2013-11-30



Le Kenya a lancé jeudi la construction d’une ligne de chemin de fer de plusieurs milliards de dollars, pour dynamiser le commerce est-africain et consolider sa place de leader économique régional.

La ligne ferroviaire, financée par les Chinois, doit relier Mombasa, premier port régional sur l’océan Indien, à la capitale kényane Nairobi.

Le but de ce projet de 13,8 milliards de dollars (10 milliards d’euros), imaginé par le Kenya, l’Ouganda et le Rwanda, est de prolonger la ligne jusqu’à Kampala puis Kigali, et potentiellement jusqu’au Soudan du Sud.

“Nous sommes ici aujourd’hui pour transformer le cours de l’Histoire non seulement pour le Kenya, mais pour la région est-africaine dans son ensemble”, a déclaré le président kényan Uhuru Kenyatta en lançant la construction de la ligne à Mombasa, ville côtière très touristique.

Grâce à cette ligne, “l’Afrique de l’Est va devenir une destination compétitive pour les investissements (…) et une Afrique de l’Est en expansion, c’est bon pour le pays”, a ajouté M. Kenyatta, remerciant le président chinois Xi Jinping pour l’”intérêt personnel” qu’il a porté au projet et pour le soutien du gouvernement de Pékin.

La construction de la nouvelle ligne Nairobi-Mombasa a été confiée à l’entreprise d’Etat chinoise China Road and Bridge Corporation (CRBC), qui vient également de construire une extension du port de Mombasa.

“C’est un projet phare pour le Kenya et l’Afrique de l’Est”, a renchéri l’ambassadeur de Chine au Kenya, Liu Guangyuan, présent à la cérémonie.

Actuellement, seule une vieille ligne délabrée, héritée de la colonisation britannique, relie Nairobi à Mombasa, et les trains mettent plus de 12 heures pour parcourir les 450 km de savane qui séparent les deux principales villes kényanes.

Le fret ferroviaire représente une part dérisoire du transport de marchandises entre Nairobi et Mombasa, l’immense majorité des biens importés étant transportés par camion sur des routes tout aussi mal entretenues.

Grâce à la nouvelle ligne, les autorités kényanes espèrent réduire de 60% les coûts du transport de marchandises, l’un des principaux obstacles actuels aux investissements. La construction devrait être achevée d’ici 2017, selon les autorités kényanes, qui comptent également rénover la ligne ferroviaire coloniale avec d’autres financements.

Tensions régionales

“A l’heure actuelle, nos régions reposent presque exclusivement sur le transport routier”, a souligné jeudi M. Kenyatta, espérant, avec ce projet de chemin de fer entre le Kenya, l’Ouganda et le Rwanda, “remplir les promesses de prospérité” faites à “tous nos peuples est-africains”.

Ce projet de train ferroviaire s’ajoute à d’autres projets majeurs d’infrastructures entre le Kenya, l’Ouganda et le Rwanda, notamment dans le secteur pétrolier — des projets d’oléoducs et de raffineries sont en discussion.

Mais il est loin de satisfaire tous les pays de la région.

La Tanzanie a ouvertement dénoncé ce triangle régional qui la laisse, elle comme le Burundi, cinquième pays de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC), sur le bord de la route.

“Veulent-ils nous pousser vers la sortie” de l’EAC?, s’est publiquement interrogé début novembre le président tanzanien Kakaya Kikwete.

En arrière-fond se joue aussi une sévère concurrence commerciale régionale : la Tanzanie, avec elle aussi l’aide de la Chine, compte bientôt avoir son grand port régional du nord de sa capitale économique Dar es Salaam, qui rivaliserait avec Mombasa.

Et le ministre burundais en charge des Transports, Déo Rurimunzu, a annoncé ce jeudi même que son pays, avec la Tanzanie mais aussi la République démocratique du Congo (RDC), riche en minerais, venaient de s’engager à développer plusieurs projets communs dans les transports — notamment ferroviaire — et l’énergie.

Le ministre a assuré qu’il ne s’agissait pas d’une “réaction au fait que le Kenya, l’Ouganda et le Rwanda (…) ont décidé de développer un certain nombre de projets spécifiques”. Mais il a tout de même regretté et s’est aussi “inquiété” “du fait que ces trois pays veuillent développer seuls leurs projets.

Au Kenya aussi, le projet de nouvelle ligne ferroviaire a d’ailleurs soulevé des critiques : des députés ont notamment dénoncé une attribution opaque de contrats.

AFP

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