mieux valorisée. Au premier chef, la banque, dépositaire d’une grande quantité de données, doit apprendre à mieux la maîtriser, tant pour répondre à de récentes exigences réglementaires que pour saisir de nouvelles opportunités. BGL BNP Paribas, en l’occurrence, a entrepris un vaste chantier devant lui permettre de mieux exploiter la valeur des données que l’institution recèle. Par Sébastien Lambotte, pour ITnation Mag de Novembre 2016

Comment une banque comme BGL BNP Paribas appréhende-t-elle les opportunités relatives à la donnée ?

Marc Aguilar • MA : Le modèle économique du futur sera centré sur la donnée et son exploitation au travers d’algorithmes. C’est d’ailleurs déjà le cas pour les géants du web comme Google, Amazon, Facebook ou encore des nouveaux venus comme Uber : la donnée est au cœur de leur activité.

A bien y réfléchir, l’industrie bancaire n’est pas très différente ; on y collecte un vaste ensemble de données, on y opère moult transformations pour, in fine, les exploiter. Le défi auquel nous sommes confrontés porte sur la meilleure manière de créer ou d’exploiter de l’information issue des données brutes. En tant que telle, une donnée brute n’a que peu de valeur, sa valorisation n’est liée qu’au processus d’exploitation : l’algorithmique. Les objectifs sont divers, allant du reporting à la stratégie. Mais peu importe le périmètre d’application, sans cette intelligence, on ne va pas bien loin. Il nous appartient, en tant qu’acteur bancaire, dans un secteur qui connaît de profondes mutations, et au-delà de l’algorithmique, de mieux maîtriser nos données afin de déterminer ce qu’il est possible d’en faire pour, enfin, les interpréter de la manière la plus efficace qu’il soit.

Philippe Sterno • PS : Désormais, cette dimension « data » est intégrée au cœur de la stratégie business. Depuis l’année dernière, le groupe BNP Paribas a créé une nouvelle fonction, celle de Chief Data Officer (CDO). Cette position est occupée par Marc chez BGL BNP Paribas.

Qu’est-ce qui a justifié la mise en place de cette nouvelle organisation depuis un an ?

MA : La donnée a acquis une réelle valeur stratégique, qui était moins perceptible par le passé. Nous passons d’un mode de gestion implicite de la donnée à une approche explicite, alignée aux objectifs stratégiques de la banque. Désormais, la donnée est considérée comme une valeur clé pour le développement de la banque et de ses services. Toutefois, avant de l’exploiter, la première étape est de bien la maîtriser, c’est-à-dire de la comprendre et de mesurer notamment son niveau de qualité tout au long de son cycle de vie.

PS : La banque est dépositaire d’une quantité importante de données, porteuses de valeur. L’empilement historique des développements réalisés par le passé et la complexité croissante des systèmes d’information ont engendré une perte progressive de la maîtrise de la donnée et de l’information. Une même donnée peut être encodée à différents endroits, être exploitée au sein de processus disparates et être transformée au sein d’un processus sans aucune synchronisation avec les autres processus. Dans ce contexte, il est donc essentiel de recouvrer la maîtrise de l’information. C’est notamment le défi qu’est occupée à relever l’équipe de Marc, avec le soutien de notre département informatique et des collaborateurs des métiers.

Comment, concrètement, pouvez-vous créer de la valeur au départ de cette donnée ?

PS: Les données dont nous disposons peuvent être exploitées à des fins commerciales. Elles nous permettent de mieux connaître le client et, dès lors, de proposer des services ou des offres bien adaptées à ses besoins. Cette tendance en faveur d’une meilleure analyse et exploitation de la donnée dans cette optique s’est notamment accélérée ces deux dernières années.

Mais les données ont toujours été présentes. Pourquoi cette accélération récente ?

PS: Parce que, jusqu’ici, la technologie ne permettait pas d’exploiter facilement des immenses volumes de données. Le stockage de la donnée s’est fortement démocratisé et le web offre aujourd’hui une multitude de possibilité de sourcing de données. Il fallait donc inventer des nouvelles technologies qui permettent d’exploiter ces immenses volumes de données d’une manière efficace. C’est principalement sur cette technologie que les géants du web ont développé leur modèle. L’objectif, aujourd’hui, est d’intégrer ces technologies à la banque pour créer de la valeur.

La banque de demain sera-t-elle principalement gérée par des mathématiciens ?

M.A. : La banque compte déjà beaucoup de mathématiciens, ne fut-ce qu’en matière de gestion et de modélisation des risques. Leur nombre devrait augmenter sensiblement à l’avenir. La technologie et l’algorithmique nous permettent aujourd’hui d’accéder à de nouvelles connaissances.

En revanche, il y a une dimension créative qu’il ne faut pas négliger. Dans ce contexte, de nouveaux métiers apparaissent, tels que les data scientists qui s’appuient sur des compétences mathématiques tout en gardant à l’esprit cette dimension créative. Mais les algorithmes, aussi puissants ou innovants soient-ils, ne peuvent pas se substituer à la relation humaine qui existe entre la banque et son client. N’oublions pas que, plus qu’un ensemble de processus et de traitements de données et de flux financiers, le métier de banquier est de conseiller et d’accompagner son client dans la gestion de son patrimoine et/ou de ses besoins financiers. Il n’en demeure pas moins que les nouvelles exploitations de la donnée devraient faire évoluer les services clients et les relations avec ces derniers.

Découvrez l’intégralité de ce Grand Entretien dans l’édition automnale d’ITnation MAG.

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